L’éphéméride du 20 mars

Harriet Beecher Stowe publie La Case de l’oncle Tom le 20 mars 1852

La Case de l’oncle Tom (Uncle Tom’s Cabin) est un roman de l’écrivain américaine Harriet Beecher Stowe. Publié d’abord sous forme de feuilleton en 1852, il vaut le succès immédiat à son auteur. Le roman eut un profond impact sur l’état d’esprit général vis-à-vis des Afro-Américains et de l’esclavage aux États-Unis ; il est un des facteurs de l’exacerbation des tensions qui menèrent à la Guerre de Sécession2.

Stowe, née dans le Connecticut et pasteur à la Hartford Female Academy, était une abolitionniste convaincue. Elle centre son roman sur le personnage de l’oncle Tom, un esclave noir patient et tolérant autour duquel se déroulent les histoires d’autres personnages, aussi bien esclaves que blancs. Ce roman sentimental dépeint la réalité de l’esclavage tout en affirmant que l’amour chrétien peut surmonter une épreuve aussi destructrice que l’esclavage d’êtres humains.

La Case de l’oncle Tom est le roman le plus vendu du xixe siècle et le second livre le plus vendu de ce même siècle, derrière la Bible. On considère qu’il aida à l’émergence de la cause abolitionniste dans les années 1850. Dans l’année suivant sa parution, 300 000 exemplaires furent vendus aux États-Unis[réf. nécessaire]. L’impact du roman est tel qu’on attribue à Abraham Lincoln ces mots, prononcés lorsqu’il rencontre Harriet Stowe au début de la guerre de Sécession : « C’est donc cette petite dame qui est responsable de cette grande guerre3. »

Le roman, et encore plus les pièces de théâtre qu’il inspira, contribuèrent également à la création de nombreux stéréotypes concernant les Noirs, dont beaucoup persistent encore aujourd’hui. On peut citer l’exemple de la mammy, servante noire placide et affectueuse, des enfants noirs à moitié habillés aux cheveux en bataille, et de l’oncle Tom, serviteur dévoué et endurant, fidèle à son maître ou sa maîtresse blancs. Plus récemment, les associations négatives avec le roman ont, dans une certaine mesure, éclipsé l’impact historique de La Case de l’oncle Tom en tant que livre antiesclavagiste.

Résumé
Elisa s’enfuit avec son fils, Tom est vendu sur le Mississippi
Au xixe siècle, dans le Kentucky, État sudiste, Mr Shelby, riche planteur, et son épouse, Emily, traitent leurs esclaves avec bonté. Mais le couple craint de perdre la plantation pour cause de dettes et décide alors de vendre deux de leurs esclaves : Oncle Tom, un homme d’âge moyen ayant une épouse et des enfants, et Henri , le fils d’Elisa, servante d’Emily. Cette idée répugne à Emily qui avait promis à sa servante que son fils ne serait jamais vendu ; et le mari d’Emily, George Shelby, ne souhaite pas voir partir Tom qu’il considère comme un ami et un mentor.

Lorsqu’Elisa surprend Mr et Mme Shelby en train de discuter de la vente prochaine de Tom et Henri, elle décide de s’enfuir avec son fils. Le roman précise que la décision d’Elisa vient du fait qu’elle craint de perdre son unique enfant survivant (elle a déjà perdu deux enfants en couches). Elisa part le soir même, laissant un mot d’excuse à sa maîtresse.

Pendant ce temps, Oncle Tom est vendu à Augustin St. Clare et embarque sur un bateau qui s’apprête à descendre le Mississippi. À bord, Tom rencontre une jeune fille blanche nommée Evangeline et se lie d’amitié avec elle. Lorsque Eva tombe à l’eau, Tom la sauve. Pour le remercier, le père d’Eva lui donne des biscuits.

La famille d’Elisa est pourchassée, tandis que Tom vit chez les St. Clare
Au cours de sa fuite, Elisa retrouve son mari Georges Harris, qui s’était échappé de sa plantation auparavant. Ils décident d’essayer de gagner le Canada. Ils sont cependant poursuivis par un chasseur d’esclaves nommé Tom Loker. Loker finit par piéger Elisa et sa famille, ce qui conduit Georges à tirer sur Loker. Ne souhaitant pas que Loker meure, Elisa convainc George d’amener le chasseur d’esclaves jusqu’à un village quaker proche pour qu’il y soit soigné.

De retour à La Nouvelle-Orléans, Augustin St. Clare discute de l’esclavage avec sa cousine nordiste Ophelia qui, bien qu’opposée à l’esclavage, a cependant des préjugés contre les Noirs. St. Clare considère que lui n’a pas de préjugés, bien que possédant des esclaves. Dans une tentative pour montrer à Ophelia que ses idées concernant les Noirs sont erronées, il achète Topsy, une jeune esclave noire, et demande à Ophelia de l’éduquer.

Deux ans après que Tom fut arrivé chez les St. Clare, Eva tombe gravement malade. Avant de mourir, elle a une vision du paradis, qu’elle partage avec les personnes qui l’entourent. En conséquence de cette vision et de la mort d’Eva, les autres personnages décident de modifier leur manière de vivre : Ophelia promet de se débarrasser de ses préjugés contre les Noirs, Topsy de s’améliorer et Augustin St. Clare d’affranchir (libérer) l’oncle Tom.

Tom est vendu à Simon Legree
Augustin St. Clare est poignardé en entrant dans une taverne de La Nouvelle-Orléans et meurt avant de pouvoir tenir sa promesse. Sa femme revient sur la promesse de son mari décédé et vend Tom aux enchères à un propriétaire malveillant nommé Simon Legree. Legree, originaire du nord, emmène Tom dans une région rurale de la Louisiane, où Tom fait la connaissance des autres esclaves de Legree, et en particulier d’Emmeline, que Legree a achetée en même temps que Tom. La haine de Legree pour Tom naît lorsque celui-ci refuse son ordre de fouetter un autre esclave. Legree bat sauvagement Tom, et décide de broyer la foi en Dieu de son nouvel esclave. Cependant, malgré la cruauté de Legree, Tom refuse de cesser de lire sa Bible et de réconforter les autres esclaves. À la plantation, Tom rencontre Cassy, une autre esclave de Legree, qui a été séparée de son fils et de sa fille lorsque ceux-ci ont été vendus ; incapable de supporter la vente d’un autre de ses enfants, elle a tué son troisième.

Tom Loker fait à ce moment sa réapparition dans l’histoire ; à la suite de sa guérison par les quakers, il a profondément changé. George, Elisa et Henry ont obtenu leur liberté après être parvenus au Canada. En Louisiane, l’oncle Tom succombe presque au désespoir alors que sa foi en Dieu est mise à l’épreuve par les rigueurs de la plantation. Il a cependant deux visions, une de Jésus et une d’Eva, qui renouvellent sa détermination à rester un chrétien fidèle, même si sa vie est en jeu. Il encourage Cassy à s’enfuir, ce qu’elle fait en emmenant Emmeline avec elle. Lorsque Tom refuse de révéler à Legree leur destination, ce dernier ordonne à ses employés de tuer Tom. Alors qu’il est mourant, Tom pardonne aux employés de l’avoir battu. Impressionnés par la personnalité de l’homme qu’ils ont tué, les deux hommes deviennent chrétiens. Juste avant la mort de Tom, Georges Shelby, le fils d’Arthur Shelby (le maître original de Tom), apparaît pour acheter la liberté de Tom, mais se rend compte qu’il arrive trop tard.

Dernière partie
Sur le bateau qui les emmène vers la liberté, Cassy et Lucy rencontrent la sœur de Georges Harris et l’accompagnent au Canada. Une fois arrivée, Cassy découvre que Elisa est sa fille, qui avait été vendue enfant et dont elle n’avait pas eu de nouvelles depuis. Leur famille enfin reconstituée, ils partent pour la France puis finalement pour le Liberia, nation africaine créée pour les anciens esclaves d’Amérique, où ils retrouvent le fils de Cassy, également perdu de vue depuis longtemps. Georges Shelby retourne dans sa plantation du Kentucky et libère tous ses esclaves, en leur disant de se souvenir du sacrifice de Tom et de sa foi dans la véritable signification du christianisme.

Réactions et critiques
Dès sa publication, le livre a donné lieu à une importante controverse, suscitant des protestations de la part des défenseurs[Qui ?] de l’esclavage (qui firent paraître un certain nombre d’autres livres en réponse à celui-ci[Lesquels ?]) et des éloges de la part des abolitionnistes[réf. nécessaire]. Le roman influença profondément des œuvres protestataires postérieures, telle La Jungle d’Upton Sinclair.

Réactions contemporaines
Dès sa publication, La Case de l’oncle Tom indigne les habitants du Sud américain[réf. nécessaire]. Le roman est également violemment critiqué par les partisans de l’esclavage[Qui ?].

L’écrivain sudiste William Gilmore Simms déclara que le livre était entièrement faux5, tandis que d’autres qualifièrent le roman de criminel et diffamatoire[réf. nécessaire]. Les réactions allèrent d’un libraire de Mobile dans l’Alabama qui fut obligé de quitter la ville parce qu’il avait mis le roman en vente[réf. nécessaire], à des lettres de menace adressées à Stowe elle-même (qui reçut même un paquet contenant une oreille coupée appartenant à un esclave)[réf. nécessaire]. De nombreux écrivains sudistes, tel Simms, écrivirent peu après leur propre livre en réaction à celui de Stowe (voir la section anti-Tom ci-dessous).

Certains critiques[Qui ?] soulignèrent le manque d’expérience de Stowe concernant la vie du Sud, affirmant que ce manque d’expérience l’avait poussée à produire des descriptions inexactes de la région. Elle n’avait quasiment jamais mis les pieds dans le Sud et n’avait jamais véritablement été dans une plantation sudiste6. Stowe affirma cependant toujours qu’elle avait bâti ses personnages sur des récits faits par des esclaves fugitifs lorsqu’elle vivait à Cincinnati, dans l’Ohio. On[Qui ?] rapporte que Stowe eut l’occasion d’assister à plusieurs incidents qui la poussèrent à écrire le roman. Des scènes qu’elle observa sur l’Ohio, en particulier un mari et une femme séparés au cours d’une vente, ainsi que des articles de journaux et des entretiens lui fournirent de la matière pour le développement de l’intrigue.

En réponse à ces critiques, Stowe publia en 1853 A Key to Uncle Tom’s Cabin, tentant de montrer la véracité de la description de l’esclavage faite dans La Case de l’oncle Tom à travers des documents historiques. Dans ce livre, Stowe considère chacun des principaux personnages du roman et cite des personnes équivalentes ayant réellement existé, tout en fustigeant à nouveau l’esclavagisme du Sud de manière plus agressive encore que dans le roman lui-même. Tout comme La Case de l’oncle Tom, A Key to Uncle Tom’s Cabin eut également un grand succès. Il doit cependant être noté que, bien que Harriet Stowe prétendit que A Key to Uncle Tom’s Cabin traitait des sources qu’elle avait consultées au moment d’écrire son roman, elle ne lut une grande partie des œuvres mentionnées qu’après la publication de celui-ci.

D’après le fils de l’auteur, lorsqu’Abraham Lincoln rencontra Stowe en 1862, il déclara : « C’est donc cette petite dame qui est responsable de cette grande guerre. »7. L’avis des historiens[Lesquels ?] diverge sur la véracité de cette anecdote, et dans une lettre que Stowe écrivit à son mari quelques heures après avoir rencontré Lincoln on ne trouve mention nulle part de cette phrase. Par la suite, de nombreux spécialistes[Lesquels ?] considérèrent que le roman concentra la colère du Nord sur les injustices de l’esclavage et sur le Fugitive Slave Act, et attisa les ardeurs du mouvement abolitionniste. Le général de l’Union et politicien James Baird Weaver affirma que le livre le persuada de devenir actif au sein du mouvement abolitionniste[réf. nécessaire].

La Case de l’oncle Tom souleva également un grand intérêt en Grande-Bretagne. La première édition londonienne parut en mai 1852 et se vendit à 200 000 exemplaires[réf. nécessaire]. Une partie de cet intérêt était dû à l’antipathie éprouvée par les britanniques envers les États-Unis. Comme l’expliqua un écrivain de l’époque, « les sentiments que La Case de l’oncle Tom déchaîna en Angleterre n’étaient pas la vengeance ou la haine [de l’esclavage], mais plutôt une jalousie et une fierté nationale. Nous avons longtemps souffert de la suffisance de l’Amérique – nous sommes fatigués de l’entendre se vanter d’être le pays le plus libre et le plus éclairé qu’ait connu le monde. Notre clergé hait son système de volontariat – nos Tories haïssent ses démocrates – nos Whigs haïssent ses parvenus – nos radicaux haïssent ses manières procédurières, son insolence et son ambition. Tous les partis saluèrent Mme Stowe comme une insurgée au sein du camp ennemi »[réf. nécessaire]. Charles Francis Adams, ambassadeur des États-Unis en Angleterre durant la guerre, affirma plus tard que « La Case de l’oncle Tom, publié en 1852, exerça, grâce à des circonstances principalement fortuites, une influence sur le monde plus immédiate, plus considérable et plus spectaculaire qu’aucun autre livre jamais imprimé »[réf. nécessaire].

Le livre a été traduit dans plusieurs langues, y compris en chinois (la traduction du roman par le traducteur Lin Shu fut la première traduction en chinois d’un roman américain) et en amharique (la traduction datant de 1930 fut effectuée dans le but de soutenir les efforts de l’Éthiopie visant à atténuer les souffrances des Noirs[réf. nécessaire]). Le livre fut lu par tant de personnes que Sigmund Freud rapporta un certain nombre de cas de tendances sado-masochistes chez des patients, qui selon lui avaient été influencés par la lecture de scènes de La Case de l’oncle Tom où des esclaves se faisaient fouetter[réf. nécessaire].

À partir de 1845, l’usage s’établit au Carnaval de Paris de baptiser pour la fête les Bœufs Gras qui défilent à la promenade du Bœuf Gras. Le nom est choisi en fonction des œuvres littéraires à succès du moment, ou en rapport avec des événements importants récents, ou une chanson à la mode. Le premier Bœuf Gras baptisé ainsi s’appelera Le Père Goriot. En 1853, l’immense succès remporté en France par La Case de l’oncle Tom fait que les trois Bœufs Gras qui défilent du 6 au 8 février sont baptisés du nom de héros de ce livre : Père-Tom, Shelby et Saint-Clare8.

Impact littéraire et critique
La Case de l’oncle Tom fut le premier roman à teneur politique à être lu par un grand nombre de personnes aux États-Unis. À ce titre, il influença grandement le développement non seulement de la littérature américaine mais aussi de la littérature engagée en général. Un certain nombre de livres publiés après La Case de l’oncle Tom doivent beaucoup au roman de Stowe ; on peut citer en particulier La Jungle d’Upton Sinclair et Printemps silencieux de Rachel Carson. (« L’histoire de la quarteronne » – Case de l’Oncle Tom, chap. 34 – a aussi d’étroites ressemblances avec la nouvelle Le Diable, de Léon Tolstoï.)

Malgré son importance incontestable, La Case de l’oncle Tom est perçu par l’opinion populaire comme « un mélange de conte pour enfants et de propagande »[réf. nécessaire]. Le roman a également été décrit par nombre de critiques littéraires comme étant « tout juste un roman sentimental »[réf. nécessaire], tandis que le critique George Whicher affirma dans son Histoire littéraire des États-Unis que « Mme Stowe ou son ouvrage ne peuvent justifier du succès considérable du roman ; son talent en tant qu’écrivain amateur n’était en rien remarquable. Elle avait tout au plus une certaine maîtrise des stéréotypes en termes de mélodrame, d’humour et de pathos, et son livre est composé de ces éléments populaires »[réf. souhaitée].

D’autres critiques ont cependant fait l’éloge du roman : Edmund Wilson déclara que « démontrer une telle maturité dans l’écriture de La Case de l’oncle Tom prouve une expérience étonnante. »[réf. nécessaire] Jane Tompkins affirme que le roman est un classique de la littérature américaine et émet l’hypothèse que de nombreux critiques littéraires ont boudé le livre pour la simple raison qu’il fut extrêmement populaire en son temps[réf. nécessaire].

Certains commentateurs [Qui ?] affirment que Stowe considérait que son roman offrait une solution aux dilemmes politiques et moraux qui troublaient de nombreux opposants à l’esclavage. Stowe était une fervente chrétienne, et abolitionniste.

Léon Tolstoï « [citait] comme exemple de l’art religieux le plus élevé, né de l’amour de Dieu et du prochain, en littérature:… La Case de l’oncle Tom, etc. »9

Les experts[Qui ?] considèrent également que le roman véhicule les valeurs et les idées du Parti du sol libre. Dans cette optique, le personnage de George Harris personnifie le principe du travail libre, tandis que le personnage complexe d’Ophelia représente les nordistes qui toléraient un compromis avec l’esclavage. À l’opposé d’Ophelia est Dinah, qui agit de manière passionnée. Au cours du roman Ophelia se transforme, de la même manière que le Parti Républicain qui proclama trois ans plus tard que le Nord devait se transformer et défendre ses principes antiesclavagistes.

Des théories féministes peuvent également être vues à l’œuvre dans le livre de Stowe[réf. nécessaire], le roman constituant une critique de la nature patriarcale de l’esclavage. Pour l’auteur, les liens formant la famille étaient avant tout les liens du sang plutôt que les relations paternalistes entre maîtres et esclaves. De plus, Stowe considérait la solidarité nationale comme une extension de la famille, le sentiment d’appartenir à une nation ayant donc ses racines dans le fait de partager une race. Par conséquent, elle prêchait la colonisation de l’Afrique pour les esclaves libérés et non leur intégration dans la société américaine.

Le livre a également été considéré[Par qui ?] comme une tentative de redéfinition de la masculinité en tant qu’étape nécessaire vers l’abolition de l’esclavage. Dans cette optique, les abolitionnistes avaient commencé à rejeter la vision de l’homme agressif et dominant que la conquête et la colonisation du début du xixe siècle avaient mis en avant. Dans le but de modifier la notion de virilité de telle manière que les hommes puissent s’opposer à l’esclavage sans mettre en danger leur image ou leur place dans la société, certains abolitionnistes se rapprochèrent de principes tels que le droit de vote des femmes, la chrétienté ou la non-violence, et firent l’éloge de la compassion, de la coopération et de l’esprit civique. D’autres courants du mouvement abolitionniste prônaient une action masculine plus agressive et plus conventionnelle. Tous les hommes dans le roman de Stowe sont des représentants de l’un ou l’autre de ces courants.

Création et popularisation de stéréotypes
Au cours des dernières décennies, aussi bien lecteurs que spécialistes ont critiqué le roman pour ses descriptions racistes et condescendantes des personnages noirs, en particulier en ce qui concerne leur apparence, leur manière de parler et leur comportement, mais aussi la nature passive de l’oncle Tom face à son destin. L’importance de la création par le roman de nouveaux stéréotypes ainsi que son usage de stéréotypes déjà existants est d’autant plus grande que La Case de l’oncle Tom fut le roman le plus vendu au monde au xixe siècle. En conséquence, le livre (ainsi que les images l’illustrant et les pièces de théâtre associées) contribua grandement à implanter de manière permanente ces stéréotypes dans la mentalité américaine.

Parmi les stéréotypes de Noirs présents dans La Case de l’oncle Tom se trouvent :

Le happy darky, incarné par le personnage paresseux et insouciant de Sam ;
Le mulâtre à la peau claire utilisé comme objet sexuel (personnages d’Eliza, Cassy et Emmeline) ;
La mammy à la peau noire, de nature affectueuse (à travers plusieurs personnages, en particulier Mammy, une cuisinière à la plantation St. Clare) ;
Le stéréotype de l’enfant Noir Pickaninny (personnage de Topsy) ;
L’oncle Tom, ou afro-américain trop désireux de plaire aux Blancs (personnage de l’oncle Tom). Stowe voyait Tom comme un « héros noble. » L’image de Tom représenté comme un « imbécile servile s’inclinant devant les Blancs » provient manifestement des adaptations scéniques du roman, sur lesquelles Stowe n’avait aucun contrôle.
Au cours des décennies récentes, ces associations négatives ont éclipsé de manière importante l’impact historique de La Case de l’oncle Tom en tant que « outil antiesclavagiste vital. » Ces changements dans la perception du roman prennent racine dans un essai de James Baldwin intitulé Everybody’s Protest Novel. Dans cet essai, Baldwin qualifie La Case de l’oncle Tom de « très mauvais roman », racialement stupide et à l’esthétique grossière.

Dans les années 1960 et 1970, les mouvements du Black Power et du Black Arts attaquèrent le roman, affirmant que le personnage de l’oncle Tom se livrait à une « trahison raciale » et que Tom faisait apparaître les esclaves comme étant pires que les maîtres. Les critiques visant les autres stéréotypes présents dans le livre augmentèrent également durant cette période.

Ces dernières années cependant, des spécialistes tels que Henry Louis Gates Jr. ont commencé à réévaluer La Case de l’oncle Tom, affirmant que le livre est « un document central dans les relations interraciales en Amérique et une importante exploration morale et politique des caractéristiques de ces relations. »

Littérature anti-Tom
En réponse à La Case de l’oncle Tom, certains écrivains du Sud des États-Unis produisirent des livres destinés à combattre le roman de Stowe. Cette littérature, ainsi appelée littérature anti-Tom, était en général pro-esclavagiste, soutenant que les questions portant sur l’esclavagisme telles qu’elles étaient posées dans le livre de Stowe étaient trop sentencieuses et incorrectes. Les romans de ce genre présentaient généralement un maître blanc patriarcal et bienveillant et une épouse à l’âme pure, gouvernant tous deux des esclaves semblables à des enfants au sein d’une plantation à l’atmosphère familiale et bienveillante. Les romans sous-entendaient ou affirmaient ouvertement que les Afro-Américains étaient semblables à des enfants, incapables de vivre sans être directement supervisés par des Blancs.

Parmi les plus célèbres livres anti-Tom se trouvent The Sword and the Distaff de William Gilmore Simms, Aunt Phillis’s Cabin de Mary Henderson Eastman et The Planter’s Northern Bride de Caroline Lee Hentz, cette dernière ayant été une amie proche de Stowe lorsqu’elles vivaient toutes deux à Cincinnati. Le livre de Simms fut publié quelques mois après le roman de Stowe et contient un certain nombre de discussions contestant le livre de Stowe et sa vision de l’esclavage. Le roman de Caroline Lee Hentz, paru en 1854, lu par de nombreuses personnes à l’époque mais à présent largement oublié, présente une défense de l’esclavage à travers les yeux d’une femme du Nord, fille d’un abolitionniste, qui épouse un propriétaire d’esclaves du Sud.

Durant la décennie s’étendant entre la publication de La Case de l’oncle Tom et le début de la guerre de Sécession, entre vingt et trente livres anti-Tom furent publiés. Parmi ces romans se trouvent deux livres intitulés Uncle Tom’s Cabin As It Is, l’un de W.L. Smith et l’autre de C.H. Wiley. Plus de la moitié de ces œuvres anti-Tom furent écrits par des femmes blanches, ce que Simms commenta en parlant de « l’apparente justice poétique du fait qu’une femme du Sud réponde à la femme du Nord (Stowe). »

Source : wikipedia