Hommages à Salvador Allende et Pablo Neruda

Lundi 11 septembre 2023 à 17h, Place du Marché, avenue Salvador-Allende à Dillon

Il y a 50 ans, le 11 septembre 1973, le monde entier apprenait la mort du Président chilien démocratiquement élu, Salvador ALLENDE, lors du Coup d’Etat sanglant du général Augusto PINOCHET à Santiago.

Quelques jours plus tard, le 23 septembre 1973, mourait son fidèle compagnon, le poète chilien Pablo NERUDA, Prix Nobel de Littérature.

Salvador Allende était membre du Parti socialiste chilien.

Pablo Neruda était membre du Parti communiste chilien.

La Cité Dillon porte le souvenir de ces deux illustres personnalités chiliennes, avec l’Avenue Salvador-Allende, voie principale de Dillon, et l’œuvre monumentale « La Porte » du sculpteur martiniquais Laurent Valère, sur le morne Dillon.

Une cérémonie d’hommage sera organisée le :

LUNDI 11 SEPTEMBRE 2023 A 17 HEURES ( 5 heures du soir)

Avenue Salvador-Allende, Place du marché

Cité Dillon, FORT-DE-France

A l’occasion du cinquantenaire de leur mort.

  •  17 H : Rassemblement Place du Marché, Avenue Salvador-Allende
  •  Dépôt de gerbe au pied du panneau Avenue Salvador-Allende (premier panneau en venant de Kerlys)

• Rappel historique sur le Coup d’Etat du 11 septembre 1973

• Mot des Associations

• Marche vers le monument « La Porte »

• Dépôt de gerbe au pied du monument

• Allocution sur la biographie de Pablo Neruda

• Conclusion : Sens de la commémoration 50 ans après : Pourquoi il ne faut pas oublier : La vie exemplaire de ces deux personnalités chiliennes peut nous aider à comprendre et à affronter les maux qui nous assaillent aujourd’hui (drogue, violence, trafics en tout genre).

L’avenir a un long passé

Marie-Hélène Léotin

*******

HOMMAGE A SALVADOR ALLENDE ET PABLO NERUDA

Le 11 septembre 2023, un hommage a été rendu à deux personnalités chiliennes, Salvador ALLENDE et Pablo NERUDA, à l’occasion du cinquantenaire de leur mort. Salvador Allende, Président du Chili, un des fondateurs du Parti Socialiste chilien, et Pablo Neruda, poète, prix Nobel de littérature, membre du Parti Communiste chilien, sont décédés lors du coup d’Etat sanglant du 11 septembre 1973 à Santiago du Chili.

Deux gerbes ont été déposées à la Cité Dillon à Fort-de-France : l’une au pied du panneau « Avenue Salvador-Allende » et l’autre devant le monument « La Porte » dédié aux poètes Pablo Neruda et Aimé Césaire, sur le morne Dillon.

Merci à la municipalité de Fort-de-France qui a apporté sa contribution pour que la manifestation se déroule dans de bonnes conditions de sécurité, en prenant un arrêté ; merci à l’adjointe au maire, Annie Chandey, pour sa présence et ses interventions.

Merci aux associations de Dillon qui ont immédiatement répondu favorablement, en dépit des délais très courts, en particulier l’Association Dorothy, son Président Moïse Udino, son Directeur Alain Louis, l’Association Dillon Doubout, son Président Romule Arthus, conseiller municipal.

Merci aux militants, patriotes, anticolonialistes, démocrates, pour leur présence, leur implication dans l’organisation matérielle et technique de la manifestation, leur efficacité dans les contacts pris avec les médias.

Merci aux journalistes et aux médias, en particulier RBR, Jean-Marc Party de la 1ère radio, La Lettre de Madinin’Art, Justice, et tout particulièrement à Via ATV et Radio APAL qui ont couvert la manifestation du début à la fin.

Merci à la population de la Cité Dillon.

Merci à Nicolas Nelzi, mon tout premier contact qui m’a permis d’embrayer vers les autres contacts et de déclencher les préparatifs.

Quand on donne à une rue, un boulevard, une avenue, un monument, le nom de quelqu’un, il s’agit d’une personne exemplaire dans son domaine (scientifique, culturel, artistique, sportif, politique, social…), en matière de bien, de bon, de juste, de beau. Salvador Allende, élu démocratiquement en 1970, a entamé des réformes profondes dans son pays : nationalisations des secteurs-clés de l’économie, en particulier les mines de cuivre, poursuite de la réforme agraire en faveur des paysans sans terre, accès aux soins gratuit pour les couches populaires. La terre et les mines du Chili étaient contrôlées par le Gouvernement de l’Unité Populaire, et non plus par l’oligarchie et les multinationales nord-américaines.

Tout ceci s’achève brutalement le 11 septembre 1973 avec le coup d’Etat sanglant du général Pinochet, qui bénéficie de l’appui de la CIA et des Etats-Unis. Une dictature implacable s’installait pour 16 ans au Chili.

Pablo Neruda était un poète chilien qui a chanté l’âme de son pays, ses ouvriers, ses mineurs, ses paysans, dans de magnifiques poèmes où l’on sent vibrer l’histoire, la terre, les femmes et les hommes du Chili, dans leurs luttes et leurs espoirs.

Pourquoi commémorer cinquante ans après ?

Nous ne sommes pas dans un passéisme nostalgique. Le temps de la dictature au Chili semble lointain aujourd’hui au XXI e siècle. Mais toute commémoration est tournée vers l’avenir et nous aide à poser les vraies questions sur les problèmes du présent.

Le socialiste Allende et le communiste Neruda ont eu à affronter l’Empire, à savoir les Etats-Unis dans leur volonté d’hégémonisme en Amérique latine. 2023 est aussi l’année du bicentenaire de la doctrine Monroe. L’hégémonisme nord-américain ne s’exerce plus seulement en Amérique latine aujourd’hui, mais dans le monde entier depuis la chute de l’Empire soviétique. Tous les grands empires, au cours de l’histoire, finissent par s’effondrer.

Quand on voit les problèmes de drogue, de trafic en tout genre, de violence qui se développent à la Cité Dillon, comment résoudre cela si on ne fait pas appel à l’éducation, à la culture, à la raison, au vivre ensemble, en dehors de toute volonté de domination ?

Faire venir plus de gendarmes, de CRS, de policiers, peut paraître une solution à court terme pour rassurer la population. Le sentiment de peur et d’insécurité doit reculer. Mais les problèmes de fond ne seront pas résolus. Les trafiquants déplaceront leur « marché » un peu plus loin… Quand on peut gagner trois fois plus d’argent en deux fois moins de temps…

Il est symptomatique que sur la place en face du marché, avenue Salvador-Allende, au centre, au lieu d’installer un buste de Salvador Allende avec un texte succinct sur son parcours, on a installé un DAB ! Les valeurs financières prennent le pas sur les valeurs humaines. La société de consommation a pris le dessus sur la société de la connaissance, de la pensée, de la réflexion, de la culture.

La question de la violence va reculer quand nous mettrons en avant un principe fondamental : la notion de respect de l’humain. La lutte contre les inégalités, contre les injustices, le recul de la pauvreté, sont des politiques qui relèvent du respect de la personne humaine. Voilà ce que Salvador Allende et son fidèle compagnon Pablo Neruda ont tenté de faire dans leur pays. Une vraie politique de la santé, maîtrisée par nous, une vraie politique de l’éducation, dès la maternelle, maîtrisée par nous, une vraie politique de la culture, au sens large, allant dans le sens de la connaissance et du dialogue des cultures, voilà les éléments, à long terme, qui nous permettront d’affronter les questions de violence, de désespérance de notre jeunesse et de nos familles, de délinquance en tout genre.

Merci encore.

NOU PA KA BLIYE SALVADOR ALLENDE EPI PABLO NERUDA !

Marie-Hélène LEOTIN, historienne.

*******

Salvador Allende, né en 1908, était issu d’une famille bourgeoise partageant des valeurs libérales et franc-maçonnes. Bien qu’ayant une formation de médecin, il a toujours été passionné par la politique, devenant leader étudiant dans les années 30. Il a été l’un des membres fondateurs du Parti Socialiste du Chili en 1935 et a progressivement gagné en influence au sein de ce parti. Il a également été député et ministre de la santé à un jeune âge, devenant finalement le secrétaire général du parti socialiste chilien en 1944.

Salvador Allende était réputé pour son intégrité et son intellect remarquable, incarnant le visage modéré et respectable de la gauche chilienne. Bien qu’il ait montré de l’intérêt pour des expériences plus radicales telles que la révolution cubaine, il a prôné une transition pacifique et démocratique vers le socialisme, une approche qui était profondément originale à l’époque et sur un continent marqué par le mythe de la « lutte armée ».

Dans les années 60, le Chili connaissait des tendances inflationnistes dans son économie, et bien que la démocratie chrétienne soit au pouvoir depuis 1964 et ait entrepris des réformes progressistes, la gauche et son leader emblématique, Salvador Allende, gagnaient en popularité. En vue des élections présidentielles de 1970, Allende a réussi à fédérer la gauche et le centre-gauche autour de sa candidature au sein de l’Unité Populaire (Unidad Popular), une coalition allant des communistes aux chrétiens de gauche, soutenue par les syndicats et promouvant un programme de réformes audacieux.

L’Unité Populaire visait à lutter contre l’inflation, à relancer la réforme agraire, à nationaliser les banques et surtout l’industrie du cuivre, un secteur stratégique à forte participation américaine. Face à Allende, la droite était divisée entre les démocrates chrétiens et les conservateurs, avec le candidat conservateur Alessandri comptant sur le soutien de l’armée, dont de nombreux cadres étaient anti-communistes, ainsi que des États-Unis.

Les élections présidentielles de septembre 1970, marquées par une forte polarisation de l’opinion, ont abouti à un résultat serré, avec 36,6 % pour Allende, 35,3 % pour Alessandri et 28,1 % pour le démocrate-chrétien Tomic. En l’absence de majorité absolue, la constitution chilienne stipulait que le Congrès devait choisir le nouveau président. Les semaines suivantes ont été marquées par un féroce combat parlementaire, au cours duquel les États-Unis, par l’intermédiaire de la CIA, ont fait pression pour empêcher Allende d’être élu. Malgré cela, un accord secret entre Tomic et Allende a permis à ce dernier de devenir président lors du vote du Congrès le 24 octobre.

Salvador Allende a rapidement mis en œuvre la politique économique du programme de l’Unité Populaire, ce qui a provoqué des tensions avec la droite. En été 1971, la nationalisation de l’industrie du cuivre a été mise en place, avec l’État chilien devenant propriétaire des mines de cuivre en échange d’indemnisations pour les entreprises qui les exploitaient auparavant. Cela a déclenché une réponse immédiate de Washington, qui a organisé un boycott des prêts internationaux au gouvernement chilien sous les conseils d’Henry Kissinger.

Bien que les premières années du gouvernement d’Allende aient semblé être un succès, avec une baisse de l’inflation, une augmentation du pouvoir d’achat et une croissance économique vigoureuse, l’année 1972 a vu l’émergence de problèmes inquiétants. Les réformes engagées et les pressions extérieures, principalement américaines, ont entraîné une polarisation croissante de la société chilienne. La réforme agraire, qui a parfois impliqué la confiscation de terres, a suscité la violence de certains agriculteurs opposés au gouvernement. Les tensions dans la rue étaient également exacerbées par l’opposition.

De plus, à partir de la mi-72, le Chili a connu un ralentissement économique, suivi d’une récession. Privé du soutien des élites économiques et de sources de financement internationales, le pays a été entraîné dans une spirale d’endettement et d’inflation. La population a vu ses conditions de vie se dégrader fortement, ce qui a provoqué des protestations régulières dans la rue.

Les difficultés d’Allende à gouverner se sont ajoutées à cette agitation populaire, en raison de l’opposition parlementaire vigoureuse et des démissions en série de ministres. La droite, cette fois réunie au sein de la CODE (Confederación Democrática de Chile), a même tenté de destituer le président, sans succès. Finalement, l’armée, jusqu’alors sous le contrôle du général Prats, un loyaliste, a décidé d’agir ouvertement.

À l’été 1973, Prats a été fortement critiqué par ses pairs en raison de son loyalisme, alors que le pays était plongé dans une grave crise due à la grève des camionneurs, dont le rôle vital s’expliquait par la géographie du pays. Sous la pression, Prats a démissionné de son poste de ministre de la Défense et de commandant de l’armée le 23 août 1973. Allende a nommé le général Augusto Pinochet pour le remplacer, un militaire relativement apolitique qui avait étouffé une tentative de rébellion d’un régiment de blindés deux mois plus tôt.

Pinochet, bien que réticent au départ, a compris que s’opposer au plan de Merino, l’amiral à la tête des conspirations contre Allende, aurait pu lui coûter sa carrière, voire sa vie. Il a donc rejoint les putschistes et a pris le dessus au sein de la junte de quatre membres prévue pour diriger le pays après le renversement du président Allende. Pinochet a insisté sur la nécessité d’éliminer physiquement le président, à qui il devait son poste. De plus, il n’avait pas l’intention de rendre le pouvoir à la droite parlementaire une fois le coup d’État réussi. Ainsi, Augusto Pinochet avait de grandes ambitions personnelles.

Le 11 septembre 1973, quelques heures avant l’aube, les troupes d’infanterie de marine ont pris le contrôle sans grande résistance du port de Valparaiso, un élément économiquement vital pour le pays. Quelques heures plus tard, l’armée de terre a fait de même dans la plupart des villes chiliennes. À Santiago, la capitale, les forces armées ont utilisé l’aviation pour réduire au silence les radios et les chaînes de télévision.

Allende, isolé et mal informé, s’est réfugié au palais présidentiel de la Moneda avec ses gardes du corps. À 8h30, il croyait encore qu’une partie de l’armée lui était fidèle et a même appelé Pinochet, qu’il pensait loyal. Cependant, ses appels n’ont reçu pour réponse qu’une demande de démission. Allende a refusé, invoquant ses devoirs constitutionnels envers le peuple chilien. Cependant, cette demande de démission n’était qu’une manœuvre de Pinochet pour le capturer plus tard. Après un dernier discours radiodiffusé adressé aux Chiliens, le président s’est résigné à affronter l’assaut de l’armée, avec ses 42 gardes du corps.

À 9 heures du matin, le siège de la Moneda a commencé avec l’intervention de blindés et d’infanterie. Les militaires, tenus en respect par les tireurs d’élite de la garde d’Allende, ont fait appel à l’aviation qui a bombardé la résidence présidentielle. Des combats violents ont éclaté, et les gardes du président ont finalement cédé sous le nombre. À 14 heures, lorsque les armes se sont enfin tues, Salvador Allende a été retrouvé mort. Il s’était probablement suicidé, bien que les circonstances de sa mort fassent encore l’objet de controverses. Une légende raconte que l’arme qu’il aurait utilisée était un cadeau de Fidel Castro, un fusil AK-47, orné de l’inscription suivante : « À mon bon ami Salvador, de la part de Fidel, qui essaye par des moyens différents d’atteindre les mêmes buts. » Cependant, cette anecdote, bien que symbolique, reste non confirmée.

Le coup d’État du 11 septembre 1973 a ouvert la voie à la dictature d’Augusto Pinochet. Dans les jours qui ont suivi le coup, Pinochet a pris des mesures pour instaurer un régime autoritaire au Chili, dissolvant toutes les institutions représentatives, les partis politiques, les syndicats, et imposant l’état d’urgence. Plus de 100 000 personnes ont été arrêtées, et plus de 3 000 ont été exécutées ou ont tout simplement disparu. Malgré sa condamnation officielle de cette violence d’État, les États-Unis ont soutenu le nouveau régime, le considérant comme un allié dans la lutte contre le « communisme » en Amérique du Sud, notamment dans le cadre de l' »opération Condor ».

Augusto Pinochet est devenu chef de l’État en 1974 et n’a quitté le pouvoir qu’en 1990, à l’issue d’une transition démocratique progressive entamée en octobre 1988. Bien qu’il soit resté influent dans son pays et qu’il soit même populaire auprès d’une partie de l’opinion, Pinochet a été arrêté à Londres en 1998, suite à un mandat d’arrêt international émis par le juge espagnol Garzon. Cela a marqué le début de longues batailles juridiques, qui n’ont jamais abouti en raison de l’état de santé de l’ancien dictateur. Augusto Pinochet est décédé le 3 décembre 2006 sans jamais avoir exprimé de regrets pour ses actions.

Salvador Allende a bénéficié de funérailles nationales en 1990, lors du retour à un gouvernement civil au Chili. Sa présidence et sa tragique fin restent des sujets d’étude et de débat importants dans l’histoire du Chili et de l’Amérique latine