« Laisse tomber la neige », texte de Pierrette Dupoyet, m.e.s. Jean-José Alpha

27, 28, 29 avril 2017 à 19h 30 au T.A.C.

Avec Elisabeth Lameynardie  & Yva Gaubron.

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Antonia D, cette jeune femme qui a tué par amour, dit-elle, sera devant les jurés des Assises publiques de Fort de France, le jeudi 27, vend 28 et samedi 29 avril 2017 au Théâtre Aimé Césaire de la Ville de Fort de France. Après 8 années de détention en milieu spécialisé, elle décide de faire la lumière sur ce crime ; elle explique les raisons de son acte .

Qui est Elisabeth Lameynardie ?
Elle a approché la pratique théâtrale par l’atelier Théâtre du SERMAC (2012) . Elle est dirigée depuis cinq ans par José Alpha, depuis la comédie dramatique « Le métro fantôme » de Amiri Baraka ( Leroy Jones). Cadre de l’Education nationale, la comédienne bénéficie d’une observation objective des comportements, des réactions et des projets de la jeunesse. Elle s’investit actuellement dans la tragédie comme un exutoire de la dépression sociale…
Que nous révèle cette tragédie ?
Plaidoyer pour une folie raisonnable ? Réquisitoire contre la détention arbitraire ? Ou vrai crime d’amour ? … A l’origine, un fait divers : «  … le 11 décembre 19…, Antonia D., éminente personnalité du monde médical, commet un assassinat. Plusieurs faits antérieurs au crime sont suffisamment troublants pour qu’une enquête psychologique soit ouverte… » Que s’est il passé dans la vie de cette femme pour qu’elle assassine avec une telle cruauté sa meilleure amie ? Aujourd’hui, qu’est ce qui amène une femme à torturer la jeune maitresse de son mari avant de lui donner la mort ? Quelques années plus tard, pourquoi se retrouve-t- elle à nouveau aux assises pour assassinat de 21 coups de couteaux à son nouvel amant ?

Les Martiniquais et les Antillais ont découvert avec effroi ces nouveaux assassins, généralement des femmes de toute condition, dont la cruauté des actes témoigne d’une grande détermination et d’une redoutable maitrise de soi.
L’hebdomadaire allemand Der Spiegel s’est entretenu avec la psychiatre médico-légale autrichienne Sigrun Rossmanith. Celle-ci prétend dans son dernier livre que les femmes sont de meilleurs assassins que les hommes. « Les coupables féminines doivent compenser leur désavantage physique par rapport aux hommes. Ainsi, les femmes font souvent en sorte que leurs victimes soient sans défense avant de passer au meurtre. … »
José Alpha ajoute :
Nous remercions le Dr. Didier Trystram, médecin psychiatre au Centre Hospitalier Maurice Despinoy de Fort de France aujourd’hui disparu, ainsi que le psychanalyste Guillaume SURENA.
J’ai rencontré ce texte de Pierrette Dupoyet en 1994 à Fort de France, lors d’une rencontre dans un bar avec une comédienne qui le roulait en tube, le triturait, l’écrasait sur la table comme pour le repasser à plat … et puis pour le lâcher dans mes mains comme une chose dégoûtante, horrible, terrifiante et fascinante… de douleur et d’interrogations. – Comment peut-on en arriver là ? – De quoi parles-tu? – Mais de cette femme amoureuse, passionnément amoureuse, au point de tuer au nom de l’amour  !!! si ce n’est pas la folie, c’est quoi alors ? … Il y a de plus en plus d’histoires comme çà, des femmes qui tuent par dépit, par colère ou sous l’emprise de la folie … de l’amour… çà ? c’est un crime sordide dont l’histoire a été adaptée par Pierrette Dupoyet, tu la connais ? …
– Non … mais je vais la connaitre en te voyant dans un tel état… tu me laisses le texte ? – Non… enfin, je te le ramènerai plus tard …
Et le texte dont j’avais pu lire quelques lignes, m’est revenu 17 ans plus tard en le recevant de Pierrette Dupoyet qui répondit à mes appels ; parce qu’entretemps je racontais cette histoire à des amis qui m’encourageaient à le retrouver.  Parce qu’une telle histoire devient une obsession quand la tragédie s’impose à vous.
D’abord étrangement belle, puis envoutante, elle vous possède comme une épiphyte, cette plante grimpante qui étouffe l’arbre sur lequel elle a jeté son dévolu…
Comme l’histoire de cette jeune femme dont l’existence n’a jamais laissé apparaitre la bascule dans la folie passionnelle, m’a saisi de colère et de rage. Elle tend un piège à la jeune maitresse de son mari, la frappe et l’attache au parchoc de sa voiture pour la trainer sur des kilomètres jusqu’à une cannaie où elle l’immolera. Elle fut condamnée à 18 ans de prison. Quelques mois après sa sortie du Centre pénitentiaire, elle poignarde son nouveau compagnon de 21 coups de couteau après lui avoir administré un somnifère… l’histoire se répétait et s’est toujours répétée.
J’ai proposé la lecture du texte à quelques comédiennes et personnalités fortes,… sans suite.
Et puis, un soir de représentation de la pièce de Leroy Jones « Le métro fantôme » que j’ai monté en 2014, j’ai vu Elisabeth Lameynardie. Je lui ai prudemment proposé de lire cette tragédie de Pierrette Dupoyet. Elle accepta et j’en suis ravi.
Pierrette Dupoyet m’adressa un mot qui accompagnait le texte que je reçus et qui disait ceci  : « je serais ravie qu’une comédienne martiniquaise interprète ce texte que j’aime beaucoup… » . Je crois que raconter cette histoire à plus d’un, est nécessaire à l’Humanité.
Qui est Pierrette Dupoyet ?
Comédienne dramaturge internationale, d’origine lyonnaise, Pierrette Dupoyet crée prioritairement à Avignon où elle se produit en solo chaque année. Elle s’est produite avec succès à l’Atrium, il y a quelques années. La comédienne a fait une adaptation théâtrale de « La pensée » de L. Andreiev. Elle nous a confié son adaptation qu’elle a créé au Festival d’Avignon en 1984, en souhaitant qu’ »une comédienne martiniquaise interprète ce texte»
Elle dit : « Le Théâtre est la grande passion de ma vie. Je tente, avec l’outil artistique dont je dispose, d’apporter modestement une pierre à l’édifice de l’Humanité. Ce métier me donne des occasions uniques de partage, de rencontres et de réflexion…Il permet, par le jeu dramatique, de redonner de l’espoir à ceux que la vie a brisés (notamment quand je joue dans les pays en guerre ou en grande difficulté économique : Liban, Ethiopie, Tchad, Rwanda, Serbie, Bangladesh, Madagascar, Haïti…) et au travers des textes que je défends, de prendre la parole pour ceux qui en sont privés. En donnant également des représentations régulières en prison (centrales, maisons d’arrêt, pénitenciers…) je tente, par l’émotion et le rêve, d’effleurer chez les détenus, une conscience affective, et, qui sait ? d’aider peut-être à leur réinsertion. Le Théâtre me permet aussi de revisiter des auteurs abordés en période scolaire de façon trop rigide ou trop rapide (Rimbaud, Giono, Sand, Zola, Colette, Maupassant…) et d’inviter le spectateur à se replonger dans les méandres passionnants de leurs vies et de leurs œuvres afin de les redécouvrir.
Dans certains spectacles, j’aborde également des problèmes de société (Droits de l’Homme, Droits de l’Enfant, Psychiatrie, Conquête de la Liberté, Erreur judiciaire, l’Exclusion…), en espérant que, grâce à l’émotion, certains verrous se libèreront, certaines actions s’entreprendront, certains rêves se concrétiseront … Faire un spectacle sur Soeur Emmanuelle (L’Amour plus fort que la mort) agissant au coeur d’un bidonville, parmi les chiffonniers, c’est aussi faire découvrir la force de l’action … Evoquer dans un spectacle (Les parias chez Hugo) le Discours contre la Misère (prononcé à l’Assemblée par Victor Hugo), c’est faire réfléchir sur le sens profond de la Fraternité … Le Théâtre est « utile » et le comédien a pleinement sa place au cœur de la Cité. C’est pourquoi depuis 2.000 ans qu’on le prétend en crise, le Théâtre est toujours là ! Il est d’une absolue nécessité puisqu’il parle de l’Humain à d’autres Humains. Il laisse une trace indélébile dans le cœur, le ventre ou la tête du spectateur. Il a le Devoir de ne laisser personne sur le bas-côté de la route.

Qui est José Alpha ?
1983-2017 / 35 années de routes et de rencontres théâtrales
Notre théâtre permet à chacun de retrouver la part de liberté qu’il doit sacrifier aux exigences sociales ; chacun peut s’y reconnaitre sans prise de tête, en toute liberté, certainement pour mieux contourner la dépression sociale… qui sait ? …
Comédien, marionnettiste, metteur en scène dramaturge, José Alpha est issu de la scène musicale et de la danse. Il a monté en 1970 une adaptation de la comédie musicale « Hair » qui a été donnée en Martinique et en Guadeloupe. Le comédien a été formé au Sermac par le directeur d’acteurs argentin Jaime Jaimes du Théâtre laboratoire de Jerzy Grotowsky. Il a été stagiaire au Théâtre Forum de Augusto Boal à Reims, formé au Théâtre de la Comédie par Philippe Adrien directeur du Théâtre de La Tempète, au Théâtre de pantomime par Pinok et Matho, puis à la Comédia delarté par Giovanni Pampiglione.
José Alpha a été dirigé par Henri Melon, Jean Marie Serreau et Yan Labéjof. Il a dirigé bon nombres de comédiens martiniquais et guadeloupéens avec sa méthode du Théâtre de rue et dans la rue. Il dispense également sa méthode du Théâtre d’ombres aux professeurs des Ecoles (CAPA) de l’Education nationale.
Il a créé avec Vincent Placoly et des historiens martiniquais, pas moins de 8 comédies épiques et dramatiques en concevant le Théâtre de l’Histoire , avec le Père Elie en 1985 le Théâtre sacré sur les parvis des églises avec les textes de Khalil Gibran, le Théâtre d’intervention et performances dans les transports publics et à la demande , le Théâtre de comédie créole (sociale et politique) avec les textes de Tony Delsham, Patrick Chamoiseau, Vincent Placoly, Aimé Césaire, Marie Thérèse Julien Lung Fou, Jean Paul Sartre, Machiavel, Marivaux et Molière.
Ses conférences sur le Théâtre de rue comme ses pièces et mises en scène ont été jouées dans la Caraibe et aux Antilles Guyane (Dominique, Ste Lucie, Jamaique, Cuba, Guadeloupe, Guyane, Puerto Rico) et en Europe (France).

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Association Théâtre de l’Histoire de Saint Pierre
Cie Téatlari- Théâtre des cultures créoles
Ville de Fort de France
THÉÂTRE DANS LA VILLE