« Les théâtres francophones du Pacifique Sud », d’Alvina Ruprecht

Après une présentation de Kanaké, jeu scénique conçu par Jean-Marie Tjibaou, l’ouvrage propose dix-neuf entretiens avec des spécialistes du milieu théâtral, originaires des collectivités françaises du Pacifique Sud (Nouvelle-Calédonie et Polynésie française).

Ils nous offrent un nouveau regard sur ce que nous appelons le « théâtre », nous obligeant à relativiser notre perception « classique » de la pratique scénique et textuelle. Le résultat est à la fois une extraordinaire fusion des pratiques vivantes, qui relèvent autant d’une formation professionnelle telle qu’on en trouve en
Europe que des pratiques rituelles qui structurent ces sociétés.

Plusieurs institutions jouent un rôle fondamental dans la création et la recherche dans ces territoires. Ce sont le Théâtre de l’Île, le Centre d’Art, le Centre Goa Ma Bwarhat à Hienghène, le Centre culturel Jean-Marie Tjibaou à Nouméa, ainsi que La Maison de la Culture et le Conservatoire artistique de la Polynésie française à Papeete.

L’oeuvre de Jean-Marie Tjibaou, mise en scène par George Dobbelaere, est devenue un événement de rassemblement régional. Elle a inauguré des rapports entre une forme hybride de théâtre et les stratégies de l’anthropologie théâtrale telles que l’ont théorisée Richard Schechner et Eugenio Barba. Ceux-ci, comme Jean-Marie Tjibaou, croyaient que le théâtre pouvait transformer la culture. On peut ainsi situer le travail dramaturgique et scénique du grand chef kanak dans la mouvance mondiale des pratiques théâtrales de ces années de renouvellement culturel.

Alvina Ruprecht est critique théâtrale, professeure émérite de l’Université Carleton, rattachée au département d’Études théâtrales de l’Université d’Ottawa. Sa recherche et ses publications portent sur les théâtres de l’ensemble de la Caraïbe, sur l’océan Indien et le Pacifique Sud. Depuis 2007, elle collabore avec l’équipe de Jean-Michel Martial (L’Autre souffle), sur le Répertoire Intercaraïbéen, un projet de publication multilingue.

Ils en ont parlé

« Alvina Ruprecht […] est une spécialiste reconnue du théâtre francophone, en particulier dans sa dimension caribéenne. Avec ce nouvel ouvrage, elle présente un panorama passionnant du théâtre tel qu’il se pratique de nos jours en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie Française. Comme elle l’explique, […] les populations autochtones de ces deux lointains territoires de la République n’avaient évidemment aucune pratique du théâtre tel qu’on le conçoit dans la tradition européenne, par contre ils cultivaient d’autres expressions, liées d’une manière ou une autre au sacré, parfois encore vivaces, qui ont pu se combiner avec le théâtre importé pour donner naissance à des formes hybrides qui sont d’ailleurs loin d’être fixées. »

Une critique de Selim Lander pour la revue MondesFrancophones.com (mars 2017)

 

 « Dans une excellente introduction, Alvina Ruprecht, analyse ce que peut recouvrer le mot théâtre, puisque comme elle le rappelle justement par exemple, il n’existe pas dans les langues kanak […] Mais très lucidement, elle rapproche ce « théâtre », proche de pratique rituelles de la notion de performance devenue courante depuis une trentaine d’années en arts plastiques…  L’auteure rapproche dans une intéressante réflexion anthropologique, ces pratiques du spectacle, de celles des troupes marginales à l’époque aux Etats-Unis mais cultes en Europe […]. Tous empruntèrent nombre de leurs pratiques à des rituels indiens, africains, vaudous, etc. Ce qui nous oblige à avoir une approche plus fine des spectacles créés si loin de la métropole et le plus souvent ignorés d’elle. »

Un article sur le site Théâtre du blog (avril 2017)