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Autonomie : un anticolonialiste est indépendantiste, ou ne l’est pas.

— Par Yves-Léopold Monthieux —
Il ne suffit pas, comme dit l’autre, de sauter comme un cabri en criant « Autonomie ! Autonomie ! » pour se voir décerner le label d’ « anticolonialiste ». Un anticolonialiste est indépendantiste, ou ne l’est pas. Tandis qu’un autonomiste anticolonialiste, cela n’a pas de sens. D’ailleurs, on attend en vain que les adeptes de cette autonomie disent en deux phrases ce que recouvre, selon eux, ce mot. D’aucuns s’accrochent au fameux discours de campagne électorale, dit des « Trois voies et cinq libertés », qui s’acheva tristement dans la mort d’un individu. Or 15 ans plus tard, en 1993, comme pour dire que ce mot d’ordre n’était pas satisfaisant, le secrétaire général du PPM, Camille Darsières, annonça que son parti se donnait « huit mois pour définir le contenu de l’autonomie ». A ce sujet Raphaël Confiant écrira que “c’est incroyable de la part d’un parti qui réclame à cor et à cri l’autonomie depuis trente-trois ans” (Aimé Césaire, une traversée paradoxale du siècle). Vingt-cinq ans plus tard, rien n’a changé.
En réalité il n’est pas aisé de statufier l’autonomie qui est essentiellement une notion variable et qui, le long d’un curseur, peut avancer ou reculer à l’intérieur d’une même nation.

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CTM : le non respect de la règle est l’ennemi de la Démocratie

— Yves-Léopold Monthieux —
La présence récurrente d’éléments allogènes au cours des travaux de la CTM ne pouvait pas manquer de provoquer des dysfonctionnements. Avant 1983, la libre entrée dans l’hémicycle du conseil général n’était pas admise. Ce n’était pas une bonne pratique de la démocratie. L’opposition de l’époque estimait que la limitation des entrées au public relevait d’une décision autoritariste, contraire à la démocratie. Elle était dans son rôle.

Cependant, pour la majorité d’alors, il s’était agi d’une mesure de police interne prise pour tenir compte de l’exiguïté des locaux et la sécurité des personnes. La séparation incertaine dans la salle entre les élus et le public pouvait faire craindre des débordements. Par ailleurs, la mesure ne fut pas étrangère à la volonté d’éviter que la contestation politique, qui était parfois violente dans la rue, ne s’introduisît dans l’assemblée. A tort ou à raison, cette situation avait conduit le conseil à limiter le nombre des visiteurs à deux invités par élu, soit un peu moins de 100 citoyens.

A l’arrivée de la gauche, la nouvelle majorité et les manifestants étant du même bord politique, le calme s’installa aussi bien dans la rue que dans les hémicycles.

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Jean-Philippe Nilor vs Alfred Marie-Jeanne : les indépendantistes jouent la justice française.

—Par Yves-Léopold Monthieux —
On avait cru assister au dernier exploit d’Alfred Marie-Jeanne lorsqu’il s’était fait élire député dans la circonscription du Nord-Atlantique. Dans la foulée, il s’était fait remplacer par son ancien attaché parlementaire dans la circonscription du Sud qu’il avait quittée pour affronter son challenge. Mais, comme pour faire mentir le livre Alfred Marie-Jeanne la fin d’une époque, il a effectué le nouvel exploit de se faire élire pour 6 ans président de la Collectivité territoriale de Martinique. Cependant la fin de la saga Marie-Jeanne avait bel et bien commencé.
L’étoile du Président avait commencé à pâlir dès les élections municipales de 2014. En maintenant à Rivière-Pilote un candidat contre Raymond Théodose qui n’était autre qu’un de ses anciens adjoints et en soutenant le candidat opposé à l’indépendantiste Garcin Malsa, à Ste Anne, il avait créé suffisamment de mal dans le grand sud pour empêcher à Jean-Philippe Nilor de remporter la victoire aux municipales de Ste Luce. Il avait toujours su faire preuve de savoir-faire pour éliminer des camarades du parti qui l’embarrassaient. Ces mesures d’exclusion n’avaient jamais élevé la moindre contestation de la part des militants, si bien que les cris d’orfraie entendus ces jours-ci peuvent faire sourire.

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Les années BUMIDOM en Martinique

— Par Yves-Léopold Monthieux —

Parler aujourd’hui du BUMIDOM, cet organisme qui a encadré la migration de nombreux Antillais vers la métropole dans les années 1963 à 1981, c’est se risquer sur un terrain miné. Miné par l’idéologie qui veut imposer une lecture univoque, misérabiliste et anticolonialiste du destin de ces personnes de tous âges qui, pour beaucoup, se sont réalisées et même épanouies en métropole ; bien loin d’un exil imposé, voire d’une déportation subie.

Une interprétation plus objective et peu soucieuse de s’inscrire dans un roman nationaliste, soulignera au contraire que le moment du BUMIDOM a correspondu à une phase de développement pour la Martinique. Loin d’être saignée et de dépérir, la Martinique a vu sa population continuer de croître, ses organismes de formation se multiplier (du SMA à l‘Université) accroissant ainsi les compétences et les potentialités…. Bref, ces années furent une manière d’asseoir la départementalisation tant honnie par les idéologues bien installés dans leur statut.

Il est important d’établir un bilan sur le BUMIDOM au moment où la Martinique se trouve à un moment important de son histoire. En faisant preuve de complaisance envers les dérives identitaires, loin de la rendre attractive pour sa propre jeunesse, ce pays crée de la désaffection et de l’exil choisi.

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Un drapeau-emblème régional ou un drapeau national martiniquais ?

— Par Yves-Léopold Monthieux —

Ressurgit l’idée d’un drapeau martiniquais. Encore un sujet de préoccupation majeur comme la Martinique les aime. Mais ceux qui s’y adonnent ne sont pas si chimériques que cela. Une conception généralement admise milite pour la création d’un drapeau-emblème qui permette de distinguer la Martinique dans les cérémonies régionales. Lorsque les sportifs participent à des rencontres de la Caraïbe, il peut paraître curieux, aux yeux des Etats, que ce soit le drapeau français qui représente la Martinique. Surtout si la Guadeloupe et la Guyane sont présentes à ces évènements.

Il n’est pas difficile de convaincre les Martiniquais du rejet de l’emblème martiniquais aux 4 serpents. Ces animaux étant loin de bénéficier de la côte d’amour des Antillais, les détracteurs de cet insigne marchent sur du velours. Il est vrai que ces reptiles n’ont pas bonne presse dans l’animalerie martiniquaise, même si l’image de ces reptiles n’a pas toujours véhiculé que des références négatives. En renvoyant cet emblème à son origine coloniale, ces contre valeurs prennent une signification politique. Et pour ceux qui veulent sa suppression, l’objectif n’est pas de substituer un emblème à un autre, mais de remplacer un drapeau national par un autre drapeau national.

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Équipe de France : d’excellents joueurs mais pas d’équipe

— Yves-Léopold Monthieux —
Alors que les équipes qualifiées pour le deuxième tour de la Coupe du monde seront bientôt connues, osons faire quelques commentaires des Martiniquais, certes incomplètes, sur l’évènement et l’approche qu’en ont les Martiniquais. D’abord, le championnat d’Europe des clubs champions tend à devenir la plus importante sur le plan sportif que la Coupe d’Europe des nations et la Coupe du Monde. Les grands joueurs y son meilleurs. En effet, il y a en Europe cinq ou six clubs de niveau européen qui feraient plus que rivaliser avec les sélections de leurs nations respectives. Ils sont en Espagne, en Allemagne, en Italie et en Angleterre où, à de rares exceptions, les joueurs ne quittent pas leur pays. Les joueurs français qui, grâce à la qualité de ses écoles de formation, sont parmi les meilleurs du monde, sont dispersés hors de la France, incapable de les garder. Ils n’ont pas de club français à leur mesure, mais, convoqués en sélection, ils ne font pas équipe. En effet, l’Equipe de France est formée de joueurs issus d’une dizaine de clubs qui, à deux ou trois unités près, sont des clubs étrangers.

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Les années BUMIDOM en Martinique Volet 3

– Les faux prétextes du faux déclin des années BUMIDOM

 — Par Yves-Léopold Monthieux —

L’objectif n’est pas de défendre une institution qui prend inévitablement la couleur du pouvoir qui l’a engendrée. Que ce pouvoir soit regardé comme néocolonial ou qu’il se recommande du contraire, c’est avant tout des personnes qui sont visées. Lesquelles se trouvaient sans emploi à un moment crucial de leur vie et où il n’y a pas d’équivalent au futur RSA. Plutôt que du traumatisme du BUMIDOM au sujet duquel il est sage de laisser s’exprimer les personnes concernées, il m’a semblé préférable, renonçant au titre prévu du volet, de s’attarder sur la situation réelle de la Martinique dans les années 1960 – 1970, présentées alors comme une sombre décennie. On s’étonne simplement que les déclinistes d’alors soient muets sur la fuite de la jeunesse qui n’a pas confiance en l’avenir que les élus lui promettent.

Un traumatisme entretenu par des militants étrangers au BUMIDOM.

Certes, des postulants peuvent être confrontés à des difficultés inhérentes à l’institution. De plus, certains laissent parfois fructifier leurs mauvais penchants. Sur les 15 000, 45 000 ou 70 000 départs, selon l’historien, il est possible que se soient infiltrés quelques mauvais garçons.

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Oui, j’étais à Génipa…

— Par Ali Babar Kenjah —

Ce ne fut pas seulement un coup de tonnerre, mais un coup de maître. Le tonnerre est toujours précédé de l’éclair qui illumine les ténèbres. Ensuite vient le son. « Faites du bruit » invitent les MC pour réveiller l’assistance. Un coup de tonnerre donc… Secouée dans sa léthargie paresseuse, la société martiniquaise n’a pu ignorer le coup d’éclat mené par une centaine de jeunes martiniquais-e-s et des militants du mouvement panafricain. Les commentaires qui continuent de fuser de toutes parts attestent que les buts poursuivis ont été atteints : créer un rapport de force qui ira crescendo ; marquer les esprits et obliger chacun à choisir son camp ; annoncer le début d’une nouvelle ère dans notre rapport au système colonial : la fin de l’hypocrisie quant à la complicité coloniale objective d’une partie de la population martiniquaise et le début d’une contestation radicale de la pwofitasyon de quatre siècles. Dans les propos qui s’échangent sur les réseaux sociaux, beaucoup d’interrogations sont posées qui préludent à une intense période d’explication et de confrontations de point de vue.

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Les années BUMIDOM en Martinique. Volet 2

– La prise en otage du BUMIDOM par l’idéologie de rupture.

— Par Yves-Léopold Monthieux —

La prise en charge de l’ensemble des opérations, du recrutement des candidats, sur place, dans les îles, jusqu’à leurs premiers emplois sur le territoire métropolitain, en passant par leur transport, leur hébergement et leur formation, confère à l’institution une identité qui l’expose à toutes les stigmatisations.

On est en 1960. C’est l’époque de tous les possibles. Les usines se ferment et, en même temps, les Martiniquais ne veulent plus couper la canne. La décolonisation de l’Afrique s’achève. La guerre d’Algérie est perdue dans la foulée de celle de l’Indochine. La conférence des pays non alignés s’est tenue à Bandung. Fidel Castro s’installe. Les idées séparatrices font rage, les livres de Fanon et de Césaire sont dans toutes les mains. Ca phosphore grave chez les étudiants, au Quartier latin, ce qui fera dire à l’historien Edouard De Lépine que la nation martiniquaise est née sur la rive gauche de la Seine et non à Rive gauche Levassor. Y prend naissance la future bourgeoisie intellectuelle et ses directeurs de conscience.

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Les années BUMIDOM en Martinique. Volet 1

I – La Martinique, d’une terre d’immigration à une terre d’émigration

— Par Yves-Léopold Monthieux —

Nous sommes en 1900, un peu avant un peu après. Avec environ 150 000 habitants, la composition ethnique de la population post-esclavagiste est à peu près constituée. Les apports successifs qui l’ont formée sont en place. Ils viennent d’Europe (les colons), d’Afrique (les anciens esclaves puis les arrivées suivantes), d’Orient (les Indiens et les Chinois) et du Moyen-Orient (les Libanais et autres). Tandis que les Caraïbes qui survivent se perdent dans le métissage et le rapprochement des deux Indes. Comme toutes les Antilles, la Martinique est désormais une terre d’où l’on part bien plus qu’une destination. Née de l’immigration, la population martiniquaise participe à partir du début du 20ème siècle aux flux migratoires intra-caribéens et ceux des îles vers les continents. L’immigration saisonnière agricole déroge très peu à la règle selon laquelle la Martinique n’attire pas pour des raisons économiques mais pour son niveau de développement humain. Quoi qu’il en soit, toutes proportions gardées, il n’y a pas plus aujourd’hui de Martiniquais à Paris que de Cubains ou d’Haïtiens à Miami ou à New-York.

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Kemi SEBA à Génippa : la cause indépendentiste a-t-elle marqué des points?

— Par Yves-Léopold Monthieux —
A une commémoration de la mort de Frantz Fanon, deux personnalités étrangères avaient été invitées par des anticolonialistes martiniquais. J’avais observé alors que l’évènement n’avait concerné qu’une chapelle et que des militants connus de l’anticolonialisme en avaient été écartés. Je m’étais interrogé sur ce que pouvaient penser les filles de CHE GUEVARRA et de MALCOM X (je crois) à leur retour dans leurs pays respectifs, d’un pays à décoloniser, champion de consommation, comme la Martinique.
Ainsi que l’avait confié un journaliste russe invité en Martinique par un grand parti anticolonialiste, elles pourraient se dire que si tous les pays à décoloniser étaient comme la Martinique, elles signeraient tout de suite pour leur maintien en l’état. En effet, le visiteur russe (URSS) sortait de table. Iil venait de profiter d’agapes inattendues à Clairière de la part des dignitaires du parti. Après avoir vu ce qu’il avait vu du pays, cette débauche de table avait achevé de le déconcerter. Celui qui le reconduisait en fin d’après-midi à son hôtel crut devoir faire un crochet à Volga Plage pour lui montrer un peu de la misère du pays, histoire de remettre l’opinion de son hôte dans le bon sens.

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Une histoire à côté de l’histoire

— Par Yves-Léopold Monthieux —
La Martinique n’a pas de héros. Elle n’a ni Toussaint-Louverture ni Delgrès. C’est une frustration. Comment la compenser ? On ne compte pas le nombre de thèses rédigées sur la date du 22 mai 1848 où ne figure même pas le nom de l’esclave Romain, celui par qui ces incidents sont arrivés. Souvent, la mention « un esclave » suffit. C’est dire l’ambiguïté d’une date dont celui qui en est à l’origine, absent des places publiques alors qu’y figure Alain Plénel, ne parvient pas à trouver une vraie place dans l’histoire martiniquaise. Ainsi donc se développe une histoire martiniquaise en parallèle à l’histoire officielle.
La déférence au 22 mai 1848 est d’abord la réponse à une frustration, celle du manque d’histoire martiniquaise. C’est la correction de cette frustration, la conjuration de l’inconfort d’une abolition obtenue sans révolution, venue du colonisateur, comme l’explique Paul Vergès. Sauf que l’historien Armand Nicolas a recherché et retrouvé cette révolution. Celle-ci a eu lieu en Martinique, bizarrement après la signature de l’acte officiel, un mois plus tôt. Suivi par la meute politique, ce dirigeant du Parti communiste martiniquais écrit que les Martiniquais se sont libérés par leurs propres forces.

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De la Démocratie à la défaite morale en Martinique

— Par Yves-Léopold Monthieux —

Nous sommes encore en Démocratie, Dieu merci. Même s’il y a mieux dans la Caraïbe, selon certains qui n’y vont cependant que pour chasser le gibier ou se donner une cure de bonne conscience. Avec les yeux fixés sur la date de retour, bien entendu.

Nous avons toute liberté d’être autonomistes, indépendantistes ou attachés à la France. Et d’être tous ensembles, c’est notre coquetterie, des assimilationnistes pratiquants. C’est qu’à travers ces catégorisations douteuses se recrute une armée de faux-culs, avec généraux, officiers, sous-officiers et hommes de troupe.

Nous avons toute liberté et nous prenons toutes les libertés avec la démocratie. Avec le pouvoir et la justice confondus qui, devenus frileux en souvenir d’un passé douloureux, perdent la boussole à l’idée d’entendre les mots « pouvoir colonial » ou « justice coloniale ». Un « hou » dans le dos rappelant ce passé, et la démocratie est comme paralysée.

Nous avons toute liberté mais les affaires ne se jugent plus. Les dossiers se font et se défont, les affaires pointent le nez et s’évanouissent aussitôt : pas de scandale. Au juge « colonial », au préfet « gouverneur », pas touche les Martiniquais, s’il vous plaît !

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Les Affaires : une présomption générale d’irresponsabilité ne grandirait pas les Martiniquais.

— Par Yves-Léopold Monthieux —

Les suites données aux consultations populaires de janvier 2010 ont démontré qu’il n’est pas besoin d’obtenir l’accord du peuple pour modifier le parchemin institutionnel. Il suffit que le pouvoir le veuille, et que la presse et les juges se taisent. Les électeurs martiniquais avaient nettement exprimé leur attachement au département, c’était l’échec des élus évolutionnistes à convaincre le peuple. Nicolas Sarkozy est passé outre la volonté exprimée par les électeurs : le département a été supprimé.

S’affranchir des rigueurs du pouvoir régalien

Plus généralement, l’expérience des 20 dernières années prouve que le statut d’une collectivité peut changer de fait lorsque l’Etat renonce à exercer quelques-uns de ses pouvoirs. L’Etat a en effet compris que contrairement aux déclarations destinées à enfumer les Martiniquais («  la France conservera toujours le pouvoir régalien »), le véritable objectif des évolutionnistes est de s’affranchir des obligations envers ce pouvoir régalien. Le contrôle des actes administratifs des collectivités locales est l’une des prérogatives de l’Etat. Aussi, pour avoir renoncé à deux reprises à remplir cette mission, l’Etat s’est retrouvé complice des actes reprochés à l’ancien président de feue la Région Martinique.

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Lilyan Kesteloot n’est plus, elle était une spécialiste de Césaire

— Par Yves-Léopold Monthieux —

La presse martiniquaise a salué la mort du professeur d’origine belge, Lilyan Kesteloot, l’une des meilleures analystes de l’œuvre de Césaire. Cette circonstance me conduit à proposer, en vue de sa re-publication, la chronique que les travaux de cette universitaire ainsi que ceux de David Alliot m’avaient inspirée, en 2013, année où Aimé Césaire aurait eu 100 ans. Pour qui veut comprendre l’œuvre du nègre fondamental, la lecture des analyses de ces 2 spécialistes paraît indispensable.

Pourquoi nous ne connaissons pas Césaire ?

Antilla vient de publier des documents jusqu’alors inconnus en Martinique. L’hebdo est allé chercher à l’étranger, où l’on dit que Césaire est mieux connu que chez lui, deux des meilleurs spécialistes du poète et de l’homme politique : David Alliot, écrivain, et Lilyan Kesteloot, universitaire et chercheur. On le voit, les meilleurs spécialistes du poète martiniquais ne sont pas des Martiniquais. Ainsi, j’avais été frappé de constater, lors des obsèques de Césaire, que la conduite de la partie culturelle de la cérémonie fût confiée à des intellectuels de Guadeloupe, un pays que le défunt a peu connu.

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Léon Laurent Valère nous a quittés, il était un juste

— Par Yves-Léopold Monthieux —
C’était à la fin des années 1970, à Fort-de-France, près de la Savane, un vendredi soir de campagne électorale. Les briseurs de conférences venaient d’être empêchés de gravir l’escalier qui conduisait au micro de Maître Valère, candidat à une élection à Fort-de-France. Celui-ci s’exprimait au premier étage de la Rotonde. J’ai retenu la phrase qu’il avait alors prononcée : « nous ne nous arrêterons pas à ces trublions qui ne comprendront jamais que la politique est une affaire d’adultes ». Ses réactions aux coups qu’il recevait n’allaient pas au-delà des répliques de ce genre et du ton modéré de l’homme politique pour qui l’élégance d’esprit était l’arme préférée. Le lundi suivant, au matin, une nuée de tracts envahissait les rues de la ville avec, écrit en gros caractères : « Valère, le candidat de la violence ». C’est comme le voleur qui crie « au voleur ! ». Toute la campagne se poursuivit sur ce ton. Cette injustice et les suivantes, plus généralement le traitement politique dont il fut la victime, ont participé de mes premières indignations politiques.
J’avais apprécié le talent de l’avocat, l’élégance de l’intellectuel, le panache de celui qui osait affronter Césaire et, bien entendu, le discours percutant quoique modéré de l’homme politique.

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En Martinique, l’incorrection et l’obscénité sont devenues la règle du « politiquement correct »

— Par Yves-Léopold Monthieux —

Le comportement déplorable d’Alfred Marie-Jeanne à Ste Luce ne surprend que ceux qui le veulent bien. Sauf qu’arrivée en fin de piste, il a des difficultés à tenir la route. En effet, le parcours politique du « président des Martiniquais » a été jalonné d’outrances qui ont porté jusqu’aux qualités intrinsèques des personnes auxquels il en voulait. Les Pilotins l’ont expérimenté à leurs dépens, ou certains d’entre eux, leur ancien maire n’ayant pas craint de mettre le doigt y compris sur les handicaps physiques de ses opposants. Une famille connue de la commune en aurait fait les frais, dans un climat d’assouvissement des bas-instinct du peuple qui semble en redemander.
En effet, l’électorat étant friand des attaques portées en- dessous de la ceinture, on peut reprocher à l’homme « vertical » son penchant pour le populisme auquel il doit tout et de n’avoir jamais découragé la soif de vulgarité qu’il semble partager avec une partie de ce peuple. Cette vulgarité n’est-elle pas l’un des ressorts essentiels du populisme « marie-jeannien » qui l’a mené au plus haut niveau de la politique martiniquaise.

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Les servantes martiniquaises, fausses échappées belles du BUMIDOM

Par Yves-Léopold Monthieux —

On n’a pas cessé de gloser sur l’institution du BUMIDOM, créée en 1963 et supprimée en 1981, dans le cadre duquel une trentaine de milliers de jeunes ont quitté la Martinique pour la France. Le départ de ces jeunes était l’une des réponses apportées par l’État pour faire face au chômage grandissant des départements d’outre-mer. Selon ses contempteurs les plus hardis, l’institution ferait partie de l’arsenal de l’État français dont l’objectif serait de supprimer la part d’origine africaine de la population martiniquaise. La même accusation avait été portée contre le service militaire adapté (SMA) qui a été réhabilité depuis, y compris par les indépendantistes. Le BUMIDOM n’a pas connu le même retournement, de sorte que la stigmatisation voire l’opprobre continuent de frapper l’institution ainsi que ceux qui en ont bénéficié et leurs familles. Lesquels sont assignés à un silence gêné qui les maintient en dehors des débats.

Toutefois, on peut s’étonner que les jeunes gens qui ont résisté au départ ou qui en ont été dissuadés n’aient pas, comme leurs frères et sœurs « expatriés », trouvé de grand grèk ni de cinéaste pour décrire leur situation qui ne fut pas toujours enviable.

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TCSP : Une odeur de responsabilités renvoyées.

— Yves-Léopold Monthieux —
Pas grand monde n’avait compris la récente lettre de Serge Letchimy de décembre dernier annonçant une catastrophe si le démarrage du TSCP avait lieu, comme annoncé par Louis Boutrin en ce début d’année. Il avait surpris même parmi ses proches. On sait cependant que l’ancien président de la région qui avait été maire de Fort-de-France et président de la CACEM, et qui avait annoncé ce démarrage dès décembre 2015 (sans le croire lui-même, bien évidemment), bref, celui qui a tenu le projet par tous les bouts, est très certainement l’élu qui connaît le mieux le dossier – sans doute mieux que AMJ. Il avait eu la maîtrise de l’ensemble des éléments : le TCSP lui-même, la Cacem et la CFTU, et avait été à l’origine de la plupart des grandes décisions (l’appel à VINCI, les tracées des voies, les ouvrages d’art…).
N’y a-t-il pas un décalage entre la sévère mise en garde du député et l’apparent optimisme manifesté récemment par les actuels dirigeants de la CACEM et de la CFTU ? Cela ressemble, à s’y méprendre, à une prise de distance et de date de Serge Letchimy dans l’hypothèse d’un éventuel futur partage de responsabilités.

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Existe-t-il un génocide martiniquais ?

— Par Yves-Léopold Monthieux —

C’est la question qu’on peut se poser après le retentissement provoqué par la déclaration du député Aimé Césaire, un jour de novembre 1975, à l’assemblée nationale. Celui-ci craignait que la venue des H’mongs en Guyane, projetée par le gouvernement français, ne conduise à une manière de génocide qu’il a appelé « génocide par substitution ». Etrangement, il opposait un génocide qui n’en est pas un à des gens qui fuyaient ce qu’on peut considérer comme un vrai génocide, au Laos. Finalement, Césaire s’était trompé, mais il avait des circonstances atténuantes. En effet, alors que la population guyanaise était inférieure à 60 000 habitants, le nombre de migrants faisant l’objet du débat à l’assemblée avait été bien supérieur à celui qui a été finalement retenu (2 000 individus environ), et pouvait paraître exorbitant au député.

Comme je l’indiquais dans une tribune, le 24 novembre 2013, La Martinique, ce directeur de conscience, « en novembre 1975, le visionnaire Aimé Césaire s’était prononcé à l’assemblée nationale contre la venue des H’mongs en Guyane. C’est à cette occasion – et à cette seule occasion – qu’il avait prononcé officiellement sa fameuse expression « génocide par substitution ».

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Le P.P.M. remet le couvert de l’autonomie : est-ce une erreur politique ?

— Par Yves-Léopold Monthieux —

Lorsque, s’ouvrant à ses visiteurs du Robert, Edouard de Lépine regrettait que le mot autonomie ne fasse plus partie depuis 30 ans du vocabulaire du PPM, jusqu’à ne plus figurer dans les colonnes du Progressiste, il ne s’attendait certainement pas à ce qu’il resurgisse avec éclat lors du rassemblement du 12 décembre 2017 de Rivière-Blanche, à St Joseph. Avec éclat dès lors que cette résurrection s’accompagne de la proclamation par Serge Letchimy de la fin du moratoire. N’a-t-on pas ouvert la porte de Pandore, à l’occasion d’un évènement qui ressemblait davantage à une assemblée générale qu’à une convention ?

Le retour du PPM à ses fondamentaux

Les révélations sur l’autonomie de la Catalogne et la résurgence des idées séparatrices en Corse ont certainement aidé au rappel des fondamentaux du PPM d’avant le moratoire. Après que le président de la république a annoncé en Guyane que le sujet institutionnel pour les DOM était ouvert, ce qui n’est pas le cas pour la Bretagne ou le Pays Basque, le PPM a-t-il eu besoin d’indiquer au chef de l’Etat qu’il l’a entendu et qu’il est prêt à lui donner la main ?

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CTM : derrière la crise politique, la crise institutionnelle couve

— Par Yves-Léopold Monthieux —
La chose est sérieuse, c’est le président de l’exécutif, Alfred Marrie-Jeanne, lui-même, qui l’annonce : on s’acheminerait vers une crise politique à la CTM. Et son principal adversaire, Serge Letchimy, a repris la balle au bond. Curieusement, le point de départ ne se situerait pas quelque part entre les partis de l’entente du Gran sanblé pou ba péyi-a an chans (GSBPAC), mais au sein du Gran sanblé lui-même et d’abord dans le mitan du MIM, le parti dont le chef du conseil exécutif est le président-fondateur. Alfred Marie-Jeanne ouvre lui-même la guerre en désignant ses nouveaux ennemis politiques. Il prend aussitôt une attitude victimaire en usant d’un argument surprenant. Selon lui, des amis politiques, au sein de la CTM, oeuvreraient à sa condamnation à une peine de prison. Donc à sa disparition politique.
La nature des démocraties, de part leur mode de gestion par des partis politiques et des coalitions qu’elles suscitent, est de porter en elles des germes de crises politiques, lesquelles sont généralement absorbées par leurs institutions. Ce n’est que dans l’hypothèse où celles-ci se révèlent incapables de les contenir que les crises politiques se transforment en crises institutionnelles ou de régime.

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CTM : les appels au secours en direction du Préfet

— Par Yves-Léopold Monthieux —
La récente intervention de la police nationale pour dégager les locaux de la CTM occupés par des grévistes vient illustrer une réflexion que j’avais soumise aux lecteurs martiniquais en 2 ou 3 tribunes. Celles-ci m’avaient été inspirées par 2 déclarations de chefs de partis indépendantistes, le PALIMA et le MIM.
Alors que, autour de l’année 2000, les partis indépendantistes se ralliaient sans le dire à l’idée d’autonomie, Francis Carole déclarait qu’il n‘était pas possible d’envisager l’autonomie sans les pouvoirs de police et de justice. Ces propos avaient paru incohérents à certains. On pouvait également penser, de la part d’un indépendantiste, à une note de réserve destinée à atténuer son rétropédalage idéologique. Pour ma part, j’avais trouvé de la pertinence dans cette déclaration qui, par ailleurs, à l’aune de l’exemple de la région autonome de Catalogne, pouvait parfaitement se concevoir. En effet, la province autonome d’Espagne a sa propre police et sa propre justice.
La seconde déclaration, qui conforte la précédente, fut celle du président de la région Alfred Marie-Jeanne qui, alors que s’enlisait une grève sur le port, déclara à la télévision qu’il ne serait pas celui qui demanderait au préfet de donner de la troupe.

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La re-étatisation ou l’autonomie à rebours

— Yves-Léopold Monthieux —
Dans sa lettre adressée récemment au président de la république, où il avait dit son souci de voir disparaître toutes les dépendances, usant ainsi des mots de l’indépendantisme pour dire sa volonté d’autonomie, Serge Letchimy avait dit vouloir que soit mis de l’ordre dans le vocabulaire utilisé pour définir les rapports entre la France et ses territoires éloignées, la Martinique, en particulier. Plusieurs vocables avaient été cités, comme « outre-mer » ou « métropole » qu’il fallait éradiquer. Le député martiniquais s’inscrivait ainsi dans une conception nombriliste, sans trop s’attarder sur ce que pourrait penser d’autres territoires français d’outre-mer qui ont des préoccupations autres que de nature sémantique. La Martinique aurait donc vocation à se retrouver plutôt au centre qu’à la périphérie, d’où le caractère horripilant, aux yeux de certains, des expressions décriées. Métropole ? Oui, à la rigueur, mais c’est elle qui serait accrochée à la Martinique, pas le contraire. Et outre-mer n’aurait qu’un sens : vu de la Martinique.
On sait ce que cette tentation centraliste, qui a pu être partagée par d’autres partis nationalistes, coûte à la Martinique, notamment dans ses rapports avec la Guyane et la Guadeloupe, et même avec d’autres pays de la Caraïbe, qui, tous, n’y voient qu’arrogance à nos comportements.

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Le Monument aux Morts s’est-il transporté à la Joyau ?

— Par Yves-Léopold Monthieux —
Ainsi donc, en décidant de saluer l’illustre pensionnaire du cimetière de la Joyau, Aimé Césaire, plutôt que les morts pour la République, le Premier ministre paraît sceller un passage de symboles. C’est une décision que les Martiniquais afro-caribéens, qui ont bonne conscience de ce qu’ils doivent à Césaire, pourraient traduire comme la reconnaissance à cet homme, par l’Etat, de la qualité de Père de la nation. La reconnaissance de cette nation, elle-même ! Cette distinction est rare en démocratie et le geste aurait du sens, qui exprimerait un message fort de la France.
Quand Césaire cessera-t-il d’apparaître comme appartenant à un clan ?
Mais alors, toutes les autorités officielles de la collectivité devraient y être conviées, comme c’est le cas lorsque l’évènement se produit autour du Monument aux Morts : le président de la collectivité, le préfet, les anciens combattants, etc. Celui qui écrit ces lignes a eu l’occasion de déplorer le caractère exclusif des célébrations de mémoires martiniquaises. En effet, lorsqu’on célèbre Fanon, le Parti progressiste martiniquais n’est pas invité à la fête et lorsqu’on honore Césaire les choses se passent en famille.

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