Aux députés qui n’ont pas voté l’inéligibilité des coupables de violences sexuelles

V. Lurel a voté contre! Les autres élus des Antilles étaient absents sans consigne de vote! (1)

ineligililité_violences_sexuelles— Par un collectif —

Le 27 juin, un amendement visant à rendre inéligibles les députés en cas de condamnation pour violences a été déposé par plusieurs parlementaires écologistes. Il a finalement été rejeté par l’Assemblée nationale.

Vous avez été investi-es par vos partis politiques respectifs, de droite de gauche et du centre : le Parti socialiste, Les Républicains, l’UDI, le Parti radical de gauche, EELV, le Front national…

Vous avez fait campagne et vous avez été élu-es lors des dernières élections législatives de 2012. Les citoyennes et les citoyens vous ont fait confiance pour voter des lois dans l’intérêt général, pour nous protéger. La semaine dernière, un amendement a été présenté à l’Assemblée nationale. Cet amendement visait à rendre inéligibles les élu-es ou les candidat-es auteurs de violences notamment sexuelles ou sexistes.

Or, seulement une poignée de député-es étaient présents. Et parmi elles et eux, une pincée seulement ont voté pour.

Après l’affaire Baupin, vous êtes nombreux-ses à avoir réagi, dénoncé et condamné oralement le sexisme. Bien des parlementaires sont intervenues dans la presse, sur les réseaux sociaux, sur leurs blogs, en réunions publiques pour témoigner du sexisme qu’elles-mêmes avaient vécu.

Mais lutter contre le sexisme quand on est responsable politique, ça ne veut pas dire simplement se défendre soi ou répondre quand on en est soi-même victime. Cela signifie à notre sens, que l’on s’engage à protéger les autres femmes, les citoyennes que l’on représente. C’est cela, l’action politique de la représentation nationale. C’est ce qui nous a amenés à voter pour vous, à vous choisir pour voter en nos noms.

Pourtant, à chaque nouvelle affaire de responsable politique massivement accusé de violences sexuelles ou sexistes, les mêmes déclarations, «oh mais on le savait» ou «oh mais moi j’avais su me défendre». Il aurait été possible d’agir, avec cet amendement.

Mesdames les députées, Messieurs les députés, nous sommes profondément déçu-es. Déçues et effrayées de voir s’effondrer chaque jour des droits pour lesquels la lutte fut féroce.

La lutte pour l’égalité, le féminisme, la lutte contre le sexisme ne peuvent pas être des combats individuels, pour soi-même. Ces luttes nécessitent une vigilance constante et vous en êtes, de part votre fonction de parlementaire, des vigies et des exemples.

Nous, femmes, hommes, mères, pères, citoyen-nes ; militant-es de l’égalité, élu-es de tous les bords, nous nous sommes senties abandonnées par vous et par la République. Et quels que soient les arguments, juridiques ou moraux, il nous semble qu’au final, ce renoncement est l’aveu d’un manque de courage politique. L’aveu de l’acceptation de la lâcheté. L’aveu que l’inacceptable peut se produire en toute impunité !

Député-es, vous qui nous représentez, vous qui touchez, et c’est normal, des indemnités pour voter les lois : où étiez-vous le jour de ce vote ? Qu’avez-vous fait de nos voix ? Étiez-vous occupé-es à exercer d’autres mandats ? A quel moment avez-vous choisi de nous abandonner sur ce chemin pourtant si essentiel alors même que votre mandat est de protéger de manière équitable toutes et tous les citoyen-nes ?

Un élu condamné pour violence est un danger pour toutes les personnes et au-delà, un exemple désastreux pour notre république. Il nous semble essentiel que tous les parlementaires prennent la mesure de l’urgence à faire de la sécurité des femmes une priorité.

Circonscription par circonscription, nous lutterons pour faire respecter nos droits et saurons nous en souvenir en 2017, comme nous nous souvenons de la mise en garde de Simone de Beauvoir : «N’oubliez jamais qu’il suffira d’une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question. Ces droits ne sont jamais acquis. Vous devez rester vigilantes votre vie durant.»

Parmi les signataires :

Youssef Ben Ammar, élu local, rappeur ; Assia Benziane, élue locale, cheminote, co-fondatrice du MEFE ; Aurore Bergé, élue locale, co-auteure de Alter Egales ; Lionel Borremans, élu local ; Caroline Bouillard, blogueuse maternité ; Cassia Carrigan, blogueuse, écrivaine féministe ; Elen Debost, élue locale ; Rokhaya Diallo, journaliste, essayiste ; Alexandre Dimeck-Ghione, militant de l’égalité ; Marie-Laure Hubert-Nasser, directrice de la communication de Bordeaux ; Muriel Ighmouracène, fondatrice de CoworkCrèche, auteure ; Anaïs Lunet, fondatrice de BforBaby ; Charlotte Milandri, responsable juridique, blogueuse, secrétaire générale d’association ; Olivia Moore, humoriste de Mère indigne ; Patricia Perez, responsable associative, militante anti-violences sexuelles ; Anaïs du Poulat, blogueuse ; Lucile Piazzola, enseignante et blogueuse ; Marlène Schiappa, élue locale, romancière, fondatrice de Maman travaille ; Mélanie Schmidt-Ulmann, blogueuse, consultante, auteure ; Samir Tine, militant associatif égalité et travailleur social ; et plus 80 autres militant-es féministes de toute la France.

(1) Neuf voix contre et six voix pour

Dans le détail, neuf élus du groupe socialiste, écologiste et républicain ont voté contre, et six élus des autres groupes (Républicains, UDI, gauche démocrate et républicaine, non inscrits…) ont voté pour.

Plusieurs hommes et femmes politiques ont donc été interpellés par les internautes, appelés à se justifier sur leur absence ou leur vote. Le député écologiste François de Rugy, pris à partie, a rappelé qu’en tant que président de séance, il n’était automatiquement pas comptabilisé parmi les votants. De même que Claude Bartolone, en sa qualité de président de l’Assemblée nationale.

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