Carrefour et Casino, au cœur d’un scandale environnemental et judiciaire au Brésil

La Conférence des Parties sur le climat, la COP28 à Dubai, a été le théâtre de révélations accablantes concernant deux géants de la distribution française, Carrefour et Casino. L’ONG Mighty Earth a mis en lumière les pratiques controversées de ces entreprises, les accusant de vendre des produits issus de la déforestation en Amazonie, engendrant une zone déboisée de plus de 500 000 hectares au Brésil.

Selon le rapport de Mighty Earth, Carrefour et Casino sont impliqués dans la commercialisation de viande de bœuf provenant de régions déforestées de l’Amazonie et du Cerrado, distant de milliers de kilomètres du lieu de la COP28. João Goncalves, directeur brésilien de l’ONG, a expliqué le processus sophistiqué de traçabilité utilisé par Mighty Earth, mettant en lumière les liens entre les fermes déforestées, les abattoirs et les supermarchés. Ces révélations ont suscité un tollé et ont jeté une ombre sur la présence des entreprises françaises à la COP28.

Carrefour, alerté en amont par l’ONG, a réfuté les accusations, qualifiant le rapport d’erroné. La société affirme avoir coupé ses liens avec des fermes problématiques et surveille ses 33 000 fournisseurs au Brésil par satellite. Cependant, João Goncalves de Mighty Earth reste sceptique quant à la véracité de ces mesures, soulignant qu’une surveillance à long terme est nécessaire pour évaluer l’impact réel de ces actions.

D’autre part, Casino n’a pas encore répondu aux demandes de réaction de la part des médias. L’entreprise fait déjà face à des poursuites en France pour son rôle présumé dans la déforestation au Brésil. Mighty Earth maintient son attention sur les abattoirs brésiliens, soulignant que tant que les entreprises françaises continueront de s’approvisionner auprès d’abattoirs impliqués dans des pratiques illégales, le problème persistira.

La mobilisation de Mighty Earth s’est étendue au-delà des rapports et des conférences, prenant la forme de manifestations devant les magasins Carrefour à Paris. L’eurodéputée Michèle Rivasi s’est jointe aux militants pour exiger que Carrefour renforce sa politique de lutte contre la déforestation. L’ONG a également lancé une pétition demandant à Carrefour de cesser de travailler avec des fournisseurs liés à la déforestation en Amazonie.

Face à ces pressions, Carrefour et Casino ont réagi de manière divergente. Carrefour, bien que surpris par la campagne, a souligné ses efforts en matière de lutte contre la déforestation. Carine Kraus, directrice de l’Engagement du groupe, a annoncé des mesures immédiates, y compris la suspension d’abattoirs problématiques et la création d’un « comité forêt » au Brésil pour réduire progressivement les approvisionnements liés à la déforestation.

Casino, en revanche, s’est retranché derrière le « secret des affaires » en ce qui concerne sa relation avec JBS, tout en déclarant que 23 fournisseurs de la filière bœuf ne respectant pas leurs engagements ont déjà été bloqués par sa filiale GPA. Casino a également exprimé son soutien au « Cerrado Manifesto » visant à protéger cette région brésilienne fortement déboisée.

La question de la déforestation en Amazonie a pris une dimension complexe avec la révélation d’un réseau de fermes familiales impliquées dans des pratiques illégales. Des entreprises telles que JBS, fournisseur majeur de Carrefour et Casino, sont accusées d’acheter de la viande produite illégalement dans des zones déboisées. Les failles dans les systèmes de traçabilité basés sur la déclaration des éleveurs ont été mises en évidence, permettant des manipulations et des ventes frauduleuses.

La situation au Brésil, marquée par des incendies dévastateurs et des politiques controversées du gouvernement, exige une action immédiate. Les autorités brésiliennes ont annoncé l’ouverture d’une enquête sur les entreprises impliquées dans le rapport de Mighty Earth. Cela souligne également le besoin urgent de réformes dans la chaîne d’approvisionnement mondiale, mettant en évidence la nécessité d’une réglementation plus stricte pour lutter contre la déforestation liée aux produits alimentaires.

Au-delà des aspects environnementaux, l’affaire met en lumière les risques pour la réputation des entreprises dans un monde de plus en plus conscientisé aux enjeux climatiques et environnementaux. Alors que les consommateurs deviennent plus sensibles aux questions de durabilité, les entreprises sont confrontées à la pression croissante de s’engager activement dans des pratiques responsables tout au long de leur chaîne d’approvisionnement.

L’issue de cette affaire reste incertaine, mais elle souligne la nécessité pour les entreprises mondiales de revoir leurs pratiques d’approvisionnement et de s’engager de manière transparente en faveur de la durabilité environnementale.

 — M’A —