« DJANGO », film français de Etienne Comar

A Madiana

– Par Guy Gabriel —

Avec Reda Kateb, Cécile de France, Raphael Dever , Bimbam Merstein, Beata Palya

Nous sommes à Paris en 1943, sous l’Occupation, Django Reinhart , le célèbre guitariste est au sommet de son art ; il est, comme il le dit lui-même, « le roi du swing » et triomphe dans toutes grandes salles de spectacle ; cependant, en Europe, ses frères tziganes sont persécutés par les nazis. Ses affaires vont se gâter lorsque la propagande nazie veut l’envoyer en Allemagne pour une série de concerts…

Django est le portrait original d’un artiste au talent incontesté, auquel Woody Allen avait déjà rendu hommage en utilisant son œuvre au maximum dans son Accords et désaccords, Django Reinhart .

Loin d’un biopic classique, le film s’intéresse à deux années de la vie de l’artiste ; on y découvre un musicien pris dans la spirale du nazisme et qui refuse au péril de sa vie et de celle de sa famille toute forme de collaboration. On découvre un homme ordinaire, qui ne vit que pour sa musique, mais qui, sur le plan personnel doit se débattre dans les filets de trois femmes ; son épouse, sa maîtresse (la toujours excellente Cécile de France) et sa mère, un rien possessive.

A travers ce portrait d’un homme sur un court et intense moment de sa vie, Etienne Comar dresse aussi celui d’une époque confuse, où règne une insupportable intolérance, époque où il ne fait pas bon être juif ou tzigane ; ce qui permet au réalisateur de mettre à distance le personnage pour faire place à la critique et à la violence du nazisme. Mais Django c’est, en même temps, un regard intelligent sur la place du jazz sur la scène parisienne pendant l’Occupation, une ode à cette musique qui rappelle les souffrances des nègres, à la virtuosité de Django Reinhart, virtuosité qui n’avait pas échappé aux nazis, au point de lui offrir un pont d’or pour jouer en Allemagne, mais à quel prix sur le plan esthétique !

Pas de reconstitution précise de l’époque, juste ce qu’il faut pour que Django se rende compte qu’il est impossible que la musique, elle, empêche de voir les dégâts de cette guerre insensée, qui est en train de toucher de plein fouet sa propre famille ; celui que Cocteau appelait le « Doux fauve », va être obligé de se révolter, surtout contre le comportement un rien ambigu de sa maîtresse.

Django est un film qui se situe entre des sentiments qui oscillent émotion et révolte et qui confirme l’indéniable talent Reda Kateb (Un prophète de Jacques Audiard au côté de Tahar Rahim, Les garçons et Guillaume à table de Guillaume Gallienne, Zero Dark Dirty de Kathryn Bigelow, sans oublier Hippocrate de Thomas Lilti….) qui a appris à jouer de la guitare pendant un an pour rendre crédible son personnage, mais aussi à la surprenante et vraie tzigane Bimbam Merstein, dans le rôle de la mère.

Le film de Comar, par son atmosphère et son époque, n’est pas sans rappeler Le procès du siècle de Mick Jackson et reste donc un film qui parle de notre actualité politique immédiate.

Guy Gabriel