Travailler au Québec: « Pour un succès, combien d’échecs? »

—Par papanguezwazo (Express Yourself)—

quebecFormations ruineuses, bénévolat quasi obligatoire… Loin des publicités qui vendent la Belle province comme un eldorado professionnel, notre contributeur Papanguezwazo livre un témoignage désabusé.

À tous ceux qui ont une activité professionnelle dans leur pays et envisagent de migrer vers le Québec… attention au piège! La tentation est forte quand on entend le chant des sirènes, les campagnes de racolage menées par le MICC (Ministère de l’Immigration et des Communautés culturelles) pour inciter les travailleurs qualifiés du monde entier à venir s’installer dans la « Belle province ».

On ne vous promet rien, mais on ne cesse de vous rappeler que l’on est bien, au Québec: la qualité de vie y est meilleure qu’ailleurs, le coût de la vie l’un des plus bas du monde à Montréal, le système éducatif l’un des meilleurs du monde (rien que ça!). De plus, ne vient pas qui veut: seuls les élus, détenteurs d’un certificat de sélection délivré par le Québec, pourront s’enorgueillir d’avoir été choisis.

La sélection par les bureaucrates ministériels est de plus raisonnée. Chiffres à l’appui sur les perspectives d’évolution du marché de l’emploi, on vous démontrera que vous faites une bonne affaire. C’est l’Amérique, l’un de ces lieux où tous les rêves sont possibles. Vous comprendrez vite que vos chances d’emploi sont réelles et sérieuses, surtout dans un secteur d’activité en demande, le déclin démographique du Québec aidant.

Avant de venir, faites des économies, ne débarquez pas au Québec sans un sous, vous dira-t-on. Quelle que soit la société, il vous faut un minimum d’argent pour repartir de zéro. Mais prévoyez juste de quoi survivre avec votre famille pendant trois mois, le temps pour vous de mettre le pied à l’étrier…

« Vos premiers contacts vont vous ramener sur le plancher des vaches  »

Vos premiers contacts avec les centres communautaires n’auront pourtant d’autre ambition que de vous ramener rapidement sur le plancher des vaches. Après vous avoir fait croire pendant plusieurs mois qu’on avait besoin de gens de votre profil, on nuancera cette assertion. Il faut se faire pragmatique. Parce que voyez-vous, ici c’est l’Amérique, il vous faudra l’apprendre. Ici nous sommes différents, nous avons nos coutumes, notre façon de parler.

En tant que travailleur qualifié retenu pour vos compétences, et l’excellence de votre profil, vous vous la pétez un peu, peut-être. En tout cas, votre surprise sera grande lorsque vous vous entendrez dire, au détour d’un compliment (ici c’est comme ça, on ne dit pas les choses franchement, la révolution tranquille, c’est le fameux consensus québécois) qu’au Québec, nous n’avons pas pour habitude d’embaucher des gens sans diplôme québécois.

Et que les expériences que vous avez pu vous faire ailleurs n’intéressent pas, seule compte l’expérience québécoise. À entendre vos hôtes, seul le contact avec ce peuple élu, vivant à proximité du rétrécissement du Saint-Laurent, à la hauteur du cap Diamant, a le pouvoir de vous apporter l’expérience unique qui va transcender vos aptitudes au travail.

Evidemment, vous ne pouvez pas arriver ici en pays conquis, on ne peut pas vous mettre au dessus des autochtones! Quel pays accepterait de faire passer les personnes issues de l’immigration avant ses citoyens? Ici, on aime les gens qui savent se retrousser les manches. C’est courant, un médecin qui dans ces débuts travaille comme éboueur, le pharmacien qui fait chauffeur de taxi, l’ingénieur concierge, etc.

Alors ne soyez pas trop pressé: il y a des gens qui veulent tout, tout de suite. C’est comme cette chirurgienne algérienne que j’ai rencontrée et qui se demandait où était passé son génie depuis plus de cinq ans. Ou cette Péruvienne titulaire d’un doctorat dans son pays et d’une maîtrise de comptabilité obtenue en France, qui se retrouve à refaire des études secondaires depuis quatre ans. Les études universitaires, pour le moment, elle y a renoncé en raison du coût.

Et oui, il nous faut maintenant mettre la cerise sur le gâteau: au Québec, on aime ceux qui se forment. On n’avait pas insisté la-dessus dans les pubs du MICC, mais si vous voulez, paraît-il, augmenter vos chances d’obtenir un jour la fameuse première expérience québécoise, retournez vous former. Et quand vous prendrez conscience de cette vérité, j’espère pour vous que vous n’aurez pas entamé vos économies de manière excessive.

, publié le 17/06/2013 à 14:26, mis à jour à 16:34

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