Le 1er Mai, journée internationale de lutte pour les droits des travailleurs

— Par Evelyne G. et Huguette B. Emmanuel, pour Culture Égalité —

  1. L’origine du 1er mai

Le 1er mai 1886, à Chicago (USA), des ouvriers se mettent massivement en grève pour obtenir la journée de 8 heures. Alors qu’ils manifestent pacifiquement, la police, au service du grand patronat, « tire pour tuer » (massacre de Haymarket Square). Malgré l’émotion et la mobilisation internationales, 8 syndicalistes anarchistes sont emprisonnés, 5 condamnés à mort, 4 exécutés par pendaison, le 5e s’étant suicidé dans sa cellule. Peu après, ils sont réhabilités, car reconnus innocents et victimes d’un complot politico-policier.)

En 1889, l’Internationale ouvrière, réunie à Paris pour le 100e anniversaire de la Révolution française, décide de faire du Premier mai une journée de revendication internationale pour réclamer la journée de huit heures.

2) « Les premiers 1er Mai »

En France, le premier 1er mai se déroule en 1890. Ce jour-là, les ouvriers défilent avec un triangle rouge à la boutonnière symbolisant leur triple revendication : 8h de travail, 8h de sommeil, 8h de loisir.

En 1891, à Fourmies, dans le Nord de la France, dans les industries textiles, le travail dure 12 h/jour, parfois 15, six jours sur sept. Les salaires sont particulièrement bas. Le 1er mai, la troupe tire sur la foule manifestant pacifiquement, dix personnes sont tuées, dont 4 femmes et deux enfants de onze et treize ans. Avec ce nouveau drame, le 1er mai s’enracine dans la tradition de lutte des ouvriers européens et devient la fête des travailleurs. En souvenir du sang versé, les militants arborent désormais une églantine rouge.

3) Les dérives autour du 1er mai

Le 24 avril 1941, le maréchal Pétain, appliquant sa devise Travail, Famille, Patrie, débaptise « la fête des travailleurs » trop liée, pour lui, à la lutte des classes. A la place, il fait du 1er mai (jour également de la fête de son saint patron, Saint Philippe) « la fête du Travail et de la Concorde sociale », et remplace l’églantine rouge par le muguet.

A la Libération, la fête des travailleurs est rétablie, mais jusqu’à aujourd’hui, certain.es oubliant que ce jour férié chômé a été arraché de haute lutte, grâce au sang des travailleurs, pour célébrer et faire avancer leurs revendications, le considèrent comme un banal jour de congé, de loisir et de farniente où on échange des brins de muguet et des vœux de bonheur. Bien entendu, les industries de consommation les y encouragent fortement !

4) La lutte pour le 1er Mai, aujourd’hui, en temps de Covid

Au niveau international, et en particulier en Europe, l’actuelle crise sanitaire est un prétexte pour attaquer les droits des travailleurs. En France, le gouvernement en profite pour casser le code du travail (jusqu’à 60h de travail par semaine, temps de repos réduit et suppression des RTT, limitation des indemnités de chômage partiel, réforme des retraites…) et imposer l’austérité. Pourtant, l’écart se creuse entre les riches (qui continuent d’amasser des profits) et les pauvres : la fortune des milliardaires français a augmenté en un an de 170 milliards d’euros soit une hausse moyenne de 40 % selon Attac. Tandis que les pauvres sont dans une stratégie de survie pour se nourrir, se loger, s’occuper de leurs enfants.

5) Les femmes partie-prenante du 1er Mai et leurs revendications spécifiques

Les femmes représentent 70 % des “travailleurs pauvres”, 62 % des personnes en emploi non qualifié et 90 % des familles monoparentales, particulièrement exposées à la pauvreté. En même temps, cette crise a mis encore plus en lumière le rôle fondamental des femmes dans la société : dans la vie de tous les jours, les métiers indispensables de l’alimentation, de la santé, de l’éducation, des transports… Mais les plans de relance vont aggraver les discriminations qu’elles subissent déjà. Les associations féministes annoncent une régression de 30 ans sur l’égalité femmes hommes. Aucune de nos revendications spécifiques ne sont satisfaites : l’allongement des délais légaux de l’avortement, la prévention et l’éradication des violences sexistes et sexuelles, la protection des mineurs contre les crimes et délits sexuels et l’inceste, la lutte contre les réseaux de traite humaine ; les sans-papier.es et les migrant.es sont toujours pourchassé.es et persécuté.es.

6)  Le 1e r Mai des femmes en Martinique

Aujourd’hui, en Martinique, les femmes doivent faire face à deux fléaux particuliers. D’abord, le COVID, qu’elles affrontent dans des conditions encore pires que celles de leurs consœurs de France : une précarité et une insécurité renforcées, un quotidien rendu encore difficile par la fermeture non organisée et sans contrepartie des écoles et des cantines, la perte parfois de leurs jobs, le confinement sans protection avec un conjoint à la violence parfois exacerbée par les circonstances…

Le deuxième de ces fléaux est le chlordécone qui a empoisonné les terres et les eaux douces ou salées de la Martinique. Bien entendu, la santé de la population en est lourdement affectée, les cancers et les maladies spécifiques se multiplient de façon plus ou moins précoce, en particulier chez les femmes.

Chez nous, les femmes ont toujours été nombreuses à s’investir dans le mouvement social. En ce 1er mai, notre association féministe martiniquaise, Culture Egalité, les appelle à se mobiliser encore plus massivement pour défendre leurs revendications, celles des travailleurs et travailleuses de la Martinique et du monde entier.

Evelyne G. et Huguette B. Emmanuel, pour Culture Égalité.