Compartiments fumeuses & Choisir de vivre

20 & 21 puis 22 &23 mars 2019 à 19 h 30 au T.A.C.

— Par Christian Antourel —L’enfermement libère des émotions les plus cruelles, mais également très tendres. Au tréfonds de l’aberration carcérale, deux femmes que tout oppose, hors le cœur, les bons sentiments et l’espoir, détruites par leur passé, vont s’apprivoiser et retrouver leur humanité par ce besoin primordial d’aimer.

Joëlle Fossier le dit d’entrée de jeu :  Compartiment fumeuses est une pièce dédiée à toutes les femmes qui résistent , s’affranchissent , espèrent briser leurs chaînes et gagnent leur
liberté. La mise en scène colle au texte et crée l’ambiance « sans lacune ni intervalle. »  C’est un fait de société qui va droit au but , l’idée se dégage d’emblée. On regarde, on a compris. La violence faite aux femmes  dit son expression en des termes froids et durs qui peuvent blesser la conscience du genre humain. Deux femmes obligées de partager la même cellule, l’une en attente de son procès, l’autre purge sa peine. son père la violait elle la tué .Une pièce qui révèle un amour non charnel entre deux femmes de conditions différentes. Dans un univers carcéral morne et sans âme, un univers à la triste figure où seule doit l’emporter une conception visant à les rendre soumises et dépendantes. Ces Eves redevenues originelles ne doivent plus avoir aucune connaissance de leur moi profond. Vivant dans la nudité de l’esprit elles doivent suivre les ordres et les comportements infligés qui s’accordent si bien avec le décor de la cage verrouillée, ignorantes des choses, et d’elles même.

« Evasion par l’amour »

Tout doit les distinguer de la nature où elles vivaient avant, ne leur laisser plus qu’un instinct quasi animal et rien de la volonté. Dès lors, cette volonté n’est plus maitrisée, asservie, maintenue elle perd toute résistance et chute dans un renoncement sans fond, sous l’œil d’une surveillante rébarbative à l’allure de matonne un rien trop expressive. Devaient-elles alors demeurer esclaves soumises inférieures , subir la tyrannie de l’homme ses brimades, la coercition et tomber dans cet abjecte réalité aux allures de satire de théâtre ? L’amour spontané est passé entre ces femmes. Leur subjectivité consiste à les émanciper en les ramenant à leur nature propre, celle dont elles se sont éloignées et qu’elles n’auraient jamais dû quitter. Aucun interdit, aucune loi ne vient limiter cette action, puisque l’action est le mouvement des lois de la nature. Libres, elles sont libres !

A VOIR…
De Joëlle Fossier
Au Théâtre Aimé Césaire
Mercredi 20, jeudi 21
A 19h30
Mise en scène :Anne Bouvier
Avec
Bérengère Dautun
Sylvia Roux
Nathalie Mann
Réservation : 05 96 59 43 29.
Christian Antourel
Texte paru dans France Antilles LE MAG

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Choisir de vivre

— Par Christian Antourel —
C’est dans cette temporalité d’un suspens intolérable de souffrance et de détresse, mais aussi d’amour et de joie que Franck Berthier parvient à mêler la drôlerie et la gravité sans pathos inutile renvoyant ainsi le spectateur à ses propres doutes.

Le tracé d’une vie, un trait de lumière entre deux extrêmes. Un récit traité en monologue par la mise en scène qui narre l’histoire de Thierry devenu Mathilde. Un rôle interprété avec justesse pertinence et sans fausse pudeur par une actrice de renom, Nathalie Mann. Le texte ne se départit jamais d’une dose certaine d’authenticité mêlée de force et ne souffre la contradiction d’aucune tiédeur par sa puissance de feu. L’actrice ne démérite jamais, qui sait en dépit d’un décor réduit à sa plus simple expression emplir l’espace de sa présence. Une multitude de sachets transparents et vides fait contrepoids à la singularité de l’individu sur scène. Elle, contre le monde entier ou perdue dans une foule anonyme. Le cheminement vrai long et douloureux de l’auteur qui se décide à affronter ses tourments et à remettre en cause ses illusions, ses certitudes et leur opposer un imaginaire du possible et de l’efficacité qui se substitue au simple plaisir en réduisant un sexe à l’autre.

Une réparation de « l’ordre universel. »

Ce qui fait la conviction du transsexuel ce n’est pas reconnaitre qu’il se sent femme, mais de se sentir femme malgré un corps d’homme. Il est écrit que la psychiatrie doit se convaincre de son absence de délire ou de déni de la réalité. Cest cela qui donne au sujet la dimension que son dire est vrai, c’est-à-dire pour la médecine qu’il n’est pas « délirant, voire qu’il reste lucide sur son état (…) Là où la demande du transsexuel traduit sa souffrance le médecin fait de la souffrance la réalité de la demande (…) Dès lors que la demande est énoncée avec cette étrange quiétude relative à une notion de victimisation et d’erreur de la nature » Lorsqu’aucun délire tonitruant n’existe, la demande peut être alors considérée et frayer son chemin. Le processus de féminisation devient alors tout à fait acceptable… Puis, son corps parcouru par une masse de nerfs femelles engendrera une nouvelle humanité :la castration s’inscrit donc dans une réparation de «  l’ordre universel. »

Avoir…

Tiré du livre de Mathilde Daudet
Au Théâtre Aimé Césaire
Vendredi 22 samedi 23 – 19h30
Mise en scène
Franck Berthier
Avec : Nathalie Mann
Réservation : 05 96 59 43 29
Christian Antourel