Contre les violences envers les femmes, chacun(e) peut agir!

— Par Rita Bonheur, présidente de l’UFM (Union des Femmes de la Martinique) —

je_taime_jetetueIl y a 10 ans, le 13 juin 2005, la population martiniquaise apprenait avec horreur qu’une jeune femme était immolée, en plein centre-ville, à 7h du matin, pour avoir voulu se séparer de son compagnon violent.
Douleur insoutenable, pour sa famille. Condamnation quasi-unanime de toutes et de tous, manifestations, marche silencieuse … Mais aussi peur pour d’autres femmes victimes de violences qui étaient menacées du même sort, à qui leur bourreau disait « sé mem bagay la kay rivé-w, ou kay wè » .
Depuis, le 13 juin est devenu à l’initiative de l’Union des Femmes de Martinique, Journée martiniquaise de lutte contre les violences dans le couple, en mémoire de toutes ces femmes assassinées en Martinique, et pour toutes ces femmes qui ne peuvent vivre en toute liberté…
Mais la violence continue à tuer, à défigurer, à blesser le corps et le mental, à faire souffrir :
– femmes tuées par leur compagnon ou ex-compagnon.
– femmes très grièvement blessées, marquées à vie
– femmes, dont beaucoup souffrent en silence ou sont contraintes à se taire de peur de représailles, encore victimes au quotidien de violences dans ce couple, qui au lieu d’être un lieu d’épanouissement, représente un lieu de souffrance.
En 2014, l’Espace d’Ecoute, d’Information et d’Accompagnement de l’UFM a compté 6 600 passages (contacts téléphoniques ou venues sur place), soit plus de 600 femmes.
COMPRENDRE POUR MIEUX PRÉVENIR, POUR AGIR
Mais pourquoi restent-elles ? C’est la question que se posent encore beaucoup. « Mais qu’ont-elles fait ? » se demandent quelques autres …
Pour aider les femmes victimes de violences, il nous faut :
– comprendre le cycle de la violence, la fragilité et l’instabilité psychologiques dans laquelle il enferme la victime, -comprendre la peur, l’angoisse, mais aussi le sentiment de dépendance, d’impuissance, qui sont engendrés pendant les mois, les années de violence.
– reconnaitre les pièges qui emprisonnent pour sortir de l’emprise : culpabilisation, dénigrement, infériorisation, dépendance, isolement, contrôle, exclusivité, domination, Sortir du jugement et agir! Oui, agir car c’en est assez!
Pour les bourreaux, passivité et silence valent complicité, approbation et même encouragement à continuer.
Nous pouvons :
– Dénoncer à tout instant encore et encore cette domination masculine insidieuse, invisible mais réellement présente, les inégalités entre les femmes et les hommes, la volonté « sociale » de maitriser le corps des femmes et leur sexualité.
– Dire « non » à chaque acte de violence pour nous-mêmes femmes, mais aussi pour toute femme, sous quelque forme que ce soit, dans toute situation qu’elle soit publique ou en famille, entre ami-es.
– Oser interpeller l’auteur et condamner ses actes.
Nous savons le nombre de femmes et d’hommes engagées au quotidien dans le monde syndical, sportif, associatif. Elles et ils peuvent au sein de leur structure mener des actions de sensibilisation et de prévention.
Nous faisons appel à nos artistes, publicistes, journalistes, pour être attentifs(ves) en permanence aux messages véhiculés dans leurs productions. Nous proposons aux enseignant(e)s de réfléchir aux choix de leurs textes, quelle que soit la matière enseignée, comme le préconisent désormais les textes.
Nous interpellons une nouvelle fois les collectivités pour qu’elles s’engagent dans une politique offensive et globale de lutte contre les violences envers les femmes : sensibilisation régulière de leur personnel, intégration dans toutes les formations d’un module citoyen, axes de travail, aide pérenne, à hauteur des besoins financiers, et dans les délais aux associations de lutte comme l’UFM. Soyons toutes et tous résolument solidaires contre les violences dans le couple et ailleurs! Pour que Sandra et toutes les autres ne tombent pas dans l’oubli, pour que les mentalités changent, pour une société plus égalitaire pour le respect, chacune et chacun d’entre nous peut faire.
Respé pou fanm, an pa chak jou!
Rita Bonheur, présidente de l’UFM (Union des Femmes de la Martinique)