Au nom de la mère, du fils et de l’intégrisme

— Par Gérald Rossi —

« Le fils », texte de Marine Bachelot Nguyen, m.e.s. de David Gauchard.

David Gauchard dirige le Fils, un texte de Marine Bachelot Nguyen sur une dérive dans les brumes de la droite extrême, avec Emmanuelle Hiron. Saisissant.

Froid comme une chapelle. Propre. Net. Sobre. Un cercle de bois clair, comme pavé, occupe le centre du plateau. Au bord, un clavecin. De bois clair aussi. Et un siège. Et des lumières jaune doré (de Christophe Rouffy) qui délimitent cet espace. Tour à tour, cette piste sera la rue, l’intérieur familial, la pharmacie, l’église, ailleurs. La neutralité est parfaite. Pour résonner de propos qui ne le sont pas.

David Gauchard, qui a commandé le texte à Marine ­Bachelot Nguyen, a conçu un décor minimal pour cet objet théâtral aux prises avec l’actualité récente et présente. Même si traitée par une microfacette. De celles qui aveuglent le plus, parfois. « Après des années à mettre en scène des œuvres du répertoire, j’ai ressenti l’urgence de parler des clivages qui sous-tendent notre société, de toutes ces haines qui deviennent ordinaires », explique David Gauchard. D’abord, la femme est jeune. Face au public, elle raconte simplement sa vie d’étudiante en pharmacie. La rencontre avec celui qui deviendra son époux. Ses émois sentimentaux, physiques. Pudique. Elle dit « je » et d’autres fois « elle » pour parler d’elle. Tout le temps. Puis la femme devient mère. Deux garçons surviennent. Très vite leurs caractères apparaissent opposés. L’un est doux et rêveur, l’autre sportif et bagarreur. Pas de quoi fouetter un garçonnet.
Remugles nauséabonds

Maintenant, la mère, diplôme en poche, exerce dans l’officine de son époux, dans cette petite ville de la Bretagne profonde. Les notables y forment comme une caste. Dans le milieu catholique. Pratiquant. Elle, la mère, parce que le père est assidu à la messe, l’y suit. Avec les garçons. Des relations se nouent. L’encens a des fragrances d’intégrisme. De plus en plus affirmé. L’heure est à la Manif pour tous. Avec ses nouvelles « copines » (on ne dit pas ainsi entre gens de ce monde), elle participe aux rassemblements « contre le mariage homo, contre la loi Taubira ». La pharmacienne hurle qu’il « faut aux enfants un papa et une maman ». Elle dit aussi que, l’homosexualité, ça doit se soigner. Remugles nauséabonds.
La démonstration est implacable

« Mon défi d’auteure, explique Marine Bachelot Nguyen, a été d’entrer dans la logique d’un tel personnage, sans diabolisation ou condamnation préalable, en m’intéressant au processus qui se joue à travers. » …

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Emmanuelle Hiron défend avec brio le portrait d’une femme aveuglée par l’intolérance et le rejet de l’autre. Thierry Laporte/Cie L’unijambiste

Le fils
Texte de Marine Bachelot Nguyen
Mise en scène & scénographie David Gauchard
Avec : Emmanuelle Hiron et un enfant claveciniste
Musique Olivier Mellano
Administration & production : Pierre Ménasché Maud Renard & Agathe Jeanneau
Diffusion La Magnanerie Julie Comte & Victor Leclère
Durée: 1h20

du 3 au 13 mai 2017 : Espace Malraux, scène nationale de Chambéry et de la Savoie
DU 6 AU 26 JUILLET
Avignon Off –
Théâtre de La Manufacture – Collectif contemporain