« Le phénomène des sargasses est probablement lié au changement climatique »

Près des côtes, les sargasses concentrées entraînent une mortalité importante de la faune, note Frédéric Ménard, de l’Institut de recherche pour le développement.

— Par Martine Valo —

Directeur du département scientifique Océans, climat et ressources à l’Institut de recherche pour le développement (IRD), Frédéric Ménard coordonne le programme de recherches sur les algues sargasses au sein de l’Institut méditerranéen d’océanologie (CNRS/IRD/universités d’Aix-Marseille et de Toulon).

Que savons-nous des algues sargasses ?

Alors que la plupart des algues sont benthiques – elles poussent sur le fond de l’océan –, les sargasses qui s’échouent actuellement dans l’arc antillais, elles, sont pélagiques. C’est une espèce clonale qui se reproduit par bouture végétative, par fragmentation. Elles sont connues depuis que Christophe Colomb les avait observées dans la mer des Sargasses. Cependant, nous ne savons pas précisément pourquoi elles se sont mises à proliférer plus au sud, dans l’arc Caraïbe. Sont-elles apportées par les eaux de ballast des navires ? Nous ignorons pourquoi le phénomène a touché les côtes antillaises en 2011, 2012, 2014 et atteint un paroxysme en 2015, puis surtout en 2018. La Caraïbe n’est pas la seule concernée. En 2014 et 2015, il s’est également produit des échouages en Afrique, des côtes de Sierra Leone jusqu’au Bénin. Le Texas observe aussi des échouages, mais en provenance de la mer des Sargasses, et pas les mêmes années que les Antilles françaises.

Pour quelle raison prolifèrent-elles ?

Nous pensons qu’il n’y a pas une cause unique. Cependant, ce phénomène est probablement lié à l’élévation des températures de l’eau, due au changement climatique et aux nutriments charriés jusqu’à l’océan par les grands fleuves, en particulier ceux lessivés par les pluies sur les sols déforestés de l’Amazonie.

Où en est la recherche ?

Lorsqu’elle était ministre de l’environnement, Ségolène Royal avait annoncé des crédits – deux fois 2 millions d’euros – pour financer une étude sur d’éventuelles pistes de valorisation de ces tonnes d’algues qui ont tendance à concentrer les polluants comme l’arsenic et le chlordécone à l’approche des Antilles….

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