L’éphéméride du 6 mars

L’opéra La traviata de Verdi est présenté pour la première fois au Théâtre La Fenice à Venise le 6 mars 1853.

La traviata est un opéra en trois actes de Giuseppe Verdi créé le 6 mars 1853 à La Fenice de Venise sur un livret de Francesco Maria Piave d’après le roman d’Alexandre Dumas fils, La Dame aux camélias (1848) et son adaptation théâtrale (1852).

Victime d’une distribution défaillante, l’œuvre s’est heurtée, lors de sa création, à l’incompréhension du public, dérouté par un drame romantique au caractère intimiste, privé de la distance héroïque traditionnelle et servi par un réalisme musical inaccoutumé. Mais, reconnue à sa juste valeur dès les représentations suivantes, La traviata est devenue au xxe siècle l’une des œuvres les plus jouées dans les opéras de par le monde. L’œuvre de Verdi a bénéficié du talent d’interprètes exceptionnels comme Maria Callas et Renata Scotto qui savaient allier prouesses vocales et qualités dramatiques, ou comme plus récemment Anna Netrebko et Pretty Yende.

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Œuvre parmi les plus célèbres du répertoire, elle fait partie, avec Rigoletto (1851) et Il trovatore (1853), de la « trilogie populaire » qui a conféré à Verdi, de son vivant, une gloire internationale incontestée.

Genèse
Au cours de leur séjour parisien de décembre 1851 à mai 1852, Verdi et Giuseppina Strepponi assistent à une représentation de La Dame aux camélias d’Alexandre Dumas fils, adaptation de son roman, créée le 2 février 1852 au théâtre du Vaudeville. Selon les propos de Maria Filomena Verdi, la fille adoptive du compositeur, rapportés par ses descendants, le maestro aurait entrepris la composition du futur opéra dès ce moment, alors qu’il ne disposait pas encore du livret. Toutefois, il connaissait vraisemblablement le roman à l’origine de la pièce malmenée par la censure parisienne.

Antonio Gallo, impresario du Teatro San Benedetto et ami de Verdi, avait demandé dès septembre 1851 au compositeur une nouvelle œuvre pour Venise. En janvier 1852 c’est au tour de Carlo Marzari, secrétaire de la Fenice, d’approcher Verdi, lequel s’engage à écrire un opéra destiné à la saison de carnaval 1853. Un contrat est signé au printemps avec Guglielmo Brenna représentant La Fenice, prévoyant un cachet de 8 000 lires autrichiennes. Le sujet n’en est pas encore défini. Francesco Maria Piave travaille pourtant sur un livret, dont nous ne savons rienb, jusqu’en octobre 1852, lorsque le musicien décide brusquement d’adapter La Dame aux camélias que vient de lui faire parvenir l’éditeur parisien Marie Escudier.

L’ébauche du scénario, bouclée en cinq jours, est envoyée à Venise, alors que Verdi travaille encore à la composition d’Il trovatore. Le futur opéra porte alors le titre d’Amore e mortec. Dans une lettre adressée en janvier 1853 à son ami napolitain Cesare de Sanctis, Verdi explique : « Je monte La Dame aux camélias qui s’appellera peut-être La traviata [littéralement, La dévoyée]d. C’est un sujet de notre temps. Quelqu’un d’autre n’en aurait peut-être pas voulu à cause des costumes, de l’époque et de mille autres objections bizarres, mais moi je le fais avec un immense plaisir3. » Or, au grand mécontentement de Verdi, l’administration de la Fenice transpose prudemment l’action, située à l’origine à une époque contemporaine, au début du xviiie siècle, soit cent cinquante ans en arrière, ce qui lui permet de faire accepter le sujet par la censure.

Création

Fanny Salvini-Donatelli, créatrice du rôle de Violetta à la Fenice.
Pendant tout ce temps, des négociations sans fin au sujet de la distribution se déroulent entre le compositeur, depuis sa villa de Sant’Agata qu’il a regagnée après l’intermède parisien, et le théâtre vénitien, Piave faisant d’incessants allers et retours pour travailler avec Verdi et servir d’intermédiaire. Verdi s’est réservé par contrat le droit de décider après les débuts de la prima donna nouvellement engagée dans la troupe de La Fenice, Fanny Salvini-Donatelli, si celle-ci pourrait ou non chanter le premier rôle. Bien qu’elle se soit plutôt montrée à la hauteur lors de la représentation d’ouverture de la saison, Verdi, prévenu contre la soprano, informe le théâtre de la nécessité de la remplacer. Il veut « una donna di prima forza »4, « une personnalité élégante, jeune, capable de chanter avec passion ». Il aligne des noms, indécis, et, rattrapé par l’échéance contractuelle après laquelle il ne peut plus exiger de changement dans la distribution, baisse les bras en déclarant être sûr d’un fiasco, Carlo Marzari ayant « légalement raison » mais « artistiquement tort »5. L’œuvre est mise en répétition sous la direction de Piave et Verdi arrive à Venise le 21 février 1853 pour en réaliser, en quinze jours, l’orchestration et diriger les dernières répétitions. Lors de la générale, il se fait inutilement acerbe : il est trop tard.

La première est donnée le 6 mars 1853, dans des décors et des costumes du xviiie siècle, avec une distribution qui n’est pas celle souhaitée par Verdi et des interprètes déroutés par le réalisme si peu conventionnel de l’œuvre. Malgré son physique et son âge inadaptés au rôle et en dépit de son manque de sens dramatique (elle chante ses airs à l’avant-scène, sans mise en situation), seule la soprano est à la hauteur de la musique de Verdi, le baryton Felice Varesi se plaignant de n’avoir rien à chanter en comparaison de ce que Verdi avait écrit pour lui dans Macbeth ou Rigoletto.

Source : Wikipedia