D’Irma La Douce à Irma l’ouragan, ou le mythe de la renaissance

— Par Roland Tell —
Quelle dépravation que le spectacle des querelles politiciennes, prenant le dessus à Paris, après les désastres provoqués par Irma l’ouragan à Saint-Martin et Saint-Barthélémy ! De mains qui se tendent, de soutiens tournés vers leurs lointains, ces deux îles avaient pourtant grand besoin, alors qu’à nouveau journalistes et politiciens, dans les médias français, de leur folie de critiques et de blâmes, s’  « éjouissaient » journellement ! Une fois encore, l’esprit d’union et de solidarité se trouvait infecté par les discordes et par les haines du monde politique. Tous les politiciens, recalés à la Présidentielle de Juin 2017, sont soudainement devenus des gueules de souteneurs, très loin du cliché, rendu pourtant fort célèbre par la comédie musicale d’Alexandre Breffort, intitulée « Irma La Douce ».
En effet, dans un fracas de fureurs et d’anathèmes, dévalant sur les ondes, telles les détonations d’Irma l’Ouragan, des politiciens, souteneurs de Dame Politique, se sont crus dans l’éternité soudaine de la campagne électorale, le temps de l’après cyclone. Rallonges déplacées des malheurs d’Irma l’Ouragan, leurs discours prenaient souvent l’allure d’interprétations dérisoires, en méconnaissance totale des tortures inouïes, qu’inflige un ouragan. Là où on attendait la collaboration nationale, à un niveau élevé, les chaînes de télévisions, friandes de mauvaises rumeurs, cherchaient surtout à persuader par l’outrance et les imprécations, bourrant ainsi les crânes, non de la musique d’Irma La Douce, mais des moments d’agonie, vécus ici ou là, au mépris de toute loi morale.
Et pourtant, que d’énergies créatrices à Saint-Martin et à Saint-Barthélémy, pour surmonter la tragédie, avant toute visite présidentielle ! A-t-on assez parlé de ces moments merveilleux de reprise, de coopération, de tous les désespérés d’Irma l’Ouragan, non pas dans le non-agir, comme on l’a décrit, mais dans les activités les plus hautes de tout faire pour survivre, en dépit des grands arrachements de la nuit d’horreur, qu’ils venaient de vivre ? Aucune télévision n’a révélé cette volonté d’agir, de produire, de tendre vers l’avenir ! Bien au contraire, suivant les politiciens souteneurs de Dame Politique, les caméras suivaient ceux qui prétendaient que rien ne pourrait s’améliorer, que tout restera pire !
A ces esprits refroidis, en partance déjà pour d’autres destinations, inépuisable est leur engeance, sans identité rationnelle, ayant d’ailleurs vécu à Saint-Martin, sans vie commune avec les autochtones ! La vie saint-martinoise se fera désormais sans eux, comme un projet à refonder, comme des vies à reconstruire, aux conditions formelles d’existence et de contrôle d’une identité, dans laquelle tous se reconnaîtront, et s’apprécieront réciproquement. Une identité post Irma l’Ouragan, en parallèle d’ailleurs avec l’histoire d’Irma la Douce et de Nestor le Fripé, avec vocation à réaliser une histoire commune, selon une unité citoyenne, où il ne sera plus donné de s’interroger sur l’origine ou sur les ascendants. La tâche politique de l’État Français consiste désormais à mettre en place les infrastructures, les reconstructions, les mesures, les procédures, les formes de progrès, plaidant au mieux pour une conception dialectique et dynamique du processus de mixité.
Après bien des péripéties dramatiques, Irma La Douce et Nestor le Fripé se retrouvent mariés, et parents de jumeaux, combattant, jour après jour, contre le destructeur couteau de l’âge, afin que celui-ci ne puisse retrancher à la mémoire la beauté et la vie de leur amour, de leur reconstruction. Irma L’Ouragan, la désolation profonde de Saint-Martin et de Saint-Barthélémy, que les deux îles ruminent encore et encore dans leurs rêves de renaissance, tout en voulant vivre autrement, avec d’autres enfants, d’autres héritiers, d’autres habitants, tout éternellement. Debout, debout, pour un nouvel élan constructif, de nouvelles générations, et une renaissance de la vie citoyenne, faite d’amitié fraternelle !
ROLAND TELL