Centième anniversaire du Bauhauss

À la fois école des arts et école de pensée, le Bauhaus a été fondé par l’architecte Walter Gropius il y a exactement 100 ans à Weimar, en Allemagne, réunissant de nombreux artistes et designers parmi les plus brillants d’Europe dans le but de former une nouvelle génération de créateurs à réinventer. le monde. Le Doodle animé d’aujourd’hui célèbre l’héritage de cette institution et le mouvement mondial qu’elle a créé, qui a transformé les arts en appliquant le principe «la forme suit la fonction».

Gropius a imaginé le Bauhaus – dont le nom signifie «maison de construction» – comme une fusion de l’artisanat, des «beaux-arts» et de la technologie moderne. Son bâtiment emblématique du Bauhaus à Dessau était un précurseur du «Style international» influent, mais l’impact des idées et des pratiques du Bauhaus a dépassé de loin l’architecture. Les étudiants du Bauhaus ont reçu une formation interdisciplinaire en menuiserie, métal, poterie, vitrail, peinture murale, tissage, graphisme et typographie, apprenant à conférer aux objets fonctionnels les plus simples (comme ceux du Doodle actuel) les plus hautes aspirations artistiques.

En s’éloignant du luxe pour aller vers la production de masse industrielle, le Bauhaus a attiré une faculté remarquable comprenant les peintres Wassily Kandinsky et Paul Klee , le photographe et sculpteur László Moholy-Nagy, le graphiste Herbert Bayer, le designer industriel Marianne Brandt et Marcel Breuer, dont le tube modèle B3 chaise a changé la conception de meubles pour toujours.

Bien que le Bauhaus soit officiellement dissous le 10 août 1933, ses étudiants retournèrent dans 29 pays et fondèrent le New Bauhaus à Chicago, le Black Mountain College en Caroline du Nord et la White City à Tel Aviv. Les affiliés du Bauhaus ont également occupé des postes de direction à l’Illinois Institute of Technology, à la Harvard School of Architecture et au Museum of Modern Art. À travers toutes ces institutions et le travail créé dans leur esprit, les idées du Bauhaus perdurent.

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Le Bauhaus 1919-33

> Introduction

> I. De l’idée à la réalisation : le Bauhaus de Weimar

> II. L’évolution : le Bauhaus de Dessau

> III. La fin du Bauhaus : la migration vers Berlin

> Conclusion

Introduction

Fondé en 1919 par Walter GROPIUS à Weimar, le Bauhaus (littéralement:  » maison du bâtiment  » ) étendit ses recherches à tous les arts majeurs et appliqués, en vue de les intégrer à l’architecture. Selon le dessein de son fondateur, tous ceux qui participaient à l’édification du bâtiment devaient être pénétrés des principes du maître d’oeuvre et créer en harmonie avec lui, la partie complétant le tout. Appelés par Walter GROPIUS, les plus grands artistes du moment y enseignèrent. Le Bauhaus suscita un vif intérêt dans le monde, mais provoqua de fortes réactions dans les milieux politiques allemands. Transféré à Dessau en 1925, puis à Berlin en 1932, il fut définitivement fermé sous l’oppression des nazis arrivés au pouvoir en 1933.

I. De l’idée à la réalisation : le Bauhaus de Weimar

Henry Van de Velde, souhaitant quitter la Grossherzogliche Kunstgewerberschule de Weimar ( l’école des arts et métiers de Weimar) fondée par lui en 1906 et dont il était le directeur, pressentit Walter Gropius pour lui succéder. En 1915, Gropius accepta, à la condition de pouvoir réorganiser à sa guise l’enseignement des beaux-arts à Weimar. Au printemps de 1919, il réunit la Grossherzogliche Kunstgewerberschule et la Grossherzogliche Hochschule für bîldende Kunst (l’académie des beauxarts de Weimar ) en une Hochschule für Gestaltung ( école supérieur du design ) sous le nom de Das Staatliche Bauhaus Weimar, qu’il installa dans les bâtiments construits par Van de Velde. Le Bauhaus était donc né, avec pour principes fondateurs ceux de William Morris, poète, dessinateur et réformateur britannique du 19è siècle, et du mouvement Arts and Crafts : l’art se devait de répondre aux besoins de la société et la distinction entre les beaux-arts et la production artisanale était désormais jugée caduque. Appelés par Walter Gropius, furent professeurs au Bauhaus, dès 1919, Johannes Itten, Lyonel Feininger, Gerhard Marcks, Adolf Meyer, Georg Muche les suivit en 1920, puis Paul Klee et Oskar Schlemmer en 1921 ; Wassily Kandinsky vint en 1922 et Làszlô Moholy-Nagy en 1923.

La naissance du Bauhaus s’inscrit dans la période de la préfabrication et de l’invention, en effet durant cette période on construit en série des éléments répétitifs qui vont faire de l’architecture un jeu de construction. Le préfabriqué permet d’engendrer une production en série et donne une grande importance à la fois à l’ingénieur et à l’artiste, et c’est en associant la technique et l’art que naît la sérialité. La société de masse était donc organisée autour de la production en série accessible grâce au préfabriqué qui n’est autre que la multiplication de l’unité à l’identique.

Parmi ses principes, l’école soutenait que l’art et l’architecture devaient savoir s’adapter tant aux nécessités qu’à l’influence du monde industriel moderne, et que la qualité d’une création dépendait de l’harmonie entre l’esthétique et la technique. C’est pourquoi le Bauhaus proposait non seulement des classes de sculpture, de peinture et d’architecture mais aussi des cours d’arts décoratifs, de typographie, d’arts appliqués à l’industrie et au commerce ainsi que des cours consacrés à la symbolique formelle. L’association de toutes ces disciplines va permettre de créer, selon Kenneth Francton, la  » construction du futur  » comme il nous l’explique dans son livre  » histoire critique de l’architecture moderne  » où il montre la vision de la cathédrale du futur de Feininger ( voir ci-dessous ).

Ce rapport entre l’enseignement du Bauhaus et la  » construction du futur  » est conforté par les conditions culturelles du début du siècle. En effet le 20è siècle s’ouvre sur une très grande confiance dans l’avenir c’est-à-dire dans le progrès, les sciences et la technique, mais aussi, au plan social, sur une très grande confiance en l’égalité. De plus des organisations urbaines d’une nouvelle échelle sont mises en place comme Inflation de la métropole urbaine avec des chemins de fer et des industries mais aussi la normalisation de la production architecturale qui va entraîner la standardisation. Enfin une culture internationale va permettre des échanges assez rapides entre les milieux artistiques de chaque pays par l’intermédiaire de congrès. L’aventure du Bauhaus ne se conçoit donc guère dans le climat artistique très particulier de l’Allemagne du début du 20è siècle. En effet, pour tenter d’établir une coopération entre les artistes et les artisans d’une part, l’industrie et la technique de l’autre, Hermann Muthesius avait déjà fondé le Deutscher Werkbund ( littéralement  » union de l’oeuvre allemande « ), dont Henry Van de Velde faisait partie, qui avait pour but d’ennoblir le travail artisanal en réalisant la collaboration de l’ait de l’industrie et du travail manuel. Malgré de nombreuses réticences, le Werkbund avait fini par s’imposer chez les artistes et surtout chez les industriels. En revanche, la peinture, déjà dominé par l’expressionnisme s’inposait même au théâtre et au cinéma, Dada apparut, qui prétendait répondre aux événements que le monde venait de subir. En fondant à 36 ans le Bauhaus, en lui permettant de traverser révolutions, putschs et crise financière, Gropius apportait une réponse différente et combien plus humaniste.

La réflexion de Gropius a la même origine que celle de Le Corbusier : la  » révolution machiniste  » du 19è siècle a amené la civilisation à un point de non-retour et nécessite un changement intellectuel profond. Nier la machine équivaut à se condamner, mieux vaut en être le maître et donner à ses produits un  » contenu de réalité  » : éliminer chaque désavantage de la machine, sans sacrifier aucun de ses avantages.

S’il commence à exister une architecture, une peinture, une sculpture modernes, Gropius constate que les objets usuels ne participent pas à ce mouvement : l’artisan, qui a le savoir-faire, plagie les époques révolues, tandis que l’artiste, qui a l’esprit créateur, dédaigne ce travail  » subalterne « . D’où le principe : créer le compagnonnage de la main et de la machine dans la production, ne pas faire imiter par la machine des produits faits à la main, mais créer des objets, faits à la main, qui pourront ensuite être manufacturés.

Walter Gropius, en réunissant les deux écoles d’arts de Weimar, précisera le programme du Werkbund : artisans et artistes créeront de concert leurs oeuvres dans le Bauwerk, qui comprendra la peinture, la sculpture, les arts appliqués, intégrés dans l’architecture, sans que celle-ci soit privilégiée, pour créer un art de vivre accordé au 20è siècle.

A cause se son originalité d’enseignement par rapport aux écoles traditionnelles, le Bauhaus et plus précisément ses étudiants sont considérés comme des hippies, des bohémiens. Au début de l’année 1920 la bourgeoisie de Weimar s’insurgent contre le Bauhaus qui prend des positions politiques et ce fait se confirme par le concours de monuments aux morts pour ouvriers assassinés. Ce concours est décisif pour l’évolution artistique et c’est un projet abstrait qui le remporte. Par ce projet une décision politique est matérialisée et le Bauhaus est alors insulté de communiste, de bolchevique.

Parmi les professeurs du Bauhaus on retrouve Johannes Itten qui se détache par rapport à ses collègues. En effet le Bauhaus durant ses six premières années fut marqué par la personnalité de Itten considéré comme une sorte de gourou qui organise un mode de vie draconien en effet c’est lui qui sélectionne les élèves entrant au Bauhaus.

Ayant suscité l’opposition des autorités conservatrices de la ville et du gouvernement provincial de Thuringe, le Bauhaus de Weimar, institution d’Etat, ferma ses portes – professeurs et élèves solidaires de leur directeur – au terme de son contrat de sept ans sous la montée du nazisme.

De nombreuses villes dont Darmstadt, Francfort, Mannheim étaient disposées à le recevoir, mais c’est Dessau qui l’emporta.

II. L’évolution : le Bauhaus de Dessau

Arrivée à Dessau, la municipalité demanda à Gropius, assisté de professeurs et d’élèves de l’école, de concevoir un ensemble de bâtiments pour accueillir le Bauhaus. Commencés à la fin de 1925, les travaux furent achevés en décembre 1926. Construit en verre et en béton, l’édifice illustre un fonctionnalisme rigoureux, dans un langage architectural proche du néoplasticisme ( voir images ci-dessous ). En effet ces bâtiments ont une architecture moderne décomposée en deux parties : une structure intérieure en béton qui soutient le bâtiment et des murs extérieurs en verre qui ne sont pas porteurs. Cela procure un effet de force soutenant le toit mais aussi un effet de transparence. Le verre est alors très peu répandu dans l’architecture en effet il n’est apparu que vers les années 1850. C’est d’ailleurs l’ingénieur et architecte anglais Sir Joseph Paxton qui réalisa la première expérience du verre dans l’architecture et ce à Londres en 1851 : la construction du Crystal Palace ( le palais de cristal pour l’exposition universelle. Le Crystal Palace ( voir image ci-dessous ), une des oeuvres célèbres de l’architecture moderne, fut entièrement réalisé avec des éléments préfabriqués en verre et en métal et couvrait une superficie de plus de 70 000 km². Démonté et reconstruit à Sydenham, il fut détruit par un incendie en 1936. Cette première expérience du verre engendra un vif succès auprès des visiteurs et à travers cela une grande émotion dans le monde entier, mais à l’époque ce type d’architecture était considéré comme quelque chose de temporaire. A Dessau, les bâtiments du Bauhaus avec leur prééminence extérieure du verre vont acquérir leurs lettres de noblesse…
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