Les mondes de Richard-Viktor Sainsily Cayol

Rhizomes hybrides ou La poïétique d’un syncrétisme. Dimanche 27 avril 2014 à 10h, visite commentée de l'exposition à la Fondation Clément

 — Par Dominique Berthet —

sainsily_cayol-1

Extraits du catalogue de l’exposition

Dans une belle formule, Vassily Kandinsky, parlant de la création artistique, écrivait : « Chaque œuvre naît, du point de vue technique, exactement comme naquit le cosmos… Par des catastrophes qui, à partir des grondements chaotiques des instruments, finissent par faire une musique que l’on nomme musique des sphères. La création d’une œuvre, c’est la création du monde »1. Le fait que Kandinsky soit l’un des fondateurs de la peinture abstraite, qu’il réalisa en 1910 une aquarelle en rupture avec l’esthétique de la mimesis et qu’il soit, par ailleurs, persuadé de l’existence de correspondances entre la peinture et la musique (comme l’atteste sa correspondance avec le compositeur Arnold Schönberg), permet d’éclairer cette vision de la création de l’œuvre.
Kandinsky, au début du XXe siècle, ouvrit la voie à un art libéré des contraintes de la représentation, laissant libre cours à l’expression de l’émotion, des sensations, des sentiments, de la sensibilité, du monde intérieur. L’idée véhiculée dans cette conception de la création artistique est que l’artiste est une sorte de démiurge, associant la création de l’œuvre à celle du monde. L’artiste, dans la réalisation de son œuvre, se confronte au chaos qu’il tente d’organiser. Il s’agit d’une action chaque fois recommencée et chaque fois nouvelle. Aussi, en paraphrasant Kandinsky, je dirai que la création d’une œuvre c’est la création de mondes. Des mondes singuliers, qui invitent à l’exploration, à l’interprétation, à la rêverie, ainsi qu’à la réflexion.
Quelle serait la face de l’art aujourd’hui si certains artistes n’avaient, dans la première moitié du XXe siècle, renversé les codes artistiques, récusé l’esthétique classique, transgressé les frontières de l’art ? L’apport des arts non occidentaux fut également déterminant dans les nouvelles voies empruntées par l’art occidental. Quel chemin parcouru en l’espace d’un siècle ! Des chemins conduisant à l’exploration de pratiques imprévisibles et surprenantes telles que le collage, l’assemblage, le recyclage, le détournement, le mélange, l’hybridation. Le mélange et l’hybridation, quant à eux, furent des moteurs de l’art moderne et, de manière encore plus diversifiée, de l’art contemporain.

1 Vassily Kandinsky, « Rückblicke », in Kandinsky, 1901-1913, Berlin, Verlag der Sturn, 1913 ; repris dans Regards sur le passé et autres textes, 1912-1922, édition établie et présentée par Jean-Paul Bouillon, Paris, Herman, 1974, p. 116.
2 C’est ainsi que cette faculté fut nommée au début du XIXe siècle dans le domaine médical.