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Pourquoi il ne faut pas voter pour la dame aux chats.

Par Patrick Singaïny, écrivain et essayiste

Il n’est nul besoin d’être du côté d’Emmanuel Macron pour ne pas voter pour la dame aux chats.

A vrai dire, votre appartenance politique ne compte pas ici (n’en prenez pas ombrage je vous prie). Car il ne s’agit pas de politique conventionnelle, puisque cette élection présidentielle n’a rien d’un choix politique partisan entre une offre et une autre.

Une fois n’est pas coutume : l’élection présidentielle française de 2022, en réalité, ne parle que de choix civilisationnel. Et ce n’est pas la dame aux chats qui dirait le contraire. D’ailleurs, le fait qu’un idéologue/polémiste lavant plus blanc que blanc ait obtenu 7% des voix au 1er tour le démontre, et en dit long sur le paysage mental hexagonal actuel.

Choix civilisationnel ? Soit la nation française demeure dans l’ensemble européen, soit elle rejoint les démocraties illibérales pro-Poutine qui ne devraient plus être comptées parmi les 27 pays européens de l’U.E.

La dame aux chats n’a jamais caché sa proximité et sa sympathie avec le dictateur russe, à l’instar de leur grand ami hongrois Viktor Orbán, lui-même à la tête d’une démocratie on ne peut plus illibérale, dont le racisme, l’antisémitisme, l’autoritarisme sont clairement exprimés.

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Peut-on dissocier la parole de celui qui la porte?

— Par Patrick Singaïny* —

Oui si l’on croit aux idées, non si l’on croit à la pensée.
Quand Edgar Morin confronte sa pensée à celle d’un autre, confronte-t-il seulement ses théories à celles de l’autre? Non, il cherche autre chose puisque cette rencontre ne changera rien à l’intégrité des deux réflexions mises en confrontation, mais peut donner lieu à celui qui les distingue l’occasion de créer des liens ou des passerelles personnels. Là est le bienfait d’une telle démarche : le lecteur est celui qui est invité à s’ouvrir à des horizons inattendus.
Mais qu’est-ce donc une pensée? Tout d’abord, elle ne se limite ni à des idées, ni à des théories fussent-elles empreintes d’infinies nuances. La pensée naît d’un esprit grâce auquel, si il ne s’était pas exprimé encore une fois, une certaine vision du monde du moment-et-de-toujours aurait été ressentie comme tronquée.
Il y a donc un fossé entre celui qui porte le monde dans sa main avec humilité et gravité et celui qui le perçoit par clivages, c’est-à-dire via les idées ou les théories qui sont d’une grande labilité.

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« Amitiés créoles »

— Par Patrick Singaïny, essayiste —

La dernière fois que j’ai échangé avec mon ami Roger de Jaham, c’était en février dernier, à La Réunion, où je suis retourné vivre en 2009, après 10 années passées en Martinique. Il n’était plus chef d’entreprises, je n’étais plus journaliste pour l’hebdomadaire Antilla. Il se rendait régulièrement dans l’Océan Indien, et nous trouvions toujours un moment pour savourer un repas au cours duquel nous confrontions nos points de vue et analyses, à travers différents sujets.

Le ton était toujours très amical et enjoué. Habituellement, il commençait par me raconter longuement et avec plaisir ce que j’étais supposé avoir raté des dernières nouvelles martiniquaises. Puis il se mettait dans la peau du président de l’association « Tous Créoles » auquel j’avais consacré un article dès sa création, dont les propos de l’époque étaient partagés entre vifs enthousiasme et petits doutes. Février dernier à la fin d’un long petit-déjeuner pendant lequel nous nous étions réjouis des changements profonds dans le cours de nos vies respectives, l’ami a voulu s’adresser davantage à l’essayiste. Roger de Jaham disait préférer une bonne conversation avec un spécialiste plutôt que la lecture de son livre.

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Paul Vergès est allé rejoindre Césaire au panthéon des non-alignés.

— Par Patrick Singaïny(*) —

non_alignesEn 2001, en Martinique, à la fin d’une passe d’arme à fleuret moucheté dans les colonnes de l’hebdomadaire Antilla, à cet intellectuel martiniquais qui me sommait de désigner quels étaient, pour moi le Réunionnais, nos Césaire, nos Glissant et nos Fanon, je n’ai su que répondre. Mais durant la semaine qui ssuivit, j’ai pensé très fort au seul qui demeure celui qui, selon moi, peut être considéré comme le premier éveilleur de la conscience réunionnaise : Paul Vergès. Il ne s’agit pas de politique, ni d’identité. Il s’agit de la réunionnité, terme que j’ai conçu là-bas et qui désigne la personnalité réunionnaise à la fois dans ses fondements et dans son devenir.

Comme Aimé Césaire, une des principales personnalités marquantes du 20ème siècle, Paul Vergès s’est trouvé du bon côté de l’Histoire de ceux qui veulent changer le monde à défaut d’en proposer une alternative. Le communisme a été sans doute une étape de franchissement. Et comme Césaire qui a crée le PPM (Parti Progressiste Martiniquais), il s’en est affranchi en créant le PCR (Parti Communiste Réunionnais).

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Oui aux patriotes, non aux patriotards!

— Par Patrick Singaïny —
homme_revolteNon, les millions de sympathisants des Marinistes ne se sentent ni désillusionnés, ni désespérés. Non, ils ne sont pas mus par la peur ou la souffrance. Ils ont même dépassé le stade de la déception et ne vivent plus sous le joug du sentiment de révolte : ils se vivent décomplexés, se sentent enfin compris et partagent une vision claire de la France. Quelle est-elle ? Une France assimilationniste qui fait la promotion de la préférence nationale ; celle qui permet de désigner qui est un bon français et qui ne l’est pas. C’est ainsi qu’inexorablement le Front National est devenu le premier parti de France devant l’UMP qui ne peut le battre qu’en s’associant avec l’UDI et le MODEM.
Des millions de gens peuvent-ils se tromper ?
Je parle ici de personnes parfaitement ordinaires qui se sont mises d’abord à douter des normes sociales et politiques pour embrasser, petit à petit, une sorte d’évidence morale. Sur quoi repose-t-elle ?
Bien sûr, il y a d’un côté les Français-de-souche – les citoyens de France de culture française (placée en sus de ses régionalismes)- et les citoyens de France de culture composite (c’est-à-dire qui mêle la culture française avec une autre d’ascendance extra-européenne et postcoloniale).

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Intégrer la notion de différence

— Par Patrick Singaïny, Journaliste et écrivain —

differenceQuel est donc ce pays incapable de faire peuple uni au moment où, pour longtemps, tous ceux qui sont détenteurs de la nationalité française sont menacés de mort ?

Qu’aurions-nous dû faire dès au lendemain des marches de janvier ? Réaliser que nous voulions certes dépasser nos dissensions, mais surtout que nous nous sommes toujours refusés à les voir. Réaliser que nous voulions certes vivre ensemble une union nationale, mais dont nous savions fort bien, dès les premiers instants, qu’elle serait incomplète. Réaliser avec courage qu’il fallait avant tout aider à désamorcer nos bombes invisibles, kamikazes en puissance, qui reviennent dormir chez nous pour brusquement sortir de leur léthargie et frapper en nos cœurs au moment où on s’y attend le moins. C’est-à-dire n’importe quand.

Combien de temps tiendront les forces de l’ordre indéfiniment en faction devant les lieux dangereux ? Comment désamorcer nos bombes ? Av(i)ons-nous forcément besoin que le gouvernement propose ou décide de la façon de nous organiser ? Non. Rappelez-vous, avant que nous nous soyons rendu compte que nous n’étions pas parvenus à faire union nationale, le naturel avec lequel nous nous sommes plongés dans cet élan commun relayé sur tous les écrans du monde.

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« Français de souche » , assez d’hypocrisie!

—Par Patrick Singaïny, essayiste —

francais_de_souche« Français de souche est une expression courante ou une catégorie statistique controversée désignant, dans son sens le plus communément admis, les personnes de nationalité française n’ayant pas d’ascendance étrangère immédiate et n’étant pas issues de l’immigration récente. Elle est souvent opposée à l’expression Français de papier. » (source : Wikipedia, extrait).
Cette définition est bien sûr fausse. Français-de-souche ne désigne pas une identité mais une culture. Il y a, selon moi et de ce point de vue, deux grands types de façon de vivre la citoyenneté en France Hexagonale, même si le terme citoyen est originellement désincarné : les citoyens de France de culture française (placée en sus de ses régionalismes) et les citoyens de France de culture composite (c’est-à-dire qui mêle la culture française avec une autre d’ascendance extra-européenne et postcoloniale). Il me faut insister sur le plus important -notamment à l’adresse de notre jeunesse – : grâce à nos lois, à notre constitution, les deux parties disposent naturellement des mêmes droits et des mêmes devoirs, notamment celui de faire vivre le sentiment d’appartenance à la France, à travers l’exercice de sa devise tripartite : Liberté, Egalité, Fraternité.

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L’art du moucatage et Charlie Hebdo.

— Par Patrick Singaïny —

etat_eglise_separesNous n’avons pas toujours conscience que notre art du moucatage est une façon très fine d’exercer une liberté d’expression la plus grande possible. L’art du moucatage est une manière toute réunionnaise de se moquer, souvent dans l’irrévérence, parfois brutalement, mais sans heurter ni offenser. C’est ce que faisait et devrait continuer à faire Charlie Hebdo.
Cependant, la seule contrainte, ici, est d’avoir l’autre bien en face de soi. Tout se passe dans le regard échangé et dans le ton invoqué. L’œil est alors souriant, la bouche finit d’être dessinée par l’intention moqueuse pendant que le ton de la voix déploie l’écart entre ce qui est dit et comment cela doit être prononcé. La réussite du moucatage se constate alors dans l’effet produit : un rire partagé. Pendant un bref instant, une ligne se tend entre éclat de voix et fadeur d’un propos, le temps de cet échange amusé bien au-delà du verbe.

Charlie Hebdo a souvent réussi ses moucatages, non sans problèmes.
Cet instant entre le moucateur et le moucaté a failli se produire, quand en 2007, en plein procès, devant la 17ème chambre correctionnelle de Paris, dans un coin de couloir, Philippe Val –alors rédacteur en chef de Charlie Hebdo- rencontre à nouveau Dalil Boubakeur, recteur de la Mosquée de Paris.

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Lettre à Riss, nouveau rédacteur en chef de Charlie Hebdo.

— Par Patrick Singaïny[1]
prophete_et_roiComment appréhender la liberté d’expression dans notre espace laïc après l’attentat du 7 janvier 2015 contre Charlie Hebdo et ses caricatures de Mahomet ?

Je me souviendrai toujours d’Aziz, merveilleux dessinateur et peintre, et de ses amis étudiants en arts, des Marocains, des Algériens et des Tunisiens qui comme moi fréquentaient les cours d’histoire de l’art médiéval à la faculté des arts d’Amiens au début des années 1990. J’ai gardé en mémoire les effets déflagrateurs du premier cours durant lequel j’ai entraperçu, entre les passages de diapositives, des têtes baissées quand l’iconologie de la Vierge et du Christ était dûment abordée et montrée. Pourtant intrigué, il m’était impossible de leur parler, tellement leurs yeux rougis au sortir du cours m’intimidaient. C’est autour d’un thé, qu’Aziz m’a expliqué leur désarroi. Tous avaient cru au prosélytisme. Tous avaient été profondément offensés. Réunis chez moi, mes amis maghrébins ont subi un cours de laïcité. Je me souviens avoir beaucoup insisté sur le fait que l’art qu’ils étaient venus étudier s’était débarrassé depuis longtemps de la tutelle de l’Eglise.

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Un monument pour les Réunionnais.

Par Patrick Singaïny.—

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 Le phare est un terme qui désigne un guide lumineux pour les voyageurs ou les visiteurs. Placé en apposition (exemple : projet-phare), le mot désigne un modèle.

  Eriger le phare de Sainte-Suzanne1 en modèle, en s’appuyant sur sa fonction première, est au cœur de cette appropriation artistique. Si le phare de Sainte-Suzanne guide le voyageur à plusieurs kilomètres au large, son éclairage, selon moi, peut se mettre au service de celui qui vit à terre en lui permettant de devenir un guide lumineux pour et en lui-même.

 

 Jusqu’ici, quand la lumière du phare éclairait du côté de la zone terrestre, son rayon éblouissant rencontrait un adhésif opaque de couleur blanche destiné à empêcher que le voisinage soit gêné par son éclat. Aujourd’hui, en lieu et place de l’adhésif, c’est le drapeau de La Réunion2 qui remplace ce cache vierge de couleurs. Ainsi, quand le phare indique à ceux du large la meilleure voie, il fait de même à ceux qui, à terre, se tournent vers lui.

 Mon appareillage artistique, inspiré par ce que j’ai appelé une esthétique du futur antérieur3, se double d’un habillage lumineux de la partie inférieure du monument historique : trois projecteurs diffusent continuellement les couleurs du drapeau national.

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« Florebo quocumque ferar », ou l’importance de l’analyse des symboles

— parGilles GAUVIN, Docteur en histoire contemporaine—

drapeau_reunionEn 1925, le gouverneur Merwart créait un blason pour La Réunion qui, jusqu’au début des années 1980, figurait sur des ouvrages, des cartes postales ou était même utilisé comme fanion par certains clubs sportifs. Il était surmonté de la devise de la Compagnie des Indes, à qui la mise en valeur économique de l’île avait été octroyée par le roi de France : « Je fleurirai partout où je serai portée ». Phrase magnifique par son sens, si l’on songe à la symbolique qu’elle peut constituer aujourd’hui pour toute la communauté réunionnaise disséminée sur la planète, mais phrase terrible lorsqu’on sait à quoi fut associée cette Compagnie qui participa à une mondialisation économique écrasant les individus, esclaves ou colons, pour des objectifs guidés par l’intérêt d’une exploitation commerciale au profit de quelques-uns. Et pourtant cette phrase fait partie de l’histoire de la construction de l’identité réunionnaise. Dans Marianne, à la fois symbole de la République et figure du marronnage, Davy Sicard a magnifiquement chanté ce double visage de notre histoire qu’il nous faut assumer et à partir duquel nous pouvons sans peur nous ouvrir au monde.

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Liberté, Egalité, Fraternité, Francité ! … et immigration zéro.

Par Patrick Singaïny

Propos sur le discours présidentiel au Panthéon

 

 

Par Patrick Singaïny1

 

 

 

 

 

Ayant préféré être posté sur le plateau de Michel Field à LCI pour mieux vivre l’événement national, plutôt que me trouver parmi les officiels, je commentais en direct la panthéonisation du « poète » Aimé Césaire par le président Nicolas Sarkozy. Pendant le temps où nous devions rester silencieux pour écouter le discours du chef de l’Etat, je prends connaissance de l’embargo au prononcé2 que nous tend l’animateur.

 

Je découvre alors, par la dimension que l’on a voulu donner à son contenu, un texte aux accents historiques, dont la prétention voudrait tendre à la similarité avec le fameux discours de Philadelphie de Barack Obama.

 

Celui-là même qui a su insuffler un élan d’espoir sans précédent au pays de Bush-fils, alors conspué dans le monde entier.

 

Le discours de Philadelphie, tout aussi important que le « I have a dream » de Martin Luther King, avait permis au métis de remporter la victoire présidentielle. C’était un de ses grands et rares discours qui appelait à parfaire une union nationale.

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Naissance de notre Art Comtemporain

 —  par Patrick Singaïny —

 

A propos de l’exposition « Mes Martiniques »

 

de Hervé Beuze (juin 2009)

 

 


 

 par Patrick Singaïny.

 


 

Que l’on ne vienne pas me dire que ce qui va suivre a déjà été

 

dit en d’autres temps ou en d’autres lieux.

 

Je me fous de ces époques et de ces lieux.

 

Ce qui compte est que ce qui est exprimé ici et maintenant

 

ne vaut que pour notre ici et notre maintenant.

 

Leitmotiv personnel.

 


 

Le verbe du démiurge Césaire transmute notre paysage mental post-esclavage, broyé par l’assimilation. Il fait de nous des êtres en combat pour le gain d’une humanité en partage contre la fatalité d’être prisonnier du travestissement de la liberté, de l’amour, de l’amitié, de l’entraide, et de la négation de l’Autre.

 

Si j’osais, j’affirmerais sans ambages que, tout génie qu’il était, la tâche de Césaire ne tenait pas de l’impossible. Car il possédait fermement cette « arme miraculeuse » –la Poésie-action- dans un pays où le verbe possède de précieuses vertus rédemptrices et peut se révéler vecteur d’actions transformatrices.

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