Nord Plage : requiem pour une île

— Par Christian Antourel & Ysa de Saint-Auret —

nord_plage-1L’AMOUR MALGRE TOUT

Enfin une exposition une vraie, sur les traumatismes vécus par ce village rongé de sel, percé de vents, détrôné par la houle. Une manière saisissante pour aborder ce sujet qui fait mal. Mais à vrai dire, Nord-Plage est une exposition sur l’amour, l’amour né de ce crime odieux, peut-être le pire qui puisse être fait à une ile.
L’exposition qui s’abstient de faire l’éloge d’un passé où ce quartier du Macouba fut une petite perle de vie simplement, ne tombe à aucun moment dans le mélodrame. L’artiste parle une langue contemporaine, à la fois locale et universelle. Refusant toute concession aux polémiques de tous bords, nées de souffrances, peut-être d’hystéries collectives. Il saisit l’image qui parle de la vie, plus forte que tout. Si Nord Plage, exposition exempte de toute considération partisane exacerbée, est un requiem pour une île, elle est autant une ode urbaine à ce village héroïque magistralement accroché à la face du monde. Tant de traces de cette période glissent à la mer et s’effacent inéluctablement, et pourtant d’autres trésors continuent de faire exister le passé de Nord-Plage. Une nouvelle manière picturale s’instaure plus contemplative dans l’objectif de Jean-Luc de Laguarigue .
A la croisée du cinéma et de la peinture
Dans ce va-et-vient incessant, entre vérité et émotion, dans cet univers maintenant empli de sérénité et de solitude silencieuse, l’artiste, témoin d’un temps en filigrane s’interroge : comment être objectif et que montrer ?« il explore plusieurs approches de la photographie, prise de vue, photomontage, expérimentation numérique générée par un effet de hasard et le passage du temps » il y ajoute sa force, sa modernité et son équilibre. Ses images mémoires extirpées d’une ambiance de fin des temps sont à la croisée du cinéma et de la peinture, d’une perfection qui transcende le plus banal, le rend magique et spectaculaire. Une étrange poésie se dégage des images par la mise en abime d’ouvertures et de portes fermées ou ouvertes sur la mer, comme une scène de théâtre et de jeu des forces aveugles de la nature. Un conflit violent s’est crée entre les éléments et la main humaine ainsi ce visage sur un mur, surgit de nulle part, fondu dans un décor vieilli à force de soleil, d’eau salée et de vent pose encore pour Jean-Luc de Laguarigue.

Plusieurs approches de la photographie.
« Elles nourrissent ma réflexion sur la photographie, ça ressemble à un engagement poétique. Mais tout cela est sans importance, il ne reste que l’expérience, seule compte la vérité intrinsèque de l’image, ce qu’elle porte dans son silence et dans sa forme et tout le reste est littérature »

Pratique :
Aux Foudres Edouard Glissant
Habitation Saint Etienne- Gros Morne
Jusqu’au 31 Janvier 2015
Du lundi au vendredi 9h30 à 12h30/ 13h à 16h.
Christian Antourel
& Ysa de Saint-Auret.
Texte paru dans France-Antilles Magazine