Ce qu’il faut retenir du très beau documentaire « Noirs en France », à revoir sur France.tv

— Par Laure Narlian —

Qu’est-ce qu’être Noir en France ? Dans un très beau documentaire diffusé mardi sur France 2 et visible en replay durant une semaine, la réalisatrice Aurelia Perreau et l’écrivain Alain Mabanckou donnent la parole à des personnes noires de tous âges et de tous horizons, tout en éclairant en contrepoint la fabrique des préjugés grâce à des images d’archives.

Ils sont jeunes, vieux, de Paris, Niort ou Bordeaux, à l’école primaire, lycéen, danseuse, aide-soignant, rapporteure à la Cour des comptes, rappeur, boxeuse, acteur-réalisateur, maîtresse de conférence, tennisman, journaliste ou ancien tirailleur, connus ou inconnus, et ils ont tous un point commun : ils sont Français et Noirs. Dans le très beau documentaire Noirs en France, à voir en replay sur france.tv jusqu’au 25 janvier, la journaliste Aurelia Perreau et l’écrivain Alain Mabanckou leur donnent la parole.

A travers leurs parcours individuels et d’intéressantes images d’archives, se dessine l’imaginaire universel qui nourrit la représentation que les Français se font des Noirs mais aussi la représentation que les Noirs d’ici se font d’eux-mêmes et de la France.

D’où viennent les stéréotypes raciaux ? De loin

Qu’est-ce qu’être noir ? « C’est le regard de l’autre qui décide si je suis noir, blanc ou mulâtre« , répond le tennisman et chanteur Yannick Noah. Mais à quel moment réalise-t-on qu’on l’est ? Souvent dans l’enfance et rarement avec des compliments. « A l’école, il y en a un qui dit que je ressemble à un caca« , confie une petite fille. « En pension j’étais le seul non blanc et je suis devenu Bamboula en quelques minutes« , se souvient Yannick Noah. Des préjugés qui les poursuivent souvent, d’une façon plus feutrée, dans le monde du travail. « Les portes sont fermées alors il faut passer par la fenêtre« , résume l’aide-soignant Didier Viellot, qui s’est entendu dire plus jeune qu’il n’avait « pas la bonne couleur » pour devenir décorateur.

Ces préjugés raciaux remontent à loin et se sont construits au fil du temps, depuis la traite négrière, comme nous le démontrent les auteurs en exhumant d’éclairantes images d’archives. On y voit notamment comment s’est élaboré le racisme biologique du 19e siècle, qui s’appuyait sur une hiérarchisation des races supposément scientifique – les Noirs, situés au bas du tableau, étant décrits comme inaptes aux tâches intellectuelles – bien commode pour asseoir la domination.

Ces stéréotypes du noir primitif ont perduré jusqu’à il y a peu dans les représentations culturelles, du clip Ya des papous de Marie Dauphin (1987) au Club Dorothée où un épisode de 1988 montrait l’animatrice rôtissant dans une immense marmite entourée de noirs en pagnes. Sans parler de l’impensable et indigne « Village Bamboula », un village folklorique africain monté en Loire-Atlantique au début des années 90.

Lire la Suite => Francetvinfo