Aquarius : les récifs de la colère

Mardi 18 octobre 2016 19h 30 à Madiana

aquarius

— Par Alexis Campion —

Kleber Mendonça Filho magnifie l’actrice Sonia Braga dans le rôle d’une sexagénaire déstabilisée par des promoteurs insatiables.

Au fil d’un long et beau récit, Clara (Sonia Braga) fera tout pour garder son logis rempli de disques et d’histoires. (DR)

Salué par la critique avec Les Bruits de Recife (2014), dont les images et la bande-son enchâssaient finement hyperréalisme, angoisse et ironie, le Brésilien Kleber Mendonça Filho revient avec un film plus classique dans sa forme mais pas moins ambitieux ni stylisé. Une fois de plus, il rend hommage à sa ville natale, la capitale de l’État du Pernambouc, que l’on découvre ici mitée par les gratte-ciel, soumise aux insatiables appétits des promoteurs immobiliers qui n’ont que faire du patrimoine. « Comment peut-on démolir aussi librement autant de maisons et d’immeubles qui ont un passé et qui sont des références pour tout le monde? » s’interroge le réalisateur. « À Recife, la ville a été totalement remodelée, rien n’a été fait pour la protéger des intérêts commerciaux. » Un constat qui le scandalise d’autant plus qu’on répète souvent de son pays qu’il est « jeune ». « C’est absurde, Recife a environ 500 ans et une longue histoire! »

Au Brésil, où il vient tout juste de sortir, Aquarius ne laisse pas indifférent. Il a cumulé 250.000 entrées en cinq jours. « C’est un démarrage excellent, sachant qu’il avait fallu quatre mois aux Bruits de Recife pour réunir 100.000 spectateurs, note le cinéaste. Nous avons bénéficié d’une certaine attention car le gouvernement a tenté de l’interdire au moins de 18 ans, ce qui est franchement exagéré pour trois scènes sexuelles. » Le film a aussi créé des remous au Festival de Cannes, d’où il est reparti en mai sans récompense, alors qu’il aurait pu prétendre au prix d’interprétation féminine pour Sonia Braga, sa fascinante héroïne, et où son équipe s’était affichée contre la destitution programmée de la présidente de gauche Dilma Rousseff. Pour Mendonça Filho, pas de doute : « Nous venons d’assister à un coup d’État cynique, technique, opéré sans l’armée, avec la claire intention de ramener aux commandes des conservateurs frustrés, même pas vainqueurs des élections! »…

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