1er janvier 1994 : « Basta ! », les zapatistes lancent le soulèvement armé au Chiapas

L’Armée zapatiste de libération nationale (EZLN), également connue sous le nom d’Ejército Zapatista de Liberación Nacional, est une organisation révolutionnaire militaire basée dans l’État du Chiapas au Mexique. Fondée en 1983, l’EZLN s’est fait connaître mondialement lors de son soulèvement armé le 1er janvier 1994. Cette organisation a été inspirée par des idéaux socialistes agrariens, libertaires et autonomistes, tout en mettant en avant le zapatisme, un mouvement politique et social centré sur les droits des populations indigènes.

Contexte social chiapanèque : Le Chiapas, l’un des États les plus pauvres du Mexique, a longtemps été marqué par l’analphabétisme, la dénutrition, la mortalité infantile et d’autres indicateurs sociaux négatifs. Jusqu’aux années 1970, les populations autochtones du Chiapas étaient soumises à des formes d’exploitation proches du féodalisme. Les années 1970 et 1980 ont vu l’intensification des luttes paysannes, influencées par des mouvements d’extrême gauche et des réfugiés politiques.

Origines de l’EZLN : Fondée en 1983 sur le modèle des guérillas marxistes-léninistes, l’EZLN a émergé après des années de clandestinité. Son nom est un hommage à Emiliano Zapata, figure révolutionnaire du Mexique, et à la résistance indigène contre l’impérialisme occidental. L’organisation a connu une croissance exponentielle à la fin des années 1980, rassemblant des milliers de membres et gagnant le soutien de certaines communautés indigènes.

Soulèvement de 1994 : Le 1er janvier 1994, l’EZLN a lancé un soulèvement armé, déclarant la guerre à l’armée mexicaine et occupant brièvement des villes clés. Ce soulèvement a coïncidé avec l’entrée en vigueur de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA), symbolisant le rejet du néolibéralisme. Après douze jours de combats et sous la pression de la société civile, un cessez-le-feu unilatéral a été déclaré, marquant le début des pourparlers entre le gouvernement et l’EZLN.

Accords de San Andrés : En 1996, les accords de San Andrés ont été signés, portant sur les droits et la culture des populations indigènes. Cependant, le président Zedillo a refusé de les ratifier, entraînant une rupture entre l’EZLN et le gouvernement. L’organisation a mis en place 38 « municipalités autonomes » en réponse à cette trahison perçue.

Guerre de basse intensité : Le gouvernement a répondu à l’insurrection armée par une stratégie de guerre de basse intensité, créant des unités spéciales et soutenant des groupes paramilitaires. Le massacre d’Acteal en 1997, où des paramilitaires ont tué 45 membres d’une communauté chrétienne pro-zapatiste, a illustré la violence persistante dans la région.

Années 2000 : Au début des années 2000, le président Fox a tenté de résoudre le conflit, mais les promesses non tenues ont entraîné une radicalisation de l’EZLN. Les zapatistes ont rompu le dialogue en 2001, accusant le gouvernement de trahison. Malgré les tentatives ultérieures, le conflit persiste, marqué par des périodes de tension et de calme relatif.

Héritage et symbole : L’attitude non-violente de l’EZLN, son attachement à la défense des droits indigènes et sa lutte contre le néolibéralisme ont contribué à en faire un symbole de la lutte altermondialiste. Bien que moins actif militairement au fil des ans, l’EZLN continue de jouer un rôle important dans la conscience politique au Mexique et au-delà.

Faits récents liés à l’Armée zapatiste de libération nationale (EZLN) :

En avril 2004, des militants du PRD de Zinacatán, appuyés par des forces de police locales, ont attaqué une marche pacifique de l’EZLN, faisant plusieurs blessés des deux côtés. En 2005, l’EZLN a publié sa Sixième Déclaration de la forêt Lacandone. De 2006 à 2007, l’EZLN a lancé La Otra Campaña, un tour à travers les 31 États du Mexique visant à sensibiliser la population. En juillet 2007, la deuxième rencontre entre les peuples zapatistes et du monde a réuni plus de 2 000 sympathisants de tous les continents. En décembre 2008, des affrontements entre indigènes et sympathisants de l’EZLN ont eu lieu, suivis d’autres incidents en janvier 2009 liés à des querelles foncières. En août 2009, des affrontements entre sympathisants de l’EZLN et des membres d’une association de caféiculteurs ont fait quinze blessés.

En février 2010, des affrontements à Agua Azul ont entraîné trois morts et 28 blessés. En mars 2010, des membres de l’EZLN ont dénoncé des agressions liées à la construction d’une autoroute. En juin 2010, un affrontement entre des indigènes et des membres de l’EZLN a fait deux morts. En février 2011, le gouvernement a prétendu avoir sauvé 17 touristes d’une prise d’otage par l’EZLN, mais il s’agissait d’une action de La Otra Campaña. En décembre 2012, 40 000 zapatistes ont fait une marche silencieuse à San Cristóbal de Las Casas.

En février 2013, le sous-commandant Marcos a présenté son successeur, le sous-commandant Moisés. En août 2019, des propriétaires ruraux ont réclamé au gouvernement la restitution ou une indemnisation pour des terres occupées par l’EZLN en 1994.

Organisation de l’EZLN :

L’organisation comprend des bases d’appui, des miliciens, des insurgés, la Comandancia General, et le Comité clandestin révolutionnaire indigène (CCRI). Les bases d’appui fournissent un soutien logistique, les miliciens sont des réservistes, les insurgés sont des volontaires permanents, la Comandancia General est dirigée par des sous-commandants, et le CCRI est l’instance politique supérieure. L’EZLN promeut également l’autonomie zapatiste dans les zones qu’elle contrôle, avec des communes autonomes regroupées par caracol.

Idéologie de l’EZLN :

L’EZLN prône la non-utilisation des armes depuis quelques années, mettant l’accent sur le changement social sans prendre le pouvoir. Ils critiquent le système capitaliste et adhèrent à l’idée de gouverner en obéissant au peuple. L’autonomie, plutôt que l’indépendance, est recherchée, avec une organisation autonome dans les domaines de la santé, de l’éducation et de la justice. Des éléments de la théologie de la libération sont présents, et l’EZLN refuse toute aide gouvernementale mexicaine. Les symboles chrétiens sont également fréquents.

Financement et Effectifs :

L’origine précise des fonds de l’EZLN reste inconnue, mais des sources suggèrent le trafic d’armes et des dons de sympathisants (« zapatouristes »). Les membres de l’EZLN compteraient plus de 5 000, avec des défilés réunissant entre 30 000 et 40 000 personnes en 2012.

Perceptions étrangères de l’EZLN :

Certains journalistes ont critiqué l’EZLN, qualifiant le sous-commandant Marcos de « Géniale Imposture », mais d’autres ont contesté ces critiques. La Jornada, un journal mexicain, relaie les communiqués de l’EZLN, tandis que des documents déclassifiés par la National Security Agency ont traité de l’EZLN et de la situation au Chiapas.

Conclusion : L’Armée zapatiste de libération nationale incarne une lutte multifacette pour l’autonomie indigène, les droits sociaux et la critique du système économique mondial. Depuis sa fondation, l’organisation a évolué, passant d’une guérilla armée à une force symbolique qui persiste dans sa quête d’équité sociale et de justice. Bien que le conflit au Chiapas ait connu des périodes de calme relatif, l’histoire de l’EZLN reste un rappel poignant des défis auxquels sont confrontées les populations marginalisées et de la nécessité de trouver des solutions inclusives pour surmonter ces défis.