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Mister Co : « Femme, enjeu sociétal »

— Par Scarlett Jesus —

« Femme, enjeu sociétal », tel est le titre de l’exposition de peinture que présente Corentin Faye, sous son nom d’artiste Mister Co, à la galerie L’art s’en mêle, au Gosier.

Un tel titre pose la question de la place de la femme dans la société (en général).  Une telle question renvoie, d’une part, à celle de l’égalité entre les hommes et les femmes, et d’autre part à s’interroger sur les domaines dans lesquels l’activité de la femme peut s’exercer.

Comment un artiste, homme et sénégalais vivant en Guadeloupe, peut-il se positionner ? Et, tout d’abord, comment en est-il venu à se poser une telle question ?

Corentin Faye est né en Basse Casamance, à Bignona. Par ailleurs musicien, il peint professionnellement depuis 2000, ayant installé son atelier sur l’île de Gorée, dans l’ancienne résidence du Gouverneur de la Colonie française. En 2018, à Puteaux au Petit Club Africain, son exposition s’intitule déjà « Gorée la métisse ». L’année suivante nous le retrouvons en Guadeloupe, à Saint-Claude, sa femme y travaillant. Il expose en duo, avec Gabriel Baptiste, à Bouillante, en février-mars 2021.

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Alice Demoly : Images mentales d’une artiste discrète.

— Par Scarlett JESUS, critique d’art —

En exposant en solo, en ce début d’année 2022, à l’Hôtel Arawak du Gosier, Alice Demoly fait fi des nombreux « handicaps » qu’elle ne peut ignorer…

En premier lieu, celui d’être femme. Et pis encore d’être mère de trois enfants. Juste retour des choses, notre époque s’étant engagée dans la promotion des femmes artistes, ce handicap est en passe de s’inverser, devenant désormais un plus.

Celui, ensuite, d’être une artiste autodidacte et de ne peindre qu’en marge d’une activité professionnelle très prenante. Nombre d’artistes reconnus n’ont-ils pas été des autodidactes, échappant de la sorte à un formatage d’école ? Et n’est-ce pas son activité professionnelle qui, justement, va lui permettre d’être totalement indépendante ?

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« J’ai rencontré Dieu sur Facebook… », texte et m.e.s. d’Ahmed Madani

Mercredi 20 Janvier 19h30 – Salle Frantz Fanon

Par Scarlett Jesus
Après F(l)ammes, programmé à l’Artchipel en 2018, J’ai rencontré Dieu sur Facebook vient de permettre au public guadeloupéen de retrouver l’univers d’Ahmed Madani. L’univers de cet auteur, d’origine algérienne et né en 1952, reste le même et concerne à nouveau les jeunes femmes, immigrées et d’origine musulmanes, installées en France. Mais aussi les filles de celles-ci entrant en conflit avec leurs mères.

La mise en scène de cette relation mère/fille va constituer près de la moitié de la pièce. La mère, Salima, élève seule Nina, sa fille de 15 ans. La tendre complicité mère-fille se trouve perturbée par un double deuil, Salima perdant sa mère et Nina sa meilleure amie. A partir de là rien n’est plus comme avant et Nina va s’opposer à sa mère, refusant de poursuivre ses cours de violon, dans un premier temps, puis revendiquant un prénom musulman… Que s’est-il passé ?

C’est la deuxième partie de la pièce qui va nous éclairer et en donner les causes. Des causes dont l’auteur cherchera à comprendre et expliciter les origines psychologiques.

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Abel Techer et le lapin blanc.

— Par Scarlett Jesus —

« Qui es-tu lorsque personne ne te regarde ? » C’était le titre que la Galerie Maëlle, à Paris, avait choisi de donner, en janvier 2017, à une exposition collective consacrée à la présentation de cinq jeunes artistes, dont le réunionnais Abel Techer.
Un titre prenant la forme, alors, d’un questionnement. Pour cette exposition personnelle que la Galerie Maëlle lui consacre, du 6 février au 20 mars 2020, le titre est tout aussi direct : « I call you from the crossroads ». Mais un glissement significatif s’est opéré.On constate, en fait,le passage d’une interrogation faite par une personne extérieure s’adressant à l’artiste, à une prise de parole de celui-ci à la première personne. Le défi qui consistait à prendre la liberté de révéler son MOI, en toute franchise et sans masque, évoquait déjà la volonté de se mettre à nu comme Jean-Jacques Rousseau l’avait fait dans ses Confessions. Or, cette nouvelle exposition ajoute au « Qui es-tu ? » initial, la référence symbolique du lieu dans lequel se trouve l’artiste « from the crossroads ».

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« Les gens de l’or », ouvrage de Baj-Michèle Strobel

Une véritable « pépite » !

— Par Scarlett Jésus —

J’ai rencontré Baj en 1994 et fut l’une des toutes premières à lire les Gens de l’or, publié alors, en 1998, par les éditions Ibis Rouge. Cette lecture m’avait laissé perplexe : avais-je affaire à un ouvrage d’ethnologie ou à un journal de voyage ?

Quelques vingt ans plus tard, à la relecture de l’ouvrage paru aujourd’hui aux éditions Plon, dans la collection « Terre humaine », c’est paradoxalement ce questionnement relatif au genre qui me séduit. L’auteure, une ethnologue se dit « libre de toute attache académique », refusant « les codes convenus de l’académisme néo ou ancien ». Et c’est cette liberté prise à l’égard d’une démarche scientifique qui lui fait préférer une approche poétique pour parvenir à la connaissance de ces « gens ». Consciente de ce marronnage hors des sentiers battus et répondant aux critiques qui ont pu lui être faites, elle cite à l’appui de l’Avant-Propos de 1998, une phrase d’Edouard Glissant, tirée de L’intention poétique, dans laquelle ce dernier dit haïr l’ethnographie « chaque fois que s’achevant ailleurs, elle ne fertilise pas le vœu dramatique de la relation ».

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« Une de perdue…Une de perdue ? », Quand la danse contemporaine questionne la notion de perte.

— Par Scarlett Jesus —

Dans le cadre d’une tournée organisée par le CEDAC (Collectif des Espaces de Diffusion Artistique et Culturelle) du 12 au 17 novembre 2019, les Guadeloupéens étaient invités à découvrir, au Mémorial Acte ce dimanche 17 novembre, ce que la Martinique propose en matière de danse contemporaine.
« Une de perdue… Une de perdue ? » est d’abord un duo qu’interprète un couple de danseurs : David Milôme et Chantal Thine. Directeur, depuis 1995, d’une compagnie de danse hip-hop reconnue, la MD Compagny, David Milôme vient tout juste d’intégrer le Conseil International de la Danse, le CID, où sont représentés 155 pays. La réputation de Chantal Thine qui, après avoir exercé au Canada, enseigne désormais les danses afro-brésiliennes en Martinique, n’est plus à faire.
Le projet de réunir ces deux danseurs est le fait d’une chorégraphe martiniquaise de renom, elle-même danseuse, Josiane Anturel. Après avoir enseigné la moderne et l’afro-jazz au Centre de danse du Quebec, Josiane Antourel exerce au sein de la compagnie T.R.A.C.K. qui fait dialoguer écriture corporelle et théâtrale. Elle se réclame d’une « esthétique ethnique contemporaine » qui revisite les gestes de la danse traditionnelle.

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Pour sa 7ème édition, Cap Excellence en Théâtre a pris son envol.

— Par Scarlett Jesus —

Sans se départir véritablement des orientations qui furent celles, il y a près de vingt ans, de Téyat Zabym, il semble bien que cette 7ème édition de Cap excellence en Théâtre affiche son ambition. Celle de se positionner sur le plan international, tout en maintenant le cap d’une thématique inchangée : creuser, afficher et défendre « nos identités théâtrales ». Un « envol » que suggère l’oiseau multicolore choisi pour figurer sur l’affiche, et qui déploie ses ailes.

Mais quelles sont-elles ces « identités théâtrales » ? Une lecture attentive du programme permet-elle d’en saisir la spécificité ?

Deux spectacles, respectivement à l’ouverture et à la clôture du festival, donnés tous deux gratuitement dans ce tout nouveau complexe socio-culturel Félix Proto des Abymes (pas encore inauguré officiellement), en dessinent les contours. D’un côté, un « Chaltouné a lespwa », que propose Textes en Paroles, avec le concours d’Esther Myrtil (deux figures majeures du théâtre en Guadeloupe), mêle la poésie des mots à la gestuelle des corps. De l’autre, un panel de cinq humoristes est proposé aux familles et à un public populaire, moins familiarisé avec le « théâtre d’auteur ».

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« Nouveaux Regards Film Festival  2019»,

Quand les femmes font leur cinéma en Guadeloupe

—Par Scarlett Jesus —
Décembre vient de faire la démonstration, avec le Prix Nobel alternatif attribué à Maryse Condé, qu’en Guadeloupe la femme peut désormais investir le champ littéraire et y occuper une place de premier rang.
Dans le domaine cinématographique, les femmes sont tout aussi combattantes en Guadeloupe, et plus particulièrement dans celui de l’organisation de festivals de cinéma. En témoigne le FEMI, créé en 1996 à l’initiative d’une association « Images et cultures du monde » par deux femmes, et dont on a pu voir la 24éme édition en 2018. En témoigne aussi le « Terra Festival », festival de films documentaires sur l’environnement et le développement durable, qu’une équipe féminine porte courageusement à bout de bras et qui fêtera prochainement sa 15ème édition. Deux autres festivals ont, ont vu plus récemment le jour, une fois de plus à l’initiative de femmes. Ce fut, en octobre dernier avec « Mondes en vues », la 3ème édition du Festival des Droits de l’Homme (FIFDH) consacré à des documentaires. Enfin, en ce mois de mars symboliquement consacré à la femme, vient de se dérouler sur 5 jours, du 13 au 17 mars, le festival « Nouveaux regard », lui aussi à sa 3ème édition.

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L’impossible procès

—Par Scarlett Jesus —
Février est, pour certains une période où, par l’intermédiaire du Carnaval, l’on se doit de tout oublier.
Mais d’autres, au contraire, ont choisi de faire de février est un mois de recueillement, consacré à la mémoire des événements tragiques de 1967 et au procès des 18 Guadeloupéens qui s’ensuivit, en février-mars 1968, pour « atteinte à l’intégrité du territoire français ».
Car de février 1968 à février 2009, date à laquelle la population de la Guadeloupe se trouvera à nouveau engagée dans un mouvement social de 44 jours, ce mois marque la résistance d’un peuple qui n’a de cesse de se battre pour sa liberté.
« L’Impossible procès », est une pièce de théâtre écrite par Guy Lafages. Le texte emprunte de larges extraits aux audiences du procès rapportées par l’ouvrage de référence « Le procès des Guadeloupéens ». Initialement écrite en vue de réaliser un film documenté, la compagnie du Théâtre de l’air nouveau a demandé à Luc Saint-Eloy de mettre en scène cette pièce. De fait, les spectateurs se voient plongés dans un huis clos reproduisant la Cour de sureté de l’État, au sein de laquelle une quinzaine d’acteurs vont interpréter près de 60 personnages différents.

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Michèle Arretche, Saint-John Perse et les Ratières : habiter poétiquement le monde.

— Par Scarlett Jésus —

Qu’a à voir le prosaïsme des « ratières » avec la poésie de Saint-John Perse ?

Toutefois le crabe, au même titre que les blattes (les « ravets »), se faufile parfois dans l’univers poétique de Saint-John Perse. Comme une réminiscence du vert paradis de son enfance et comme un intrus. Connoté négativement, il est présenté comme un assaillant dévastateur de l’« habitation ». En témoigne cet extrait de Vents (II, 4) : « Les migrations de crabes sur la terre, l’écume aux lèvres et la clé haute, prennent par travers des vieilles Plantations côtières enclouées pour l’hiver comme des batteries de Fédéraux ».

La chair de ce crabe de terre, très appréciée en Guadeloupe tout autant qu’en Martinique, a donné lieu à une pratique de capture qui s’opère à l’aide d’une boite en bois, munie d’une porte amovible. Un mécanisme très simple, actionné par une ficelle et une grosse pierre, permet à la porte de se refermer sur le crabe, qui se retrouve alors pris comme un rat. D’où le nom de « ratières » que les Martiniquais donnent à ce piège.

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« Circulez ! », ou comment une stratégie d’évitement permet de résister à l’autorité.

— Par Scralett Jesus —

Jeudi 11 mai, à la salle Tarer de Pointe-à-Pitre, la Martinique était à l’honneur avec « Wopso », une pièce de Marius Gottin, mise en scène par José Exelis et interprétée par deux acteurs de talents Emile Pelty et Charly Larandy. Fulbert et Auguste ne se connaissent pas. Ils sont vieux et terriblement seuls, traînant avec leurs valises un passé qui leur remonte à la gorge, tels des hoquets. Wopso !
Vendredi 12 mai, au Centre culturel de Sonis, aux Abymes, c’est au tour de la Guadeloupe de présenter une pièce de José Jernidier, mise également en scène par José Exelis, et interprétée par José et Joël Jernidier. Là encore nous assistons à la relation improbable qui va se nouer entre deux personnages que le hasard va faire se rencontrer. Un inspecteur de police et Choffroy, un pauvre bougre mal dégrossi, présent aux côtés de son père lors de l’accident de la route qui a coûté la vie à ce dernier.
Il y a un an, le 7 mai 2016, dans le cadre de la 6ème édition de Cap Excellence en Théâtre, la pièce avait fait l’objet d’une lecture publique en créole au Mémorial ACTe.

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Ouverture de Cap Excellence Théâtre en Guadeloupe

ou quand la scène théâtrale tend un miroir à la société.

— Par Scarlett Jesus —
Succédant à ce qui fut le Festival des Abymes, la 6ème édition de Cap Excellence théâtre, organisée à l’initiative de la communauté des trois communes Abymes, Baie-Mahaut et Pointe-à-Pitre, propose du 09 au 14 mai 2017 un programme autour du thème « La quête du mieux-être ».
L’observation de la programmation semble révélatrice de certains choix.
On constate, en premier lieu, une diversité liée à l’origine différente des compagnies (de Guadeloupe, de Martinique, de France et de Côte d’Ivoire). Une autre diversité est celle des lieux de représentations, situés dans différentes salles et établissements scolaires des trois communes. Ajoutons à cela une diversité évidente de formes, le festival proposant des représentations, des lectures, une déambulation et de nombreux ateliers pédagogiques.
Parallèlement à cette diversité symbolisant une volonté d’ouverture, un autre choix est manifeste : celui de la transmission et d’un ancrage. Ce n’est pas un hasard si le parrain de cette 6ème édition est cette année Harry Kancel, auquel Cap Excellence Théâtre a voulu rendre hommage.

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Quand Médée-Kali trouve place au Memorial Acte

— Par Scarlett Jesus —
La pièce de Laurent Gaudé, « Médé-Kali » est, à l’évidence, d’actualité. La preuve en est qu’elle a été mise en scène presque simultanément, en février 2016, au Théâtre de la mer (Joliette Minoterie), à Marseille, ainsi que dans le 93, à Montreuil-sous-Bois. Montée par la Cie Kamma crée par Karine Pédurand, elle a été jouée en Guyane, début novembre, puis à L’Archipel de Basse-Terre, en Guadeloupe les 20 et 21 janvier 2017, avant d’être présentée au public martiniquais le 24 janvier, dans le cadre du Festival des Petites formes, à L’Atrium. La voici revenue en Guadeloupe, ce vendredi 27 janvier, mais dans un lieu hautement emblématique cette fois, le Mémorial Acte. Nul doute que la réception d’une telle pièce dans ce « Centre caribéen d’expressions et de mémoire de la traite et de l’esclavage », ne peut que se charger d’une coloration particulière. « Médée-Kali » peut-elle apporter une quelconque contribution à un vivre-ensemble harmonieux, permettant que s’opère, à travers l’horreur que suscite cette histoire tragique, la catharsis des sentiments de haine et de vengeance engendrés par l’histoire douloureuse de l’esclavage ?

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Denis Ninine , quésaco « ECHO » ?

Exposition à la médiathèque du Lamentin, Guadeloupe, du 13 au 28 mai 2016.

—Par Scarlett Jesus —
Le contexte artistique :
Ils sont artistes et jeunes. Ils sont passés par une Ecole d’Art, sont bourrés de talent et s’inscrivent, au sein de la jeune génération de plasticiens de Guadeloupe, dans un courant qualifié d’urban pop.
« Ils » ? Ce sont Ronald Cyrille, Samuel Gelas et Denis Ninine, lequel expose pour la première fois à la médiathèque du Lamentin, en ce joli mois de mai, alors que la rue se fait l’écho de revendications sociales. Tous trois vivent résolument dans un présent qu’ils jugent chaotique, rêvant d’un futur qui reste à inventer.
Publié sur le site d’AICA Caraïbe du Sud le 5 mai 2015, Dominique Brebion, depuis la Martinique, écrivait, dans un article intitulé « La Caraïbe à l’heure du digital » : « La création plastique emprunte désormais deux voies inédites, celle du Street art et celle de l’art digital. » Matilde dos Santos ne disait d’ailleurs pas autre chose, deux mois auparavant, lors d’une conférence du CEREAP donnée le 17 mars 2015, même si elle privilégiait les seuls arts de la rue : « Le graffiti et le street art sont les deux versants majeurs d’un art urbain en pleine expansion ».

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François Piquet : possibles réparations

— Par Scarlett JESUS —

La pratique d’un artiste est forcément ancrée sur le lieu dans lequel il vit et travaille. François Piquet a fait sienne la culture de la Guadeloupe dont il nourrit ses œuvres, creusant, au fil des ans, une approche dont témoignent les titres de séries, telles que  « Les Archipels du moi » ou encore « Jean de souche ». Une immersion au sein de laquelle il conserve une posture originale, à la fois distancée et critique par rapport à l’illustration convenue de revendications identitaires.

Ainsi les œuvres de François Piquet que nous avons eu l’occasion de pouvoir admirer, s’interrogent et nous interrogent sur les mentalités de ses concitoyens pour en pointer -avec compassion- les blessures, tout autant qu’il en expose -avec humour- les contradictions et les failles. S’il s’engage, loin de tout dogmatisme sectaire, dans la défense de causes communes, il pense que l’art doit permettre de surmonter les drames du passé en laissant entrevoir les contours d’une utopie qu’il veut croire possible.

Dans « les Archipels du moi », en 2012, François Piquet soumettait au questionnement le processus de créolisation qui structure les mentalités fragmentées du Guadeloupéen, comme celles de tout Caribéen.

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« Valeska and You »

Une performance de Tanztheater par Annabel Guérédrat

—Par Scarlett Jesus —
gueredrat_vlaeska-1«Quand je faisais du théâtre, je regrettais la danse, et quand je dansais, le théâtre me manquait. Le conflit a duré jusqu’à ce que l’idée me vienne de réunir les deux.
Je voulais danser des personnages ».
Valeska GERT, Je suis une sorcière, kaléidoscope d’une vie dansée, 1968,. CND, 2004.

« Valeska and You » est une performance, présentée presque simultanément en novembre 2015, à L’Atrium en Martinique le 17, et à l’Artchipel en Guadeloupe le 28 comme relevant de la « danse contemporaine ». Un spectacle choc où l’engagement d’une danseuse allemande juive des « années folles », rejoint celui d’une performeuse martiniquaise. Mais aussi un spectacle provocant qui interpelle frontalement le public, « You », le soumettant ensuite, pendant plus d’une heure, à la question lancinante  « Quelqu’un a-t-il quelque chose à dire ?». Question que l’on finit par comprendre : « Quelqu’un a-t-il quelque chose à redire? ».

Dans cette performance Annabel GUEREDRAT est une chorégraphe qui explore les rencontres possibles entre différentes disciplines artistiques. S’octroyant une totale liberté dans une démarche artistique mettant en scène des catégories sociales discriminées,  femmes noires, prostituées, stripteaseuses, voyous, femmes folles ou « sorcières », ainsi que se présentait celle dont elle emprunte l’identité, Valeska GERT.

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« 360°, Passeport Caraïbe »

Pratiques artistiques émergentes dans une Caraïbe qui s’inscrit dans la contemporanéité.

— Par Scarlett JESUS * —

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On peut se positionner en défenseur des cultures traditionnelles menacées de disparition.
Parallèlement, on peut, avec autant de conviction, s’engager dans la promotion de créations artistiques contemporaines, délibérément en rupture avec une culture perçue comme étrangère.
Dans les deux cas, ne s’agit-il pas de promouvoir sur le devant de la scène des pratiques témoignant de l’inventivité de catégories sociales marginalisées dont elles expriment les modes de vie et façons de penser ?
Ainsi, les « arts de la rue », en banlieue comme dans les quartiers défavorisés de Guadeloupe, permettent à des jeunes, en rupture  avec une société dans laquelle ils ne se reconnaissent pas, de s’exprimer à travers le hip-hop, la break danse ou encore le slam.
Une façon pour eux de tout chambouler en faisant leur « cirque ».
L’association guadeloupéenne Métis’Gwa collabore avec le Plus petit cirque du monde pour faire se rencontrer dix jeunes artistes, issus d’horizons divers de la Caraïbe, à l’occasion d’un projet en deux volets : un spectacle, en avril, à L’Artchipel, et divers interventions dans des lieux improbables tels que des maisons de quartiers, cours d’immeubles ou rues.

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« Le Galet bleu », Une histoire d’aujourd’hui pour des enfants d’Outremer.

—Par Scarlett Jésus —

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Après « Les longues nattes de Poética », sorti fin 2013, les éditions Jasor, en Guadeloupe, viennent de publier un nouvel album de jeunesse, « Le Galet Bleu ». Un livre précieux à feuilleter et raconter aux petits enfants sans modération.

L’ouvrage, qui a d’ailleurs été primé pour la seconde édition du concours « Livre jeunesse en Caraïbe » organisé par le Conseil Général de Guadeloupe, a été réalisé par Laure Cuirassier, pour le texte, et par Viva Cuirassier, sa fille, pour les illustrations. Une maman et sa fille… comme dans l’histoire à découvrir.

Cartonné le livre adopte le format paysage. Son titre, « Le Galet bleu », inscrit en lettres d’or, nous invite à une plongée dans l’univers merveilleux des « contes bleus ». Au Petit Chaperon rouge et à sa galette, l’auteur oppose malicieusement l’histoire d’une fillette et de son galet. Un Gros Chien Méchant remplace le Grand Méchant Loup. Une histoire destinée à aider les enfants à surmonter certaines peurs bleues… Une histoire pour frissonner et pour rêver.

Formes et couleurs :

Les éléments figuratifs de cette couverture, stylisés et aux tonalités chaudes, nous introduisent dans le même temps dans un monde de formes et de couleurs.

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Michel Rovelas, élu artiste de l’année 2014 par Gens de la Caraïbe

— par Scarlett JESUS, critique d’art, membre de l’Aica Caraïbe du Sud—

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Exposition à L’ARTCHIPEL de Basse-Terre, du 15 juin au 6 juillet 2013.(*)

« Un peuple qui ne sait plus interpréter ses propres signes, ses propres
mythes, ses propres symboles, devient étranger à lui-même, perd foi en son destin. »
Jean-Marie Adiaffi, La Carte d’identité, Hatier, Paris, 1980.
Michel Rovelas expose, avec la régularité qu’il s’est lui-même imposée, tous les deux ans.
Sa dernière exposition remonte donc à 2013 et il nous faudra patienter une année de plus pour la prochaine, qui ne manquera pas de nous étonner, comme ce fut le cas pour celle-ci. Et comme l’étaient les précédentes.
« Les anciens toujours existant et bien vivants »… Nous comprenons sans mal que la formule s’applique aux ancêtres des Guadeloupéens, esclaves. Toutefois ce titre ne pourrait-il tout autant s’appliquer à l’artiste lui-même ?
Non pas que les Guadeloupéens oublient Michel Rovelas, toujours sollicité par de jeunes artistes avides de conseils, et attendu par un public d’amateurs d’art qui lui est fidèle. Mais parce que, bien vivant, il continue à être très présent sur la scène artistique où se bouscule la jeune génération, produisant des œuvres à la fois novatrices et cohérentes avec ce qu’a toujours été sa démarche d’artiste, des œuvres qui se situent au-delà des modes.

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Myriam et Marlène, deux drôles d’oiseaux, à L’Artchipel et au Moule, en Guadeloupe,

Principe de précaution rime avec ... action

— par Scarlett JESUS, critique d’art.—

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Photo Fred Lagnau

 

Face à une menace grave pesant sur la santé et l’environnement, et  sans même attendre d’avoir toutes les données scientifiques,  le « principe de précaution »,  exprimé à Rio en 1992, est une incitation à réagir dans l’urgence.
Pour nous en convaincre, deux danseuses ont fait le choix de s’engager physiquement dans un corps à corps avec le sujet. Quitte à y laisser quelques plumes… à terre. Et, sachant que le rire est le meilleur remède pour exorciser nos peurs, elles vont donner à leur  performance un ton décalé, parfaitement ajusté avec leur propos discordant, le burlesque.
Myriam Soulanges, lauréate 2010 du Concours des jeunes chorégraphes « Danse arc-en-ciel », est guadeloupéenne et vient de la culture hip-hop. Marlène Myrtil est martiniquaise et a été formée à la danse contemporaine. Inséparables, elles constituent un duo qui n’est pas sans évoquer, sur le mode féminin, un couple bien connu du cinéma burlesque, Laurel et Hardy. L’une est grande et brune, tandis que l’autre est petite et « chabine dorée », leur deux visages impassibles affichant la même physionomie « ababa ».

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« Imposantes ou Inquiétantes légèretés »

« revivance » des matériaux, EXPOSITION du 15 au 30 novembre 2013
Fort « Fleur d’Epée », GOSIER.

— Par Scarlett Jésus, critique d’art —
revivancePetites mains et des idées à revendre, elles sont quatre « ripppeuses » –Félie Line Lucol la présidente, Laurence Roussas, Ruti Russelli et Christelle Urgin- qui collectent, assemblent et détournent des matériaux au rebut. Au sein d’un collectif : Rip Art.
Mais pourquoi avoir choisi comme titre de leur exposition, « Imposantes légèretés » ?
Une exposition superbe, ludique, drôle au premier abord. A voir absolument. Et à revoir au besoin. De préférence à la tombée du jour. Parce que ce moment est propice à la perception de  cet entre-deux, entre clarté et obscurité, où se niche l’hésitation entre ce qui apparaît comme réel, et ce qui relève de l’imagination. L’exposition devient alors plus « trouble », plus troublante.

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Nou Touttt Fou

—Par Scarlett JESUS, critique d’art—
nou_touttt_fouExposition de Peintures et Film
Christian SABAS et l’Atelier du non faire
Mardi 15 octobre, 19 à 21h, et jusqu’au 22 octobre. Médiathèque du GOSIER

« Nul n’a jamais écrit ou peint, sculpté, modelé, construit, inventé, que pour sortir, en fait, de l’enfer ».
Antonin Artaud, Van Gogh, le suicidé de la société, 1956

Est-ce le fait de vivre en contact avec la folie qui a fait de Christian Sabas un révolté ?
A moins que le fou ne soit que le nom donné par la société à celui qui en refuse les codes ?
Et si les fous, c’étaient nous. Nous qui nous croyons sages, refusant d’admettre que nos certitudes ne sont qu’illusions trompeuses.
Dans une annexe de l’hôpital Maison Blanche, Pavillon 53, Christian Sabas tournant le dos aux soins psychiatriques traditionnels, ouvrit un atelier artistique destiné aux personnes en souffrance.  C’était en 1983.

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L’Enigme du silence : Béatrice CLERC, peintre de la Figuration poétique

par Scarlett JESUS, critique d’art.—

 beatrice_clerc« Là où tu n’arrives plus à t’exprimer avec la langue commence la peinture. Quand tu peins tu chasses les mots et les concepts. Une fois la peinture achevée, tu l’accroches et tu la regardes longuement. Quand tu en es satisfait tu lui donnes un titre. »

Gao XINGJIAN. Pour une autre esthétique

L’ensemble de toiles réalisées par Béatrice CLERC entre 2009-2011 a de fortes chances de dérouter le spectateur par le caractère insolite d’une démarche plastique apparemment très éloignée des préoccupations et productions contemporaines guadeloupéennes. Chercher la singularité d’un artiste impose au critique de procéder par empathie. Il se doit, pour s’approcher au plus près de l’univers personnel d’un peintre, de chercher à identifier et comprendre la « langue » de l’autre.

  « Trouver une langue » pour exprimer ce que les mots ne peuvent dire, l’indicible, fut la préoccupation majeure de RIMBAUD. Le poète qui se voulait « voyant » tenta d’inventer, avec « Voyelles », un système de correspondances entre les sons et les couleurs.  Le travail plastique de Béatrice CLERC relève d’une démarche similaire, si ce n’est qu’il s’agit plutôt de rendre compte de ses sensations et émotions par des couleurs.

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Manifeste pour un Art Achipélagique

Une exposition collective qui s’est déroulée du 12 au 23 avril 2013 à l’occasion du Terra Festival.
— par Scarlett Jesus, critique d’art —

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Le Terra Festival est un festival cinématographique consacré aux interactions que l’homme entretient avec son milieu naturel. Ce festival qui se déroule chaque année depuis dix ans en Guadeloupe évoque les nombreuses menaces qui planent sur notre planète, la Terre. Mais il renvoie également à une Terra particulière. A un espace géographique discontinu, fragmenté mais néanmoins en réseau, un espace dont la Guadeloupe fait partie et qui se compose d’un ensemble d’îles. A travers la diversité des langues et des cultures de chacune de ces îles peut se lire, en raison d’une histoire qui leur fut commune, l’appartenance à une même famille, la Caraïbe. Un espace de terres émergées, délimitées par la mer, qui s’oppose à d’autres terres, continentales. Ces territoires, isolés et longtemps sans rapports directs les uns avec les autres, sont restés longtemps un espace flottant dans l’imaginaire de populations qui, en raison des origines de leurs ancêtres, se sont tournés plus spontanément vers l’Europe l’Afrique, ou même l’Asie que vers leurs voisins immédiats.

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Frankito, lauréat du Prix Carbet des Lycéens 2013

— Par Scarlett JESUS, critique d’art —

« L’homme pas Dieu » ou l’homme qui se prenait pour un marron.

 « On reconnaît le degré de civilisation d’un peuple à la manière dont il traite ses animaux ».

Gandhi.

 

« De l’assassinat d’un animal à celui d’un homme, il n’y a qu’un pas ».

Léon Tolstoï.

 

 

 

« L’homme pas Dieu », cette formule qui clôt le roman pourrait parfaitement s’appliquer  à celui qui en est en fait le personnage principal, Albert Gouti. Un héros déchu dont la seule grandeur semble liée au prénom royal qu’il porte et dont l’étymologie germanique évoque tout à la fois la noblesse (adal) et la gloire (behrt). Doté d’un tel prénom, le personnage n’était-il pas appelé à un destin hors du commun, faisant de lui, à l’image d’Albert Schweitzer ou d’Albert Einstein,  un surhomme, un « homme-dieu » ? C’était sans compter la malice de l’auteur, Franck Salin, qui nous indique d’emblée sa volonté de le ramener à une dimension plus ordinaire, en l’affublant d’un patronyme dévalorisant renvoyant à l’animalité, « Gouti », lequel par aphérèse désigne l’agouti, petit rongeur des Antilles.

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