Entre cynisme et arrogance

Poster-Tabou

Par Roland Sabra

Edito du 13/10/2008

La crise financière des pays riches a éclipsé la crise alimentaire qui frappe les pays pauvres de puis 2007. Les deux sont pourtant liées, ne serait-ce que par les spéculations du monde de la finance sur les matières agricoles, comme par exemple le stockage de denrées alimentaires pour alimenter la pénurie et faire monter les prix, comme par exemple le développement des bioénergies autrement juteuses en termes de profits que la production  de denrées alimentaires. Chaque année 100  millions de tonnes  de ces denrées sont consacrées à faire le plein des réservoirs automobiles et sont donc retirées du marché alimentaire. « Tu peux crever de faim mais ne touche pas à ma bagnole » tel semble être le mot d’ordre des populations des pays riches…

L’indice FAO des prix alimentaires montre une hausse de 12% en 2006 par rapport à l’année précédente, de 24% en 2007 pour exploser à 50% au cours des sept premiers mois de l’année 2008. Dans le même temps les subventions agricoles octroyées aux agriculteurs des pays riches desservent les agriculteurs des pays pauvres, les produits subventionnés des pays riches étant inaccessibles et insurmontables pour les pays en voie de développement. Et vive la banane martiniquaise bien subventionnée!

Des milliers de milliards de dollars ont été trouvés pour venir en aide aux spéculateurs et nationaliser leurs pertes. Les sommes sont vertigineuses et dépassent l’entendement. 1250 milliards de dollars pour les Etats-Unis, 1700 milliards d’euros de garantie pour les banques de l’Eurogroupe mais les caisses sont vides quand il s’agit de trouver 30 milliards pour venir en aide aux populations affamées dont le nombre s’élève selon la FAO (Agence de l’ONU pour l’Alimentation) à 923 millions de personnes. Ce nombre est en augmentation cette année de 75 millions. 90% des  personnes soufrant de la faim vivent en Asie et en Afrique. Pire, selon le PAM (Programme Alimentaire Mondial) l’aide alimentaire internationale est tombée en 2008 à son niveau le plus bas depuis 40 ans alors même que de plus en plus de pays ont besoin d’une aide d’urgence.

Quand le cynisme et l’arrogance se vautrent dans l’immoralité, alors vient le temps d’un autre monde.

Roland Sabra