L’eau prend la couleur du récipient…

— Par Roland Tell —

Nul ne peut servir deux maîtres, enseigne le Christ ! Donc, une doctrine politique de droite ne peut être unie à ce qui, de ses idées, a toujours fait le tourment et la souffrance. A force de presser les mamelles de la vache « Alliance », quel doux lait en est-il sorti ?
Désormais, le contrat de gestion est devenu semence pour campagnes électorales communes. Et cela se passe à Sainte-Marie, la bien-nommée, au quartier Derrière Morne, où la passion commune a enfin fait son nid, pour couver, comme des oeufs, des lendemains meilleurs. L’union de la trahison ne cause aucune douleur, ni à l’esprit, ni surtout au corps, du fait des suspensions de la mémoire passée, allant jusqu’à perdre le souvenir de l’idéologie originelle. L’homme et la femme sont hantés de coups à faire, où l’extase politique se révèle la passion la plus riche de toutes les vertus terrestres.
L’élévation à un tel état d’alliance politique ne peut être que l’oeuvre de la passion – passion de gouverner ensemble dans le champ clos des appêtits déréglés de pouvoir, et bien d’autres désagréments, qui engendrent, dans la mémoire politique, quantité d’impuretés idéologiques. Que l’on tombe ainsi du contrat de gestion économique au contrat d’accouplement électoral, quelle chute dans l’indignité, et dans la mort politique ! Rejeter de la sorte sa doctrine derrière soi, comment croire que demain la parole de tels gouvernants porte du fruit ?
Voyez déjà combien la Martinique est aujourd’hui inassouvie dans ses besoins et dans ses désirs ! Il est en elle une soif de progrès et de travail pour les jeunes, qui voit poindre, tous les jours en eux, grande tristesse de partir ailleurs. La croyance du peuple martiniquais, n’est-ce pas que tout est vain désormais, car tout déjà fut dans le passé, avec Emile Maurice, Aimé Césaire, Georges Gratient, Victor Sablé, qui, en leur temps, ont fait la récolte du bonheur martiniquais.
Aujourd’hui, en Novembre 2017, tout recule, tout se perd, car les malheurs ne cessent de grandir : la mort ne sait plus où s’ensevelir, la médecine est malade, la démagogie répand partout son venin, même dans les glacières de nos marins-pêcheurs ! De plus, la Caverne de Plateau-Roy se bouche les entrées, tout comme ses longues oreilles, pour ne pas entendre la voix des syndicats, la colère populaire, et pour n’en être pas impressionnée ! Certes, il faut montrer pattes blanches sous le soleil du désir de nos gouvernants, cherchant sécurité, plus de sécurité, pour leur longue et vieille crainte de bêtes sauvages, terrées dans la Caverne, et ne pouvant vivre que plongées dans le silence de leurs problèmes existentiels, en se donnant courage les uns les autres, puisque leur manitou en gestion et en politique ne cherche que des adorateurs. C’est ainsi que Plateau-Roy est consacré et destiné à son éloge sempiternel. N’est-ce pas là la seule destination de la Caverne ?
En effet, lorsqu’il s’agit d’une affaire importante pour le progrès de la Martinique, telles les glacières pour marins-pêcheurs, il convient de bien choisir le discours, qui occupe les oreilles. Il ne doit offrir que des agréments et des charmes, et satisfaire les sens de troisième âge du pontife de Plateau-Roy. Il est bon de faire choix que les paroles louangeuses montent vers lui directement, sans être retenues et embarrassées du fait des prises de vues télévisées ! Bien au contraire, l’esprit du peuple martiniquais doit aussi s’élever, pensent les uns et les autres de la majorité, les bavardes surtout, très pieuses, et sans limites au micro, presque agenouillées en leur siège, telles des dévôtes, pour débiter leur litanie du jour. Amen ! devrait dire l’opposition, sur qui l’eau bénite devrait souvent venir, tant le poids de l’avenir martiniquais repose tout entier sur elle.
ROLAND TELL