Une maison de poupée : un thriller hitchockien

15, 16 & 17 novembre 2018 à 19h 30 au T.A.C.

— Par Christian Antourel —

« La vraie femme est un produit artificiel que la civilisation fabrique. Ses prétendus instincts de coquetterie ; de docilité, lui sont insufflés comme à l’homme l’orgueil phallique , il n’accepte pas toujours sa vocation virile ;elle a de bonnes raisons pour accepter moins docilement encore celle qui lui est assignée » Ecrit Simone de Beauvoir en 1949. Ibsen écrit « une maison de poupée » en 1879.

Henrik Ibsen ,(1838-1906) est un grand auteur norvégien. Son théâtre, miroir brisé de la société bourgeoise, fait que ses pièces s’appuient sur une réflexion philosophique et sociale, elle dénoncent les défauts de la société en particulier ses aspects conformistes et hypocrites.
C’est l’histoire d’un couple Nora et Torvald qui explose en trois actes en direct. Montrer cette pièce maintenant permet d’explorer l’intimité de deux êtres qui ne sont jamais partis en quête de leur propre vérité et de repenser le cadre que Nora fait exploser un siècle et demi après
la Nora d’Ibsen. Où en est- on aujourd’hui de ces paradigmes masculin/féminin qui malgré une époque en progrès concernant l’égalité des droits, restent violemment héritiers d’un profond déséquilibre et d’un malaise socio- culturel latent ?C’est Noël, le sapin est décoré, la maison de poupée où vit sous l’apparence du bonheur le couple Nora et Torvald se prépare à la fête. Torvald est un avocat respectable, admiré pour la fermeté de son caractère et pour la rectitude de sa vie. Il aime profondément sa femme qui représente pour lui le modèle féminin traditionnel. 

Il l’infantilise et parle à sa place

Nora est une femme d’intérieur comme on dit, son unique engagement vise le bonheur et le bien-être de sa famille, ignorant tout des lois et des règles en dehors de son foyer. Elle possède cependant un secret qu’elle dévoile à une vielle amie de passage ; il y a quelques années elle a imité la signature de son vieux père mourant, empruntant ainsi une grosse somme d’argent en cachette de tous. Cette somme servit à l’époque à sauver son mari d’une grave maladie. Un acte dont Nora est fière au point qu’elle néglige le caractère illégal de sa contrefaçon . Mais un employé de son mari menacé de renvoi et qui fut au courant de cet usage de faux menace Nora de tout révéler à son mari. Elle se battra en vain pour préserver son secret mais Torvald finira par l’apprendre et réagira avec dégoût et colère. Alors que l’époux s’énerve , la juge folle et veux lui interdire de prendre son envol, Nora désormais n’a plus rien à perdre ; « je suis d’abord et avant tout un être humain et je veux réfléchir par moi-même » Nora réalisera à quel point sa conception morale est opposée à celle de son mari. Une violente altercation et ce profond désaccord provoqueront pour elle l’éveil d’une conscience individuelle et un désir de liberté qui fera sauter un à un les murs de sa maison bien rangée. Elle a fait le choix radical de quitter sa famille de s’émanciper du carcan de son univers . Dans une lucidité douloureuse elle conclut : « je veux savoir qui a raison, de moi ou de la société ». Le Théâtre Aimé Césaire espace très intime par sa taille et sa hauteur de plafond offre aux spectateurs un perchoir privilégié comme pour un regard fureteur sur ce huis clos haletant alors que la maison de poupée glisse peu a peu dans un climat particulièrement anxiogène. Nora devient véritablement femme car « on ne nait pas femme, on le devient »

En pratique !

Une maison de poupée
De Henrik Ibsen
Au théâtre Aimé Césaire
Les 15,16, et 17 Novembre 2018. 19h30

Adaptation et mise en scène
Philippe Person.
Traduction
Régis Boyer

Avec
Florence Le Corre
Nathalie Lucas
Philippe Calvaro
Philippe Perso

Lumières
Alexandre Dujardin
Décor
Vincent Blot.

Réservation : 05 96 59 43 29.

Christian Antourel
Texte paru dans Le Mag France-Antilles