Jour : 16 octobre 2016

« Candide, l’Africain » : un bien commun

— Par Roland Sabra —

candide_africain-2Candide : Croyez-vous que les hommes se soient toujours mutuellement massacrés comme ils le font aujourd’hui ?

Martin : Croyez- vous que les éperviers aient toujours mangé des pigeons quand ils en ont trouvé ?

Candide : Oui, sans doute

Martin : Eh bien ! si les éperviers ont toujours eu le même caractère, pourquoi voulez-vous que les hommes aient changé le leur ?

Lire Candide aujourd’hui c’est plonger dans l’actualité. Candide et Pangloss, Cunégonde et Paquette, Martin et Cacambo ? Des guerres, des atrocités, des régimes totalitaires ou illusoires, le règne de l’obscurantisme et du fanatisme religieux, des tremblements de terre, des inquisiteurs, l’Europe centrale, Paris, Lisbonne, Buenos-Aires, l’Eldorado, Constantinople, Venise, partout Candide tombe de Charybde en Scylla. Et ce parcours est un « Voyage au bout de la nuit. » Tout comme il y a du Candide chez Bardamu il y a aussi, anachronisme mis à part, du Bardamu chez ce Candide. Cette même perte de l’innocence.

Voltaire, considéré comme un des plus grands dramaturges européens en son temps ne survit sur les tréteaux que par ce Candide mille et une fois adaptés depuis sa parution.

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« La Cheffe, roman d’une cuisinière » par Marie NDiaye

marie_ndiayeMarie NDiaye, l’histoire d’une obsession
— Par Marie-Laure Delorme —

Marie NDiaye, l’auteure de Rosie Carpe (prix Femina, 2001) et de Trois Femmes puissantes (prix Goncourt, 2009), s’attache à la trajectoire d’une cuisinière.

Sa beauté hiératique reste inchangée. Elle a été repérée à 17 ans par le fondateur des éditions de Minuit, Jérôme Lindon ; elle est tôt apparue comme l’écrivaine la plus douée de sa génération ; elle a reçu le prix Femina (Rosie Carpe, 2001) et le prix Goncourt (Trois Femmes puissantes, 2009) en moins d’une décennie. La romancière Marie NDiaye partage aujourd’hui sa vie entre Berlin et la Gironde. Les premiers mots de La Cheffe sont « oh oui, bien sûr » et « oh oui, bien sûr » on peut préciser que Marie NDiaye est « métisse » ou « noire ». Elle est née, en 1967, à Pithiviers, de mère française et de père sénégalais. Son univers reste sa langue. Un bureau pris dans un matin d’automne. Marie NDiaye se tient devant nous de passage à Paris et sa grâce d’airain fait parfois écran à ses mots.

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Faubert Bolivar : poésies

faubert_poesieOh, daigne, mon amour
Ne pas t’enfuir à toutes jambes
Si je t’avoue que dans mon coeur
Battent les coeurs des ancêtres
Car c’est d’un amour à foutre le feu
que je t’aime
Interpelant l’histoire et la mythologie, un dit d’amour structuré comme le jeu des osselets (dos / creux / i / s) le poème de Faubert Bolivar assume une dimension expérimentale. Il est tendre et sauvage. La porte, comme figure de l’arrêt, de la distance, y tient une place capitale.
Elle est toujours à abattre, à ouvrir. Un dit d’amour qui cogne aux portes avec suffisamment de force pour les ébranler.

Né à Port-au-Prince en 1979, Faubert Bolivar a fait des études de Philosophie à l’École Normale Supérieure de son pays et à l’Université Paris VIII. Poète, dramaturge et essayiste,il a publié dans divers ouvrages collectifs et revues à travers le monde francophone. Il est, dès 1996, l’un des récipiendaires du Prix Jacques Stephen Alexis pour sa nouvelle « Faux-Lit ». Fin 2013, il reçoit, entre autres, le Prix Marius Gottin d’ETC-Caraïbe pour sa troisième pièce en langue créole, « Mon ami Pyero ».

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Cabu fait grincer l’histoire

cabu_bouches_inutilesUn millier de projets pour la  » une  » de  » Charlie Hebdo  » : c’est  » Cabu s’est échappé ! « , un demi-siècle sous le trait féroce du dessinateur assassiné. Riss commente cinq croquis pour  » Le Monde des livres « 

Abonnés de longue date ou ralliés après les événements de janvier 2015, les lecteurs de Charlie Hebdo connaissent bien la notion d' » échappé « , chère au journal satirique. Chaque semaine, celui-ci publie, en petit format, les dessins exécutés pendant le bouclage du lundi qui n’ont pas été retenus pour la  » une « . En quarante-cinq ans de maison, combien Cabu a-t-il réalisé de ces  » couvertures auxquelles vous avez échappé  » ? Sa veuve, Véronique Cabut, et son ami Jean-François Pitet, archiviste, en ont sélectionné un millier parmi la masse d’originaux que le dessinateur assassiné avait  » minutieusement rangés dans son bordel « .

Cette anthologie de crobars, pour l’essentiel  » jetés  » au feutre noir sur du papier de mauvaise qualité, ne fait pas que raconter un demi-siècle de l’histoire politique et sociale française.

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« Comme si j’étais seul  » de Marco Magini

marco_magini-1Traduction : Traduit de l’italien par Chantal Moiroud.

1995. Le conflit en Yougoslavie s’intensifie. À tout juste vingt ans, Dražen Erdemović s’engage dans l’armée serbe dans l’espoir d’offrir un avenir à sa femme et sa fille qui vient de naître. Né en Bosnie-Herzégovine, de parents croates, Dražen est le symbole même du multiculturalisme yougoslave. L’uniforme serbe est le troisième qu’il endosse, mais rien ne lui importe plus que de voir son pays à nouveau en paix. Il va découvrir l’horreur de la guerre, l’impuissance d’un homme seul face à un groupe de soldats incontrôlés, l’anéantissement des consciences.

La force de ce roman tient dans le choix narratif de l’auteur : trois voix alternent ainsi dans une partition bien rythmée. Celle de Dirk, soldat néerlandais qui assiste à l’impuissance des casques bleus de l’ONU. Celle de Romeo González, juge au Tribunal pénal international de La Haye, qui s’apprête à rendre son verdict un an plus tard. Et celle Dražen, qui devient l’un des acteurs du pire massacre commis en Europe depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.
14.5 x 22 cm – broché – 192 pages
Paru le 25/08/2016 – ISBN 9782357202580

Marco Magini était un enfant pendant la guerre en Yougoslavie.

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