Martine Baker : « Imaginaires // Telluriques »

Du 19 Novembre au 15 décembre 2018 à Tropiques-Atrium

Le fil conducteur de Martine Baker est l’exploration de la création.
Créer des liens, du partage est une partie essentielle de son travail.

La céramique est son médium de prédilection, le feu puissant du Raku la subjugue mais sa curiosité la pousse aussi vers la gravure, vers la photographie et la vidéo.
Passionnée par les sciences naturelles, elle se laisse guider par la loi de Lavoisier, « Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme ». La transformation est omniprésente dans ses actes de création, le travail du feu est son compagnon de route.
Entre le contrôle de la cuisson de la terre, et les effets presque imprévisibles de la technique du raku, elle obtient des formes aux textures craquelées, minérales qui laissent entrevoir des failles obscurcies comme des écritures brouillées, où l’imaginaire creuse le mystère de l’en-dessous des choses et des mémoires caribéennes et universelles enfouies.
L’artiste explore l’objet, met l’accent sur lui, en l’investissant de ses visions.
Elle raconte des histoires qui ouvrent des mondes où le rêve est omniprésent, elle nous parle de la création, de la transmission, de la transformation et de la symbiose.

Associant les gestes, les couleurs, les formes et l’imaginaire, le concept nous invite à voir l’humilité.
L’esprit vagabonde, le regard s’attarde, nos émotions nous interrogent à propos de ce que l’artiste nous communique. Dans l’espace s’installe le chant silencieux qui amène au calme.
Ce que nous possédons de plus subtil, de plus impalpable s’abandonne et suit ses réflexions à propos de ce qui nous entoure, de ce que nous sommes… de ce qui fait l’incroyable métamorphose de la vie.
La vie est plurielle, de toutes couleurs, de toutes textures. Elle peut être douce et veloutée, rugueuse ou agressive comme l’argile.
L’argile reste son matériau favori. Elle conserve les traces de la force de l’artiste, se pare de sa fantaisie et de sa maitrise pour devenir un objet inédit et parfois inattendu.
Argile malaxée, transformée, porteuse de nos mémoires ancestrales et finalement proposée comme un clin d’œil à nos évolutions inéluctables.
L’exposition est enrichie d’autres supports, d’autres moyens de voir le propos. Pas des digressions : des renforts au concept, comme un fil d’Ariane pour nous guider à travers notre visite de la beauté bouleversante et parfois sauvage dans sa nature sans cesse renouvelée que seule la vie peut proposer.
Beauté que la sagesse de l’artiste ne peut que contempler. Arlette Gabbio Juillet 2018

Le besoin d’ailleurs

— Marion Thiba, journaliste —

 Qu’y a-t-il de plus radicalement différent que la banlieue parisienne et les Antilles ? D’un côté, l’enfance, des pavillons en pierre meulière, des petits jardins où l’on peut surprendre un hérisson à l’ombre du noisetier, de l’autre côté l’âge adulte, une nature exubérante, un volcan encore en activité, la langouste à déguster fraiche.
Entre les deux, le besoin d’ailleurs, la recherche de nouveaux horizons, matières à un imaginaire qui ressurgit sous forme artistique, sans doute imprégné d’une autre Mer, la Mer de Chine, berceau de la Mère. Il ne s’agit sans doute pas de se déraciner, mais de conquérir de nouveaux territoires, à l’air libre du littoral des alentours du Robert comme à l’intérieur de soi. Il n’y a sans doute pas de conflit entre la terre natale et la terre d’adoption, plutôt un dialogue, un prolongement, un balancement émotionnel, au même rythme lent que celui, si agréable, du hamac sur la terrasse, où l’on s’abandonne, les yeux perdus dans le lointain.
Réminiscence de la balançoire de l’enfance, qu’on appelait escarpolette il y a peu ?
De l’escarpolette à la poudre d’escampette, il n’y a que quelques lettres d’écart, ce qui suffit à dire le choix d’un ailleurs pour grandir à soi-même, se construire dans l’espace de la marge, où le travail n’est plus chronométrable dans la mesure où il répond à une commande intérieure, à une invitation à la divagation. Et c’est ainsi, du moins je l’imagine, que ma sœur Martine aborde le four du céramiste, disponible aux hasards et aux enchantements que ménage si bien l’expérience de la main.