“Bovary” : une relecture et une adaptation du roman de Flaubert par Tiago Rodrigues

Vendredi 18 mai 2018 à 18h 30. Couvent de Cluny

Mise en scène par Widad Amra & Jacques Olivier Enfelder

avec les élèves de la troupe théâtre du Couvent de Cluny

La note d’intention de Tiago Rodriguez
Le point de départ de Bovary […] joué en avril 2016 au Théâtre de la Bastille, est aussi un aboutissement. Je suis appelé à créer une pièce dans une distribution française, à partir d’un texte que j’ai écrit et que j’ai moi-même mis en scène au Portugal en 2014. « C’est une recherche artistique », comme dirait Monsieur Sénard, l’avocat de la défense de Flaubert en 1857. C’est une recherche artistique inédite dans mon parcours.
Cette pièce est tirée du procès dans lequel Gustave Flaubert fut accusé d’attentat à la morale à la suite de la publication de Madame Bovary en fascicules dans la Revue de Paris. Ayant pour base une adaptation libre du procès, elle intègre aussi le roman dans sa structure. Elle fait débattre la loi et la littérature. Elle prône une Babylone de mots : légaux et littéraires, rhétoriques, politiques et poétiques. La possibilité de recréer cette pièce en langue française correspond à un voyage étymologique et intime qui nous conduit à la source du débat de cette pièce : le danger des mots.
Le
lien entre la langue, l’histoire et la société française a toujours été extrêmement puissant. Même si chaque mot de ce texte a été écrit à Lisbonne, le premier geste d’écriture a eu lieu à Paris. A Lisbonne, l’actrice Carla Maciel (qui a interprété le rôle d’Emma Bovary dans la version portugaise) m’avait déjà lancé le défi d’écrire autour du roman. Des mois plus tard, lors d’un passage à Paris, en tournée, j’ai voulu rencontrer quelqu’un qui connaissait le roman de Flaubert « de l’intérieur ». « De l’intérieur » comme un spécialiste de l’écriture, mais aussi « de l’intérieur » comme un français. La mère d’une amie est professeur de littérature à Paris et elle a accepté de me rencontrer. C’était au café Saint-Jean, à Montmartre. Quand nous avons convenu du rendez-vous, elle m’a dit que la manière de la reconnaître à la terrasse du Saint-Jean serait de chercher la femme qui aurait un exemplaire de Madame Bovary sur sa table. La conversation que nous avons eue à ce rendez-vous est pour moi le premier jour d’écriture de cette pièce.
La façon dont j’ai écrit la suite de Bovary est à l’image du théâtre que je cherche à faire. J’écris en collaboration avec les acteurs. J’entre dans la salle de répétition avec quelques pages qui sont habituellement le début de la pièce. Nous discutons. Nous buvons du café. Nous lisons à haute voix. C’est très important de lire à haute voix. Nous lisons le roman de Flaubert à haute voix. Nous faisons des recherches sur les scandales artistiques et nous débattons de cette riche frontière où se confrontent l’art et la loi. Et la pièce surgit. Chaque matin, quelques pages venaient nourrir la répétition de l’après-midi. Jusqu’au jour de la première, le texte a été ajusté en consultant de façon permanente le roman cité des centaines de fois tout au long de la pièce, tout en pensant au partage de la parole.
Comment faire alors pour partager cette pièce avec des acteurs d’un autre pays, quand elle a été écrite en étroite collaboration avec des acteurs portugais ? Avec des acteurs si proches de mon travail ? Tout en reconnaissant nos affinités artistiques, il est certain que ce n’est pas la même intimité qui me lie à cette extraordinaire équipe française que nous avons réunie. Mais cette distance est compensée par la proximité qu’ils ont avec lalangue originale de Flaubert, du pouvoir symbolique d’Emma Bovary, du débat politique français sur la morale, la religion et les bonnes mœurs des années 1856 jusqu’en 2016. L’équipe française connait Madame Bovary « de l’intérieur ». Ce sont 160 ans d’intimité avec la France que cette équipe offre au texte qu’un petit portugais a osé écrire à partir de Flaubert. Voilà ce que sera cette collaboration, et je m’y engage tout en considérant que la pièce que j’ai écrite en 2014 n’est rien de plus que ces premières pages que j’amène habituellement à la première répétition. Il y aura l’espace de tout repenser, et même d’en réécrire la matière. Ce sera un spectacle entièrement neuf, construit sur la mémoire d’un travail antérieur. Une nouvelle discussion et une rencontre créative avec mon propre travail. Le point de départ et l’aboutissement.
Note d’intention, Tiago Rodrigues, Lisbonne, décembre 2014 (extrait)

Résumé de Madame de Bovary

Madame Bovary, de Gustave Flaubert, commence lorsque Charles Bovary est encore un adolescent, incapable de s’adapter à sa nouvelle école et ridiculisé par ses nouveaux camarades de classe. Il restera médiocre et terne. Après de laborieuses études de médecine, il devient un médecin de campagne de second ordre. Sa mère le marie avec une veuve bien plus âgée que lui qui mourra peu de temps après, presque ruinée par son notaire qui a disparu avec sa fortune.
Charles tombe bientôt amoureux d’Emma Rouault, la fille d’un patient, élevée au couvent, et lui demande de l’épouser. Ils s’installent à Tostes, un village normand où Charles exerce la médecine. Mais le mariage ne répond pas aux attentes romantiques d’Emma. La réalité ne correspond pas à ce qu’elle a lu dans les livres : jeune fille, elle a rêvé de l’amour et au mariage comme d’une solution à tous ses problèmes. Tandis de Charles, un peu frustre, mal dégrossis, est au comble du bonheur avec cette épouse qu’il trouve parfaite.
À la suite d’un bal extravagant à la Vaubyessard, chez le Marquis d’Andervilliers, Emma se réfugie dans le souvenir de cette soirée et commence à rêver d’une vie sans cesse plus sophistiquée. Elle rêve de Paris, lit Balzac et Eugène Süe, s’ennuie et déprime quand elle compare ses fantasmes à la réalité de monotonie de la vie du village, et finalement son apathie la rend malade. Lorsqu’Emma tombe enceinte, Charles décide de déménager dans une autre ville dans l’espoir d’améliorer sa santé.
À Yonville-L’Abbaye, les époux Bovary rencontrent Homais, le pharmacien de la ville, un moulin à paroles pompeux qui s’écoute parler et Léon Dupuis, un clerc de notaire, qui, comme elle, s’ennuie à la vie rurale et aime s’évader à travers des romans romantiques. Ils se trouvent des goûts communs.
Emma donne naissance à sa fille Berthe. Déçue, elle aurait aimé avoir un fils, elle continue d’être déprimée. Emma et Léon entretiennent une relation platonique et romantique. Cependant, quand elle se rend compte que Léon l’aime, elle culpabilise et se donne le rôle d’une épouse dévouée. Léon se fatigue d’attendre et, croyant qu’il ne pourra jamais posséder Emma, part étudier le droit à Paris. Emma n’en est que plus triste.
Bientôt, à une foire agricole, elle se laisse séduire par un riche voisin nommé Rodolphe Boulanger, attiré par sa beauté : c’est une liaison passionnée. Emma est souvent indiscrète, si bien que tous les habitants jasent à son sujet. Charles, cependant, ne soupçonne rien. Son adoration pour sa femme et sa stupidité se combinent pour le rendre sourd à tous les ragots. Sa réputation professionnelle subit un coup dur quand, poussé par Homais et par Emma, il tente une opération chirurgicale pour traiter un homme pied-bot d’Hippolyte, le garçon d’écurie de l’auberge, et finissent par devoir faire appel à un autre médecin pour amputer la jambe.
Dégoûté de l’incompétence de son mari, Emma se jette avec encore plus de passion dans sa liaison avec Rodolphe qui ne la traite pas très gentiment. Elle emprunte de l’argent pour lui acheter des cadeaux et suggère qu’ils s’enfuient ensemble et avec Berthe en Italie. Il acquiesce mollement. Mais, assez rapidement, Rodolphe, blasé et mondain, s’ennuie des affections exigeantes d’Emma. Refusant de s’enfuir avec elle, il la quitte.
Désespérée, Emma tombe malade et envisage même de se suicider. Au moment où Emma reprend pied, Charles est en difficulté financière : il a dû emprunter de l’argent pour payer les dettes de sa femme mais aussi son traitement. Pourtant, il décide de l’emmener à l’opéra dans la ville voisine de Rouen. Là, ils retrouvent Léon. Cette rencontre ravive la vieille flamme romantique entre Emma et Léon, et ils s’engagent cette fois dans une histoire d’amour Emma s’enivre de ses voyages hebdomadaires à Rouen. Elle accumule les dettes à l’usurier Lheureux, qui prête de plus en plus d’argent à des taux d’intérêt exagérées. Elle est de moins en moins discrète avec Léon. Si bien qu’à plusieurs reprises ses connaissances sont à deux doigts de découvrir son infidélité.
Au fil du temps, Emma s’ennuie avec Léon et réciproquement. Ne sachant pas comment le quitter, elle se fait de plus en plus exigeante, alors que sa dette enfle de jour en jour. Finalement, Lheureux fait saisir la saisie les biens d’Emma pour compenser la dette qu’elle a accumulée. Terrifié que Charles découvre la situation, elle tente désespérément de réunir l’argent dont elle a besoin, fait appel à Léon et à tous les hommes d’affaires de la ville. Finalement, elle tente même de se prostituer en proposant de revenir auprès de Rodolphe s’il lui donne l’argent dont elle a besoin. Il refuse, et, poussée à bout, elle se suicide en avalant de l’arsenic. Elle meurt dans d’horribles souffrances devant Charles affolé qui ne sait que faire.
Pendant un certain temps, Charles idéalise la mémoire de son épouse, avant de découvrir les lettres de Rodolphe et Léon. Confronté à la vérité, harcelé par les créanciers, ruiné et désemparé, il meurt de chagrin, seul dans son jardin.

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