Se résigner, craindre, prévoir « Une vie violente » ?

2ème projection mardi 14 novembre 19h 30 à Madiana

— Par Dégé —

Aucun « effets spéciaux » ; une prise de vue banale « à la française », proche du cinéma vérité ; une prise de son pas terrible, voire inaudible comme trop souvent dans le cinéma français (hausser le volume sonore n’étant, hélas, pas la solution) ; des acteurs qui jouent avec un tel naturel qu’ils ont l’air d’être les témoins involontaires d’un film documentaire…Mais au final quelle violence !

Elle est partout. Non seulement envers les victimes comme celui qui meurt atrocement dès les premières minutes du film, mais envers les femmes, chaque femme, envers les jeunes, chaque jeune, envers les travailleurs, ce commerçant, cet ouvrier des champs…Chacun tour à tour pleure, rit jaune, tremble, vomit, fuit en vain…Pas une seule vie, toutes sont frappées. Une région française entière, un pays tout entier, la Corse.

L’origine de ce mal ?

Thierry de Peretti, le réalisateur, après « Les Apaches », semble concentrer son talent sur son île comme laboratoire d‘étude. Un regard amoureux mais sans complaisance : il n’est pas question de folklore corse.

De Peretti focalise dans « Une vie violente* » son attention sur un jeune étudiant réfugié à Paris pour échapper à son inévitable assassinat. On suit le parcours initiatique et morbide de Stéphane dans l’exil, le trafic d’armes, la prison, puis, suite au meurtre d’un ami, son retour au pays natal, antichambre de sa mort…

Là, il se confond avec tout un groupe de jeunes hommes à la virilité exacerbée au point d’en être infantilisés, à la pensée confuse (aidée cette fois par une prise de son volontairement confuse) parfois explicitée par un sous-titrage. Pensée au mieux romantique, faite de code d’honneur, de fierté, de vendetta, de générosité révolutionnaire, qui ferait sourire si elle ne menait pas à une fin fatale. Toute réflexion, toute solidarité se brouille devant l’arme de la peur. Le tissu social explose se délite, l’individu se perd.

Car l’arme de la peur, celle qui ruine la société corse n’est plus uniquement maniée par la fierté historique d’un peuple épris de liberté ; ni plus seulement par une idéologie révolutionnaire d’un peuple généreux épris de justice et d’égalité, mais d’un peuple en voie d’auto-extinction, d’individus pris un à un désormais par une société de gangs, de rackets, de meurtres perpétrés par un système mafieux. Le pouvoir aux mains de psychopathes avides d’argent.

 

Ces dérives culturelles et idéologiques sont d’autant plus violentes et visibles qu’elles s’exercent dans une île, celle du corse Thierry De Peretti. Mais, quand elles ne sont pas déjà là, elles peuvent en gangréner d’autres, puis tout un pays, tout un continent…tout un futur ? Si la Corse est prémonitoire de notre avenir, comment faire face ?

 

*En VO, Tropiques Atrium, 2ème projection mardi 14 novembre à Madiana