Hommage à Fanny Auguiac : une soirée pour saluer une vie de culture et de transmission

Hier soir, 2 décembre,  Tropiques-Atrium — l’ex-CMAC qu’elle dirigea pendant plus de trente ans — a ouvert ses portes pour un hommage émouvant à Fanny Auguiac. Dans une salle à moitié remplie mais profondément recueillie, plusieurs grandes figures de la scène artistique martiniquaise se sont succédé pour saluer celle qui a tant marqué la vie culturelle de l’île. Alain Jean-Marie, Claude Césaire, Ronald Tulle, Micky Téléphe ou encore Dominique Bougainville ont chacun rappelé, par leurs mots ou leur musique, l’empreinte inaltérable qu’elle laisse derrière elle.

Fanny Auguiac n’était pas née ici, mais elle avait fait de la Martinique sa terre d’engagement et de création. Née à Paris en 1937, marquée dans son enfance par la guerre et la déportation de ses parents, elle avait très tôt trouvé dans l’art un refuge et une force. Formée à la musique, passionnée de piano, passée par le cinéma où elle avait rencontré des figures comme Beckett, Sartre ou Duras, elle avait peu à peu forgé un regard singulier sur la culture : un regard ouvert, exigeant, profondément humain.

Son arrivée en Martinique à la fin des années 1960 fut un tournant. Elle y découvrit une société blessée par l’histoire, mais dont la vitalité artistique l’enthousiasma immédiatement. Son propre passé, marqué par le génocide et l’exil, lui permit de percevoir, avec une sensibilité particulière, les fractures héritées de l’esclavage. De cette rencontre entre deux mémoires naîtra sa manière d’accompagner les artistes : attentive, respectueuse, patiente.

Directrice du Centre Martiniquais d’Action Culturelle de 1975 à 2006, elle a œuvré sans relâche à structurer et à dynamiser la vie artistique de l’île. Théâtre, danse, musique, émergence de jeunes talents : son action a contribué à révéler et à soutenir des générations entières de créateurs qui, aujourd’hui encore, reconnaissent ce qu’ils lui doivent.

La soirée d’hier n’était pas seulement un hommage ; c’était aussi une manière de dire merci. Merci pour les scènes ouvertes, les projets portés à bout de bras, les artistes encouragés, la vision culturelle patiemment construite.
Merci pour la femme qu’elle fut : courageuse, discrète, habitée par la conviction que la culture peut réparer, relier, élever.

Sous les lumières de Tropiques-Atrium, la mémoire de Fanny Auguiac a résonné avec force — comme une note tenue au piano, longue, douce, et impossible à oublier.

M’A