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Habdaphaï et le Territoire des Migrants

Habdaphaï expose jusqu’au 23 juin à l’Espace d’art Contemporain T &T en Guadeloupe, la série Territoire.

— Par Matilde dos Santos Ferreira —
Comme toujours l’artiste s’intéresse à la transculturalité propre aux poussières d’îles caribéennes. Ce formidable creuset de races, langues, religions, a forgé des peuples multiculturels dont le langage véritable est encore en construction, car les parties désaxées de ce tout n’ont pas fini de s’ajuster et l’être syncrétique est toujours en gestation.

Cette gestation est l’objet de sa réflexion. Tantôt sur la forme de réminiscences, tantôt sur la forme d’une d’état des lieux- inventaire d’une perception forcément fragmentaire de la réalité. Dans cet espace fragmenté Habdaphaï confronte les strates successifs et concomitants de cultures diverses, irrémédiablement imbriquées et pourtant antagoniques, ignoreuses les unes des autres.

Lire aussi sur Madinin’Art : Habdaphaï

Le syncrétisme pictural
Son processus de création part toujours de cette fusion qui se perpetue dans le temps et dans l’espace, et où l’origine, le passage, le présent et l’avenir ne cessent de se melanger. C’est cela qui l’a appelé depuis le départ le syncrétisme pictural, qui se traduit par une pratique très matiérée, dans laquelle sur des fonds abstraits l’artiste trace de façon quasi obsessionnelle des signes qu’il a inventés/découverts le long des années.

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Basquiat l’éphémère, mais Basquiat pour l’éternité

— par Janine Bailly —

Le spectacle Samo, a tribut to Basquiat, proposé à Tropiques-Atrium, fut unique, en ce sens qu’il n’eut lieu qu’une seule fois, en ce sens surtout qu’il a donné à voir une création de forme particulièrement inventive et novatrice. Nécessaire travail de mémoire, étrange poème en prose, ode au peintre si tôt disparu, sorte d’opéra-rock, opéra-jazz tirant sur le hip-hop, tragi-comédie musicale aussi… et pourquoi pas ?

D’abord il y a le son. Qui troue seul l’obscurité de la salle. Qui s’intensifie alors même que la toile verticale, écran tendu en fond de scène, s’éclaire de blanc, de bleu, bientôt ciel à transpercer de violents coups de pinceaux. Le son, comme un sourd battement de cœur, annonciateur de toute vie, frémissement du fœtus au ventre maternel. Le son projeté au devant de lui, l’homme demi-nu  qui va entrer en scène. Et de l’indistinct naissent les paroles, voix off, posée et sûre, autoritaire presque dans ses accents. Des paroles qui peu à peu se font claires et disent de Basquiat l’identité, psalmodiée en une phrase déclarative: « Je suis américain… ».

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Le recueil « Une pierre est tombée, un homme est passé par là » de Faubert Bolivar

Reprise d’un texte publié initialement sur « Les vagabonds sans trève » avec des illustrations

Faire vœu intime d’ombre et d’amour

Cher tout le monde, femmes, hommes et tant d’autres, l’Histoire naturelle de Pline l’Ancien conte qu’à l’origine de la peinture, il y a l’amour de Callirrhoé, la fille de Butades, un potier de Sicyone ou de Corinthe. Éprise d’un jeune homme qui doit partir à l’étranger, Callirrhoé trace d’un trait de charbon le contour de la silhouette de l’amant qu’une lampe projette sur le mur. La peinture serait née du désir femme d’exorciser le manque, de conserver la trace de la présence aimée dans l’écriture des limites de l’ombre portée, autant dire la représentation du contour, non du corps, mais de la silhouette.

Il en va de même, j’imagine, pour le recueil de poésies de Faubert Bolivar intitulé Une pierre est tombée, un homme est passé par là, paru chez C3 Éditions, un éditeur haïtien :

Il y a l’ombre
Il y a la pluie qui tombe sur l’ombre
Il y a ton cœur qui bat dans l’ombre (p. 11)

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Les femmes beaucoup plus affectées par le suicide ?

— Par l’UFM —

Vendredi 13 janvier dernier, l’UFM était présente à la salle Camille Darsière de la CTM pour écouter et partager les savoirs et les pratiques des professionnels en matière de suicide.

Ce drame nous affecte de plus en plus. Il est la conséquence des souffrances trop longtemps refoulées pour certain-es, et trop souvent incomprises par un environnement indifférent voire hostile à ces fragilités .

Plus de 70 suicides par an, pire que le réseau routier en Martinique.

Les chiffres cités par le Pr Jehel sont éloquents : pour l’OMS (1), le suicide est une urgence mondiale avec 800 000 cas par jour. Tous les 10 jours on enregistre ici un suicide et tous les 3 jours, une tentative de suicide chez les adolescents.

Si les hommes, passant plus fréquemment l’acte (80 %), sont 2 fois plus suicidaires que les femmes, les facteurs de risques sont plus prégnants chez les femmes.

Outre les témoignages poignant exposés lors de cette conférence, on a pu constater que les femmes étaient sur-exposées aux suicides :

la violence, notamment conjugale, la dépression qui intègre un potentiel suicidogène, la dépendance augmentaient les taux de suicides.

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Mary Prince d’après The History of Mary Prince, récit autobiographique d’une esclave antillaise

— Par Michèle Bigot —

M.E.S. Alex Descas

avec Souria Adèle

Théâtre municipal de Fort-de France, 2/02/2017

Ce spectacle présenté en 2015 à l’Albatros, dans le cadre du festival d’Avignon par la compagnie Man Lala, présente une séquence de textes extraits d’un récit autobiographique. Il s’agit du premier témoignage publié en 1831 à Londres, sur les conditions de vie de son auteur, Mary Prince dans les colonies britanniques. Née esclave dans une colonie des Bermudes vers 1790, elle est vite séparée de ses parents lors d’une vente des esclaves de la maison. Ses premiers maîtres la traitent avec humanité; elle bénéficie même d’un enseignement rudimentaire, et elle est trop jeune pour comprendre sa condition d’esclave. Mais très vite elle fait l’apprentissage de l’affliction par la séparation brutale d’avec les siens dans son plus jeune âge. Ecoutons-la:

Je ne savais ni où j’allais, ni ce que mon nouveau maître ferait de moi, j’avais le coeur brisé de chagrin et mes pensées retournaient sans cesse vers ceux dont on m’avait si brusquement séparée. Je n’arrêtais pas de me dire: « Oh, ma mère!

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Parutions: nouveautés du 16 au 20 janvier 2017

Cognitis enim pilatorum caesorumque funeribus nemo deinde ad has stationes appulit navem, sed ut Scironis praerupta letalia declinantes litoribus Cypriis contigui navigabant, quae Isauriae scopulis sunt controversa.

Huic Arabia est conserta, ex alio latere Nabataeis contigua; opima varietate conmerciorum castrisque oppleta validis et castellis, quae ad repellendos gentium vicinarum excursus sollicitudo pervigil veterum per oportunos saltus erexit et cautos. haec quoque civitates habet inter oppida quaedam ingentes Bostram et Gerasam atque Philadelphiam murorum firmitate cautissimas. hanc provinciae inposito nomine rectoreque adtributo obtemperare legibus nostris Traianus conpulit imperator incolarum tumore saepe contunso cum glorioso marte Mediam urgeret et Parthos.

Post hoc impie perpetratum quod in aliis quoque iam timebatur, tamquam licentia crudelitati indulta per suspicionum nebulas aestimati quidam noxii damnabantur. quorum pars necati, alii puniti bonorum multatione actique laribus suis extorres nullo sibi relicto praeter querelas et lacrimas, stipe conlaticia victitabant, et civili iustoque imperio ad voluntatem converso cruentam, claudebantur opulentae domus et clarae.

Tantum autem cuique tribuendum, primum quantum ipse efficere possis, deinde etiam quantum ille quem diligas atque adiuves, sustinere. Non enim neque tu possis, quamvis excellas, omnes tuos ad honores amplissimos perducere, ut Scipio P.

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Viktor Lazlo ; « Love me tender »

— Par Selim Lander —

Avant le festival des Petites Formes qui commence dès mardi, la fin de la semaine dernière a fait s’enchaîner deux spectacles « martiniquais » de grande qualité : jazz d’abord avec Viktor Lazlo ; danse ensuite avec Jean-Hugues Mirédin et la cie Art&fact.

Viktor Lazlo, chanteuse d’origine martiniquaise qui poursuit une brillante carrière internationale chante le jazz tel qu’on l’aime. Si cela avait un sens, on dirait que le meilleur concert du Martinique Jazz Festival 2016 a eu lieu hors festival, le 13 janvier 2017, et que c’était le récital de Viktor Lazlo. Pourquoi apprécions-nous tant cette interprète ? Pas tellement pour sa voix, belle mais pas exceptionnelle, mais parce qu’elle a l’humilité de faire entendre la quintessence du jazz sans aucune esbroufe. On peut déjà en juger par les instruments qui l’accompagnent : piano, guitare et basse. Oui, vous avez bien lu ! Pas de batterie[1], alors qu’elle fut omniprésente pendant le festival, avec même certains batteurs leaders.

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Nouveautés : parutions début janvier 2017

Cognitis enim pilatorum caesorumque funeribus nemo deinde ad has stationes appulit navem, sed ut Scironis praerupta letalia declinantes litoribus Cypriis contigui navigabant, quae Isauriae scopulis sunt controversa.

Huic Arabia est conserta, ex alio latere Nabataeis contigua; opima varietate conmerciorum castrisque oppleta validis et castellis, quae ad repellendos gentium vicinarum excursus sollicitudo pervigil veterum per oportunos saltus erexit et cautos. haec quoque civitates habet inter oppida quaedam ingentes Bostram et Gerasam atque Philadelphiam murorum firmitate cautissimas. hanc provinciae inposito nomine rectoreque adtributo obtemperare legibus nostris Traianus conpulit imperator incolarum tumore saepe contunso cum glorioso marte Mediam urgeret et Parthos.

Post hoc impie perpetratum quod in aliis quoque iam timebatur, tamquam licentia crudelitati indulta per suspicionum nebulas aestimati quidam noxii damnabantur. quorum pars necati, alii puniti bonorum multatione actique laribus suis extorres nullo sibi relicto praeter querelas et lacrimas, stipe conlaticia victitabant, et civili iustoque imperio ad voluntatem converso cruentam, claudebantur opulentae domus et clarae

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Notre mobilisation et les raisons de notre combat pour les mémoires de l’esclavage

— par Loïc Céry, pour l’Institut du Tout-Monde —

Le 13 janvier 2017, M. Serge Romana (président de l’association CM98) a entamé une grève de la faim devant le Sénat, à la suite du retrait de l’article 20A du projet de loi sur l’Égalité réelle outre mer décidé par la commission des lois. Nous soutenons ce retrait. Les raisons de notre mobilisation, de notre vigilance, de notre combat qui est loin de s’achever.

  Le 9 octobre, l’Institut du Tout-Monde lançait une pétition, « Stop au bricolage législatif sur la mémoire des l’esclavage », qui a recueilli plus de 460 signatures à ce jour. Citoyens, intellectuels, universitaires de renom, écrivains et artistes se sont mobilisés contre ce tournant imposé à tous, et fatal à tous. En novembre dernier, nous vous faisions part d’un rapport d’étape concernant cette pétition : 

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Archéologie des relations Canada-Haïti

Saint-Domingue et Nouvelle-France

ARCHÉOLOGIE DES RELATIONS CANADA-HAÏTI1

— Par Lyonel Icart —

Nouvelle-France et Saint-Domingue, ainsi se nommaient les deux possessions françaises que l’on appelle aujourd’hui Québec et Haïti. Les historiens canadiens qui se sont penchés sur l’histoire de la Nouvelle-France ont développé leurs études dans une optique nationaliste, souvent québécoise, en cantonnant cette histoire à l’intérieur des frontières actuelles, nous dit Jacques Mathieu2. Quant à l’historiographie haïtienne, elle ne s’est jamais préoccupée des relations entre Saint-Domingue et la Nouvelle-France. La forte immigration haïtienne au Québec, aujourd’hui, invite à regarder cette présence dans une optique plus large. On a souvent fait remonter cette présence aux années 1960; mais si cette immigration a commencé à cette date, les contacts entre ces deux pays  sont plus anciens que cela, et bien avant le vingtième siècle les relations étaient régulières et constantes.

1. Le commerce triangulaire

La Nouvelle-France ne se limitait pas à la vallée du Saint-Laurent. Le premier empire colonial français, qui a disparu en 17633, s’étirait sur un espace gigantesque. Du golfe du Saint-Laurent au golfe du Mexique, des Appalaches aux montagnes rocheuses, il comprenait aussi la Louisiane.

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Paterson

Jeudi 19 janvier 2017 en VO à Madiana

de Jim Jarmusch
Avec Adam Driver, Golshifteh Farahani, Rizwan Manji
Genres Drame, Comédie
Nationalité Américain
Synopsis :
Paterson vit à Paterson, New Jersey, cette ville des poètes, de William Carlos Williams à Allen Ginsberg, aujourd’hui en décrépitude. Chauffeur de bus d’une trentaine d’années, il mène une vie réglée aux côtés de Laura, qui multiplie projets et expériences avec enthousiasme et de Marvin, bouledogue anglais. Chaque jour, Paterson écrit des poèmes sur un carnet secret qui ne le quitte pas…

La presse en parle :

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Parutions : nouveautés du 28 novembre au 7 décembre 2016

Littératures et arts postcoloniaux dans l’émergence civilisationnelle caribéenne

Alexandre Alaric, Rodolphe Solbiac
Cet ouvrage examine le dynamisme des sociétés caribéennes postcoloniales par le biais de leurs différentes productions artistiques. Ces contributions révèlent un ensemble de productions littéraires, musicales, plastiques et performatives, de la région et de ses diasporas au XXème siècle. Les travaux passent en revue les démarches créatives et les conceptualisations qui contribuent à la construction du sujet caribéen et accompagnent son émancipation dans les champs littéraires anglophones, francophones et hispanophones. Ils examinent aussi les formes musicales populaires du reggae, du compass et du zouk.Broché(19 euros, 180 p., décembre 2016) EAN : 9782343107707
EAN PDF : 9782140024818 

 … Voir les nouveautés du 28 novembre au 07 décembre 2016…

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L’esclavage : quelle influence sur notre poétique ?

— Par Patrick Chamoiseau —

J’ai choisi de vous parler de l’influence de l’esclavage sur notre poétique.

D’abord, deux considérations liminaires.

La première sera pour remercier mon ami le professeur Aimé Charles-Nicolas de l’hommage qu’il rend aujourd’hui à la littérature. Demander à un écrivain « d’ouvrir » en quelque sorte un colloque scientifique, c’est, au-delà de ma personne, reconnaître au même niveau que les sciences de l’homme, la perception poétique des choses, et l’importance des poètes, romanciers, musiciens et artistes qui, dans les Amériques, ont questionné les réalités humaines de nos pays. L’intuition poétique, l’exploration romanesque, les divinations enthousiasmantes des plasticiens, des photographes et des musiciens, ont bien souvent précédé — pour ne pas dire « inauguré » — les investigations pragmatiques des sciences de l’homme et de l’esprit. C’est donc pour souscrire à la tenue scientifique de ce colloque que je vais convoquer, pour leur laisser ma place, deux poètes essentiels à la compréhension des mondes créoles américains : Aimé Césaire, Edouard Glissant. Les poètes sont l’âme de leurs peuples, parler d’eux, c’est parler de la lumière la plus accomplie de ces peuples tout entiers.

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« Lear… conte à rebours » : au jeu du qui est qui et qui dit quoi?

— Par Roland Sabra —

lear_conte_a_rebours-22008. Bernard Bloch monte Le « Ciel est vide », un texte d‘Alain Foix. La pièce convoque deux drames shakespeariens, celui de la jalousie avec Othello et celui du ressentiment avec Shylock. Deux comédiens dans les loges d’un théâtre bavardent en attendant de monter sur scène. Cinéma, télévision et théâtre, non seulement comme comédiens mais aussi comme metteurs en scène, leur expérience, plus que trentenaire, et leurs talents sont avérés, attestés. Est-ce Shylock ? Est-ce Othello ? On ne sait. mais au détour de la conversation qui porte naturellement sur Shakespeare une phrase est lancée : « J’aimerai bien faire un Roi Lear !» Moi aussi dit l’autre ! Ces deux-là sont des conteurs. Shylock, Hassane Kassi Kouyaté, héritier d’un longue famille de griots qu’on ne présente plus et Shylock, Philippe Dormoy, grand récitant, chanteur, passionné de musique, respecté par ses pairs, viennent de conclure un pacte qui les mènera tout d’abord aux pays des « sacs à paroles » comme le disait joliment Cheikh Hamidou Kane, le grand griot moderne du Sénégal. De cette rencontre va naître une hybridation entre conte et théâtre qui loin d’être une fusion, un amalgame, un salmigondis, va au contraire à partir d’identités conservées et affirmées, questionner l’un et l’autre au cœur même de leur fondements.

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Chamoiseau, l’œuvre au monde

Compte rendu critique de : Patrick Chamoiseau, La matière de l’absence (Seuil, 2016)

chamoiseau_micro—Par Loïc Céry (ÉdouardGlissant.fr) —

La légende dit que Jean Paulhan, le « pape de l’édition française » des années vingt aux années soixante, avait coutume en recevant ses invités à son hôtel particulier non loin des Arènes de Lutèce, d’expliquer à qui voulait l’entendre, la signification des deux imposantes piles de livres qui trônaient à l’entrée de l’intimidante demeure, comme des Himalayas inaccessibles à l’entendement. Les ouvrages provenant des envois de presse, tous neufs et souvent dédicacés par leurs auteurs, étaient rangés en rangs serrés, dans un équilibre instable et pourtant viable, mais dont la précarité elle-même intriguait les visiteurs, compte tenu de la hauteur impressionnante des deux colonnes. Les livres attendaient l’attention si salvatrice du démiurge, qui pouvait d’un coup vous propulser au firmament des gloires littéraires de Paris ou de sa seule indifférence vous laisser dans la moiteur de la confidentialité. Dans cet hôtel particulier qui a vu passer tout ce que la littérature française comptait de talents confirmés et d’espoirs en germe, les ouvrages reçus, innombrables et envahissants, n’échappaient jamais à cette sélection première, ce tri soigneusement pensé par le maître.

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Corinne Mencé-Caster :  » j’ai fait de mon mieux… »

mence_casterLettre ouverte de Corinne Mencé-Caster (ex-Présidente de l’Université des Antilles au 1er septembre 2016)
Il n’est pas toujours simple de dire au revoir, ni même de prendre la décision de s’interrompre, d’arrêter. C’est pourtant ce que j’ai pris le parti de faire, à l’aube de cette rentrée universitaire 2016-2017, qui aurait été ma quatrième en tant que présidente de l’Université. Cette décision, je l’ai mûrie et réfléchie, et je vous l’annonce, certaine d’avoir vraiment accompli tout ce qu’il était en mon pouvoir d’accomplir, dans le temps et les conditions qui m’étaient impartis.
J’estime, en effet, avoir fait ce que je pouvais faire, compte tenu des circonstances qui ont entouré ma mandature, et sur lesquelles je crois inutile de revenir ici.
Les statuts de l’université étant votés à l’unanimité, il me semble aujourd’hui important de permettre à l’établissement de se mettre en conformité avec eux, ce qui suppose la tenue d’élections renouvelant son conseil d’administration et son conseil académique le plus rapidement possible. La nouvelle équipe de gouvernance, issue de ces élections, pourra alors négocier avec le Ministère, un contrat pour les cinq ans conforme à sa vision et à son projet, pour les cinq ans à venir, et le mettre en oeuvre pendant la durée de son mandat.

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Case-Pilote : le « Tous Créoles » est en marche

— Par Yves-Léopold Monthieux —
abel_&_cainLe moment approche où les Martiniquais se lasseront de la chronique permanente qui met en scène les rapports entre les hommes politiques et les békés. Il est de règle pour les partis politiques de gauche d’afficher leur détestation de ces Martiniquais, lesquels sont porteurs, selon eux, de la triple tare de descendants d’esclavagistes, de patrons capitalistes et de Blancs pays. Il y a peu de martiniquais qui, à l’un de ces titres ou aux 3 à la fois, ne pourraient pas trouver matière à poursuivre cette aversion qui instille le discours de la société martiniquaise. Sauf que tout le monde se fatigue et qu’au moment où chaque citoyen tient en permanence à la main un appareil photo enregistreur, il devient impossible de camoufler les contradictions. Les instruments qui ont trahi le vieil homme sont les mêmes qui trahissent ceux qui le condamnent. Il ne suffira plus de posséder en douce, honteusement, son « bon béké » ou son « bon métro » tout en stipendiant la gente des békés et celle des métropolitains. Halte à l’hypocrisie : les hommes publics se verront de plus en plus obligés de parler vrai.

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USA : Le vieux racisme tue toujours

— Par Gilbert Pago, (président du Comité martiniquais « Sauvons Abu Jamal ») , Max Rustal, Jacqueline Tally
lesha_evansAutant il est bien établi que le concept de « races humaines » est disqualifié par les progrès de la génétique, autant on peut observer que sur le terrain, les impalpables chromosomes s’effacent devant les couleurs de la peau, les cultures et les mœurs, et invariablement les intérêts.
Loin d’être le seul théâtre des drames découlant de la racialisation des rapports humains, les USA en constituent cependant un terrain d’observation aussi immense que particulier : génocide amérindien, traite des Noirs et esclavage, guerre d’indépendance, guerre de sécession, abolition suivie d’un siècle de ségrégation raciale dûment codifiée, dur combat inachevé pour l’égalité formelle. Et puis tout récemment, le grand paradoxe de l’accession d’un Afro-étasunien à la magistrature suprême de ce pays toujours majoritairement blanc ; événement impensable dans bien d’autres républiques présumées au-dessus de tout soupçon, et qui fit naître bien des espoirs.

Un président afro-descendant, et pourtant…
Pourtant, l’élection de Barack Hussein Obama à la présidence de la république du pays actuellement le plus puissant et le plus riche (en termes de PIB) de la planète, n’a pas généré longtemps des illusions.

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Un Batman dans ta tête

— Par Michèle Bigot —

De David Léon

Mise en scène : Hélène Soulié

Avec Clément Bertani

Festival d’Avignon, off 2016, Artéphile, 7-30/07

On n’en sort pas indemne. David Léon n’en finit pas d’explorer les dérangements de l’esprit. Dans un monologue traversé par nombre de paroles étrangères, Matthieu, un adolescent schizophrène nous dévoile le cheminement qui le conduit de l’enfance d’un garçon mal aimé au délire violent de l’adolescent éperdu. Son seul compagnon d’errance est une figure de Batman, qui lui tient lieu d’alter ego, d’inspirateur et de mentor. Batman représente pour lui la figure idéale du pouvoir et du dépassement de soi.

Loin des criailleries de celle « qui ne voulait pas être une maman », parfois accompagné de son double, Matthieu s’isole dans son délire. Le texte du monologue suit le mouvement ; passant de la narration aux paroles rapportées, il se présente comme un patchwork de voix, qui résonnent dans l’esprit de Matthieu. Chaos d’idées, de sensations, de souvenirs, sa tête est la caisse de résonnance des émotions qu’il n’a pas su contrôler. Alors Matthieu se réfugie derrière sa console, à l’abri de la fureur du monde.

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Mon Festival d’Avignon 2016

— Par Dominique Daeschler—

avignon-2016Festival d’Avignon 2016

De ce que nous avons vu on retiendra l’omniprésence de la vidéo (avec plus ou moins de bonheur), une volonté de jouer à cour et à jardin plutôt qu’au centre du plateau (réservé souvent à l’effet rassembleur et au message), l’alternance de dialogues et de récits, la présence de musiciens sur scène, l’importance de scénographies impliquant fortement les dramaturgies, un goût pour des textes allemands valorisant la nature, le pouvoir, l’excès avec une quasi omniprésence des questionnements actuels sur populisme et nationalisme.

A tout seigneur tout honneur : le IN

6 A.M. How to disappear completely

Au Théâtre-opéra, le Blitztheatregroup, collectif de création grec monte une adaptation d’une élégie du romantique allemand Hölderlin en neuf temps traduite en neuf tableaux. Jusqu’au tableau final, le spectacle se déroule dans la pénombre pour mieux occulter la logique de la réalité matérielle et fuir le déroulement d’une histoire. Volonté d’entrer dans un univers poétique sans chercher à comprendre, de faire du verbe une parole qui suscite l’émotion et réveille nos imaginaires : nous voilà dans une zone mal définie tantôt forêt tantôt usine où l’on entend une voix sans que les acteurs se parlent entre eux.

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« Buffet à vif » : une chorégraphie de la démolition

—Par Michèle Bigot —

buffet_a_vifBuffet à vif

Marguerite Bordat, Raphaël Cottin, Pierre Meunier

Théâtre de la Bastille, 15/ 06-1/07 2016

Pierre Meunier est un habitué du Théâtre de la Bastille. On a pu y voir dans les années passées Le Tas (2002) Sexamor (2010) Du fond des gorges (2011), et La Bobine de Ruhmkorff (2013). On connaît son univers si poétique dans son obsession de matérialité. Pierre Meunier se heurte à la matière, ou plutôt il s’y confronte. Il récidivera la saison prochaine (toujours en collaboration avec Marguerite Bordat) pour présenter Forbidden di sporgersi (d’après Algorithme éponyme de Babouillec).

Déjà en 2003 avec Le Tas, la confrontation tournait à l’acharnement : P. Meunier fait sa fête (dans tous les sens du mot) au « tas ». Il n’a pas trop d’une masse pour s’attaquer à un tas. Un tas de quoi ? peu importe : un tas ! qu’il s’agit d’entamer, voire de pulvériser si c’est possible. On verra bien ce que peut l’homme seul face aux lois de la matière. En tout cas détruire le tas, c’est le mettre à mal, mais c’est aussi l’explorer.

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Breleur total !

Arpenteur des ombres et servant de l’éclat

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— Par Patrick Chamoiseau —

Dans la vie d’un artiste, une exposition n’est jamais quelque chose d’anodin. Ce n’est pas seulement une circonstance où il se montre à son public, et partage le degré de questionnement auquel il est parvenu. C’est surtout l’instant où, d’une certaine manière, l’œuvre s’éloigne du créateur et commence à vivre, loin de lui, une vie autonome, dans ce que Saint John Perse appelait un grand « verger d’éclairs ».

Avec nos amis, nous avons toujours essayé de ritualiser le moment du décrochage. Il est pour nous bien plus important que celui du vernissage. Après l’exposition, le cordon ombilical achève de se rompre, l’œuvre se retrouve pour ainsi dire « lâchée » comme on le ferait d’un animal sauvage. Elle commence non pas une vie décidée par l’artiste, mais véritablement un marronnage dans la matière du monde, tout comme une extension imprévisible dans les consciences et les imaginaires qu’elle a pu confronter. Il est précieux pour un créateur de voir le sillage de ce qu’il a créé. Quand l’œuvre est considérable, ce sillage est tissé d’effervescences, de déclenchements, de germinations, d’émergences de toutes sortes.

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Le siècle Antillais.

— Par Jérôme Cancan —
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« Message à ma jeunesse libre »
Faire entrer les Antilles dans l’Histoire.

De nombreuses réactions s’expriment quant au mal-être social de l’Homme Antillais. A l’aube d’un siècle qui prévoit des changements significatifs dans le mode de vie du genre humain, des voix s’élèvent, des hommes se dressent, l’homme antillais n’est pas perdu.
Où donc trouver la force de soutenir un propos plein d’espoir concernant l’avenir de nos régions ?

Il faut donc s’expliquer, mais la pensée est capricieuse : répondez à une de ses interrogations elle vous en trouvera vingt autres, et pas des moindres. N’étouffons pas l’affaire, pas de fuite possible : nous proposons ici une réponse générale aux questionnements humains, qui trouvera néanmoins son ancrage dans les problématiques antillaises, tout en proposant des solutions pratiques nécessaires à la transformation de nos modes de vie. Pas d’étonnement donc face à la variété de thème pouvant être abordés ici.

Où commencer ? C’est le grand questionnement pour une réponse si vaste. Et comment assurer à celui qui débute ici sa lecture qu’il trouvera plus bas son contentement à coup sûr ?

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« 1848 : Romyo et Julie » : un théâtre populaire face à la critique

— Par Jean-Durosier Desrivières —

critiqueLe champ de la critique d’art étant quasiment désertique, déserté et aléatoire dans le paysage martiniquais, il y a forcément, pour certains, une tentation de polarisation et de monopolisation du discours critique sur un art tel le théâtre. Le discours critique, ici, étant aussi essentiellement de presse, avec cette spécificité naturelle d’être pressée, risque d’être assez néfaste pour le développement de l’art dramatique en Martinique. Et si l’on n’y prend pas bien garde, ce discours polarisé et monopolisé, risque aussi d’influencer pernicieusement, de façon latente ou non, les directives des politiques culturelles de ce pays.

Seulement deux compte-rendu critiques relatifs à la dernière représentation théâtrale d’Hervé Deluge, « 1848 : Romyo et Julie », sont à considérer et nous laisserons le lecteur pour quitte. Il s’agit de deux textes parus sur le site de Madinin’art : « “Romyo et Julie” : un symptôme de l’état du théâtre martiniquais », publié le 15 avril 2016, signé Roland Sabra et « Roméo et Julie : du théâtre populaire », publié le 17 avril 2016, signé Selim Lander. Le duo que constituent nos deux auteurs, qui sont les seuls à écrire régulièrement sur le théâtre en Martinique, fonctionne le plus souvent comme un drôle de jeu d’équilibre et d’équilibristes, frisant parfois une certaine perversion : l’un à charge, l’autre au bémol.

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Les gens ordinaires, les vulgaires et les voyous, les extraordinaires ou les inaccoutumés

— Par Pierre Pastel —

gens_extra« Quand le luscinia et des millions,
voire des milliards de prétentieux comme lui,
à travers le monde, dérapent par réflexes conditionnés,
leurs trilles ne sauraient être des calmants antidouleur. »

 

Les gens ordinaires

L’écrasante majorité de nos contemporains sont des gens ordinaires.

Ils pensent pour eux-mêmes, pour leurs intérêts. Ils boivent, mangent, rient, pleurent. Ils disent la vérité, ils sont sincères, ils mentent. Ils cherchent à vivre, à bien vivre. Ils savent qu’ils ne sont pas seuls sur l’échiquier de la vie, ils essaient de faire attention aux autres, ni plus ni moins. Autant que faire se peut, ils évitent de ne pas trop incommoder le monde autour d’eux, ils respectent ou ne respectent pas les lois. Ils se marient, divorcent, restent d’éternels célibataires. Ils sont bons ici, méchants là, égoïstes par ici, altruistes par-là. Ils sont courageux, lâches, volontaires. Ils couvrent une vie affective équilibrée, débridée, ou terne. Ils sont cultivés, incultes, glandeurs, resquilleurs, fainéants, travailleurs, voleurs, protecteurs, consciencieux. Respectueux, impertinents, honnêtes, riches, moins riches, pauvres ils le sont aussi. Ils sont aigris, ils s’amusent, ils sont dépressifs, joyeux, sereins, discrets, taquins, jaloux, manipulateurs, ils le sont encore… Bref, il faudrait toute une vie pour décrire les gens ordinaires, disons qu’ils sont comme nous, vous et moi, des êtres communs.

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