« Queen and Country » de John Boorman

Par Selim Lander

Queen and countryLes soldats de l’empire britannique se battent pour leur reine et pour leur pays. Tel fut le cas pour John Boorman, cinéaste toujours talentueux, à 81 ans, comme il le prouve dans ce film autobiographique qui prend son personnage au moment du service militaire, en 1952, l’année du couronnement de la reine Elizabeth II. Ce film prend la suite  de Hope and Glory (1987) où le cinéaste racontait son enfance pendant la guerre.

Le héros, donc, double cinématographique de J. Boorman, qui s’appelle Bill Rohan dans le film, est interprété par Callum Turner ; son copain de régiment, nommé Percy (Caleb Landry Jones), est pas mal « allumé » et ils sont tous les deux les souffre-douleurs du sergent major Bradley (David Thewlis) contre lequel, fatalement, ils cherchent à se venger. Il y a du comique troupier dans ce film qui restera de bout en bout une comédie avec sa part de blagues, mais encore de marivaudage et d’initiation amoureuse. Après l’apprentissage de la vie militaire avec son cortège de brimades, celui de la vie en dehors de la caserne n’est pas plus aisé. Surtout quand on tombe amoureux, comme Bill, d’une mystérieuse Ophelia (Tamsin Egerton) dont le cœur se trouve pris ailleurs.

Le film est une comédie réussie, donc drôle et parfois presqu’émouvante même si l’on n’attache pas trop d’importance aux déconvenues du héros. On ne s’ennuie jamais. Les seconds rôles sont aussi convaincants que les premiers : les officiers sont caricaturaux, les bidasses généralement réfractaires à la discipline, les  demoiselles délurées, la famille envahissante.

On ne saurait trop recommander ce film aux spectateurs désireux de passer un bon moment de détente. Ils ne manqueront pas d’être séduits par la qualité de la « photo ». Les nombreux gros plans sur les visages des militaires lèvent toute ambiguïté sur les sentiments que le cinéaste a pu développer à leur égard. Les prises de vue de la maison des parents de Bill, sur une île de la Tamise, en font un havre enchanteur et l’on a du mal à comprendre que ses habitants ne se montrent pas toujours à la hauteur de leur cadre de vie paradisiaque. La reconstitution des années cinquante est à l’avenant, si esthétique que l’on ne peut pas imaginer que nos parents ou grands parents vécurent en réalité dans des conditions bien plus dures que les nôtres. « Là tout n’est qu’ordre et beauté / Luxe, calme et volupté. » Il n’y a pas que des moments calmes dans le film et la volupté s’y fait plutôt rare mais ces deux vers décrivent bien néanmoins l’impression qui domine.

L’EPCC Martinique à Madiana, les 12, 16 et 20 janvier 2015.